Alors que les regards convergeaient désespérément depuis quatre décennies vers Hans Küng et Eugen Drewermann dans l’attente d’un nettoyage de fond de la poussiéreuse tradition reçue des Apôtres, c’est sans prévenir mais avec fracas que le Cathologue s’est imposé sur Internet comme le nouveau lieu où l’on pense l’homme et Dieu et où se manifeste l’actualité de la Révélation.
La mini-série de L’1visible représente aujourd’hui la tendance lourde — mais très lourde — des modalités neuves de l’union de la foi et de la raison. Fermez Nova et Vetera, oubliez la Revue thomiste, faites feu sur Communio, et plongez-vous sans plus tarder dans la saison 1 de cette efficace apologétique : se mettant à la portée de tous les publics, de 7 à 77 ans, avec une nette prédilection pour le préado, les inénarrables Jérôme et Damien font entrer leur spectateur de plain-pied dans les questions les plus brûlantes de la foi catholique, celles précisément que l’Église hiérarchique, technocratique et à prétentions vaguement intellectuelles tente d’évacuer depuis deux mille ans. Celles qui font mal, qui sèment le doute, qui ouvrent à l’autre et au monde, celles qui déconstruisent en un mot. Par exemple, « L’âne de la crèche a-t-il fait carrière », « Zachée ne se moque-t-il pas un peu du monde », ou encore « Faut-il évangéliser ou bien » (sic). Inutile après ça de préciser que ça balance du steak et que la Commission de théologie internationale ferait bien d’en prendre de la graine.
Nés de la plume miraculeuse d’Hubert de Torcy et d’Edmond Prochain — respectivement directeur de la rédaction de L’1visible et blogueur catholique masqué — Jérôme et Damien sont des étudiants catholiques un peu paumés qui partagent le même appartement, où rôde encore un troisième larron aux apparitions tout à fait inutiles, Hugo, et qu’envahit régulièrement Chloé la mutine voisine parfaitement agnostique. Les deux héros se sont mis en tête de pratiquer la nouvelle évangélisation à leur manière et selon leurs capacités, c’est-à-dire à travers des vidéos artisanales tournées en plan fixe dans leur salon de mauvais goût, où seraient en théorie résolues au profit du néophyte les questions épineuses du catholicisme. Le résultat est évidemment désastreux et, de calembours minables en mésinterprétations flagrantes, l’inculte Jérôme, incarné par un Wallerand Denormandie génial qui à lui seul soutient le rythme comique de la série, développe une théologie parallèle à se rouler par terre.
Derrière la grosse farce, la profondeur du propos souvent surprend et fait de cet outil d’évangélisation non identifié un irrésistible virus de catholicisme populaire.
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Le DVD de la saison 1 est disponible sur la boutique de l’Emmanuel.