L’archevêque de Lyon est interrogé sur une actualité, il est vrai brûlante, dans deux médias locaux, et ses propos suscitent des échos passionnés dans toute la France… En dépit du caractère souvent désagréable de telles réactions, il faut peut-être se féliciter que la parole du Primat des Gaules « percute » ainsi les consciences, en obligeant à reprendre les grandes questions en dehors des cadres convenus dans lesquels on voudrait les enfermer. Encore faut-il, évidemment, qu’il n’y ait pas déformation du sens des propos tenus. Le cardinal Barbarin n’a pas associé l’homosexualité à la polygamie (mot qu’il n’a d’ailleurs pas prononcé) et à l’inceste. Il n’a pas lancé de condamnation morale à l’égard d’une catégorie de la population. Il a mis en garde contre les conséquences structurelles profondes d’une modification de législation sur le mariage. L’ouverture de celui-ci aux personnes du même sexe signifierait, en effet, une atteinte à l’intégrité de l’union conjugale, justifiée par l’accueil et la protection de l’enfant. Il en va ainsi de quelques principes essentiels, sans lesquels une société est promise à l’anomie et à la dissociation. Le grand penseur du droit qu’est Pierre Legendre a donné un nom à la fonction de ces principes. Ils permettent tout simplement « d’instituer la vie ».
Bien sûr, cette intervention d’une des principales personnalités de l’Église de France dans le débat sur le mariage « pour tous » ne pouvait que secouer l’opinion, et d’abord la classe politique et les médias. Bertrand Delanoë, en vif désaccord avec le Cardinal, a néanmoins reconnu que c’était un sage. La sagesse consiste ici à mettre en relief ce qui doit l’être à l’encontre des dérivations qui font perdre de vue ce qui est en cause avec l’union de l’homme et de la femme. Certains — et même la plupart — des avocats de la modification de notre droit, expliquent qu’il s’agit de promouvoir la dignité de personnes, qui dans le passé et aujourd’hui encore, ont été méprisées, voire persécutées. Le cardinal Philippe Barbarin affirme et montre que, dans son esprit, il ne s’agit nullement de mépriser. Au contraire, il va très loin dans l’affirmation de la présence nécessaire de personnes d’orientation homosexuelle dans l’économie ecclésiale. Lui-même s’est distingué par un charisme d’accueil et de dialogue qui dément toute interprétation négative à leur égard. Il ne faut pas se tromper sur la question posée. Elle est trop déterminante pour le devenir le plus humanisant de notre société.