L’affaire du mariage annulé à Lille pour une question de virginité n’a pas fini d’alimenter les conversations. Féministes, adversaires du communautarisme, militants des droits de l’homme, tous se sont élevés contre ce qui apparaît bien comme une régression. L’indignation est si générale que la Chancellerie a demandé au procureur général de Douai d’interjeter appel de la décision du tribunal de grande instance de Lille.
Dans ce concert d’indignation, il convient d’abord de faire la part du droit. Le juge de Lille (qui était une juge) n’a pas proclamé la nullité d’un mariage au motif que la mariée n’était pas vierge ; sa décision a été motivée par le mensonge (reconnu) de la mariée sur sa virginité. En somme, l’annulation du mariage n’a été considérée que comme un élément de nature à vicier le consentement nécessaire à la validité du mariage. Le mariage en question n’a pas été annulé parce que la mariée n’était pas vierge, mais parce qu’elle avait prétendu qu’elle l’était.
Dans cette optique, la juge de Lille a rendu une décision conforme à la loi, et plus précisément à l’article 180 du Code civil qui mentionne l’erreur sur la personnalité du conjoint comme motif d’annulation.
Mais le droit n’explique pas tout et l’adage « summum jus summa injuria » (la justice extrême devient extrême injustice) trouve peut-être ici une nouvelle application. On peut en effet se demander raisonnablement quelles pressions ont amené la mariée à mentir sur sa virginité, et surtout s’interroger sur une demande d’annulation qui ressemble un peu trop à une répudiation. Que l’affaire concerne deux musulmans n’est pas un hasard. Une telle affaire serait peu concevable dans un couple catholique (par exemple) où la virginité, avant le mariage, ressort essentiellement du tribunal de la confession,, voire (dans le pire des cas), des tribunaux ecclésiastiques.
En fait, la décision du TGI lillois semble ici renforcer une certaine posture communautaire et l’on ne peut que le regretter. Un tribunal n’est pas une instance morale. Même si elle n’est évoquée qu’indirectement, la question de la virginité, question intime entre toutes, ne devrait pas avoir sa place dans un prétoire.
Décidément, la laïcité française se heurte encore à bien des ambiguïtés
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