Juchée au sommet de la colline de Montmartre (du Mont des Martyrs), la Basilique du Sacré-Cœur est majestueuse dans son habit de pierres vêtu de blanc. La « Dame blanche » domine Paris. De là, il y a 6 mois, les 15 et 16 avril, de nombreux badauds ont vu Notre-Dame de Paris en feu. Signe pour notre temps. Après avoir gravi les quelques 222 marches de l’escalier qui longe le funiculaire de Montmartre, nous retrouvons, ce 16 octobre, les descendants de la famille de la Jaille, qui a participé à la construction de la Basilique et à sa consécration au Sacré-Cœur.
Une famille réunie autour du Sacré-Cœur
Carine de La Gorce et ses frères Emmanuel et Pierre-Antoine, qui sont venus tout spécialement d’Asie, accompagnent leurs parents venus rendre hommage au Sacré-Cœur. Alberto Montrond, leur cousin, les a rejoints. Il ne passera que 48h sur place. Il vit à Boston. Ensemble, accompagnés de leurs amis, ils viennent d’assister à la Messe du centenaire. Même si ce n’est pas la Messe officielle de lancement du Jubilé, qui est prévue le dimanche suivant, le 20 octobre, en présence de l’archevêque de Paris, Mgr Michel Aupetit, ils ont tenu à honorer le jour anniversaire historique du 16 octobre 1919. Ce n’est pas le hasard du calendrier de l’époque, car c’est, aussi, le jour de la fête de sainte Marguerite-Marie Alacoque. « Sans la sainte du Sacré-Cœur, sans les apparitions du Sacré-Cœur à Paray-le-Monial, la consécration n’existerait pas », nous explique Carine. Elle vit entre Paris et Paray-le-Monial. Quand on la rencontre pour la première fois, elle semble en retrait. Laïque consacrée, elle vit sa vocation d’épouse du Christ, principalement au sein du diocèse de Paris. Elle n’a pas oublié de remplir sa lampe d’huile à l’arrivée du Roi des rois. Elle place la France, l’Église et le Sacré-Cœur au premier plan, au centre des enjeux sociétaux actuels. Pour elle, « ce centenaire de la consécration de la Basilique de Montmartre au Sacré-Cœur est très important, tout à la fois pour l’Église que pour notre pays pour qui le Sacré-Cœur devrait être l’emblème. Les Français doivent retrouver le chemin de leur baptême et de la foi. La France, lumière qui éclaire les nations, doit jouer pleinement son rôle de Fille-aînée de l’Église, dans l’humilité, l’exemplarité et la défense des plus petits… »
Une famille ancrée dans l’histoire
Emmanuel est l’historien de la fratrie, composée de cinq frères et trois sœurs. Grand, élancé, les cheveux courts, l’œil pétillant, ce généalogiste, qui ressemble à un aventurier, connaît l’histoire de la Basilique de Montmartre dans ses moindres recoins. Elle est intimement liée à l’histoire familiale. « Notre trisaïeul, l’amiral Édouard de la Jaille participa, voilà tout juste 100 ans, en tant que dernier Président laïc de l’Œuvre de la Propagation de la Foi et sénateur, à la consécration de la Basilique de Montmartre au Sacré-Cœur, dont il supervisa, en partie, la construction. On lui doit, notamment, la Chapelle de la Marine située à l’entrée de l’édifice, à gauche du narthex. Ce fut, également, sous ses directives que fut créée la Chapelle consacrée à la Vierge Marie siégeant à l’arrière du Chœur et qui permit d’accueillir, entre autres, l’importante Vierge de Pontmain si riche en symbole. Si nous sommes venus en famille et avec quelques amis, c’est, certes, avant tout pour honorer le Sacré-Cœur mais, aussi, Sa représentante, sainte Marguerite-Marie Alacoque dont les reliques furent exceptionnellement présentes sur l’autel durant la Messe de ce jour célébrée par Mgr Jean Laverton, (NDLR : le recteur de la Basilique). Ordinairement, elles sont exposées à la prière des fidèles dans la Chapelle qui lui est dédiée. Nous sommes venus pareillement honorer Notre-Dame-Des-Roses (NDLR : le 16 octobre 1964, apparition de la Vierge-Marie à San Damiano), saint Michel Archange (apparu une première fois en France au Mont-Tombe, le 16 octobre 708), représenté dans la chapelle située à droite de l’entrée de la Basilique, saint Longin (le centurion romain qui transperça de sa lance le Cœur du Christ), saint Gall dont le nom évoque le Baptême de saint Pierre et annonce celui de la France (Gallia). Nous n’oublions pas saint Jean-Paul II, dont c’est l’anniversaire de l’élection aujourd’hui. » Emmanuel, en tant que descendant direct de chouans est venu aussi honorer la reine Marie-Antoinette, dont c’était, également, l’anniversaire de son exécution politique (elle a été décapitée), le 16 octobre 1793. Il rajoute : « Il ne faut pas oublier, aussi, que depuis 1885, il y a l’adoration perpétuelle de l’Eucharistie. Des catholiques se relaient jour et nuit dans la Basilique pour adorer et prier le Sacré-Cœur à Montmartre. » Emmanuel est un livre ouvert. Du côté de Pierre-Antoine, son cadet, l’allure est différente. L’écoute attentive semble sa première qualité. Il a les mêmes ressorts que son frère et sa sœur et explique que « cette réunion familiale et amicale est importante à plus d’un titre. Nous soutenons tous la cause du Roi des rois, de Jésus, qui est de répandre Sa charité par la dévotion à Son Sacré-Cœur. Notre message est de remettre au premier plan les valeurs chrétiennes de la France. Et, en disant cela, je pense à l’Apocalypse où la bête à 7 têtes et à 10 cornes s’efforce de détruire l’Église en s’attaquant aux 7 sacrements et aux 10 commandements. » Pierre-Antoine n’est pas un laïc consacré, mais à l’entendre, il en a l’esprit, le verbe.
Consacrer le Cap-Vert au Sacré-Cœur
Alberto, leur cousin, n’a pas fait tout le voyage depuis Boston, pour rien. Outre ses fonctions de Président du cabinet de conseil Verde International, cet ancien champion du monde de taekwondo est, aussi, député de l’étranger du Cap-Vert et advisor au sein de la prestigieuse université de Harvard. En venant ici, il vient prier pour un très beau projet : la consécration de son pays, le Cap-Vert, au Sacré-Cœur. Il explique que « nous avons besoin de beaucoup de paix dans le monde et spécialement en Afrique. C’est pour cela que toute la nation du Cap-Vert, qui est chrétienne, veut se consacrer au Sacré-Cœur. Ce projet est actuellement en discussion au niveau politique. C’est pour l’instant un rêve. J’espère qu’il deviendra vite réalité. Nous y travaillons, en tout cas ».
Confier la France au Sacré-Cœur
En remontant, dans la Basilique, les descendants tiennent à prier dans la chapelle de Notre-Dame de la Mer ou chapelle de la Marine, construite avec le soutien de leur trisaïeul. On leur doit aussi la célèbre « Savoyarde », la plus grosse cloche du monde, qui sonne ! En ressortant, tous regardent instinctivement vers elle, en espérant que tout au long de ce jubilé, qui démarre officiellement ce dimanche 20 octobre, la « Savoyarde » réveille les racines chrétiennes de la France. Et, pourquoi pas, que le gouvernement Français fasse ce qu’a demandé Jésus à sainte Marguerite-Marie, en s’adressant au roi de France de l’époque, Louis XIV : « Je prépare à la France un déluge de grâces lorsqu’elle sera consacrée à Mon divin Cœur. »
—
Marguerite-Marie Alacoque : la sainte du Sacré-Cœur
Née le 22 juillet 1647 à Verosvres, à 29 km à l’est de Paray-le-Monial, Marguerite a cinq ans quand elle décide de se consacrer à Dieu : « Mon Dieu, je vous consacre ma pureté et Vous fait vœu de perpétuelle chasteté ». Elle est la petite dernière et la cinquième de la famille. Elle nait dans une famille très croyante, qui vit dans l’aisance. À 9 ans, Marguerite (elle fera apposer son prénom de Marie, lors de sa confirmation) commence à vivre ses premières mortifications corporelles. Puis, elle est frappée, pendant 4 ans, de paralysie. À la fin de sa paralysie, elle se consacre à Marie et fait vœu d’entrer dans la vie religieuse. Elle devient orpheline à 12 ans. Avec sa mère, elles sont recueillies par ses tantes qui les maltraitent durement. Elle entre au couvent de la Visitation de Paray-le-Monial, en 1671, après avoir entendu Jésus lui dire : « C’est ici que Je te veux ». Entre 1673 et 1675, elle va bénéficier des « grandes apparitions ». Retenons la plus importante : celle de 1675 au cours de laquelle Jésus lui dévoile son Cœur. Son message ? Écoutons-le : « Mon divin Cœur est si passionné d’amour pour les hommes et pour toi en particulier que ne pouvant plus contenir en lui-même les flammes de son ardente charité, il faut qu’il les répande par ton moyen et qu’il se manifeste à eux pour les enrichir de ses précieux trésors que Je te découvre. » La même année, en 1675, son conseiller spirituel, Claude La Colombière, arrive à Paray-le-Monial. Jésus l’a prévenue de son arrivée : « Je t’envoie mon fidèle serviteur et parfait ami ». Ensemble, ils vont mettre en place le « culte du Sacré-Cœur », avec l’accord de sa communauté religieuse. Il s’agit, par exemple, de vivre l’Heure Sainte (le jeudi soir entre 23h00 et minuit) et de vénérer l’image du Cœur de Jésus. En 1685, toutes les sœurs se consacrent au Cœur de Jésus. À la suite d’une longue maladie, Marguerite-Marie meurt le 17 octobre 1690, à l’âge de 43 ans. Elle est béatifiée en 1864 et canonisée le 13 mai 1920.
—