C’est une expérience étrange que de promouvoir un livre à la radio. En effet, les auteurs sont tellement immergés dans leurs sujets que, bien souvent, ils n’apprécient guère que les autres personnes ne soient pas intéressées par les détails qui, eux, les préoccupent.
Ceci est tout aussi vrai lorsque le sujet traité est le christianisme ou Jésus-Christ.
Pour prendre un exemple concret, lors de la promotion de mon dernier livre, quelques-uns des journalistes que j’ai rencontrés ont été quelque peu surpris lorsque je leur ai dit que la toute première information que nous ayons de la résurrection de Jésus, date seulement de quelques années après la crucifixion, qui a eu lieu en l’an 31 ou 32 de notre ère.
Comme la plupart des gens, ils pensaient que la toute première information se trouvait dans les Evangiles, peut-être dans l’Evangile de Marc que le consensus universitaire date aux environs de l’an 70, soit 40 ans après la crucifixion. Ils ont entendu cette incessante litanie des sceptiques dont regorge internet : l’information la plus ancienne que nous ayons de la résurrection date de 40 ou 50 ans après la crucifixion.
Ceci est entièrement faux.
Dans les faits, l’information la plus ancienne nous vient de la première lettre de saint Paul aux Corinthiens. Il s’agit du récit de ce qu’il a entendu juste après sa conversion sur le chemin de Damas.
Voici ce passage dans son intégralité :
« Je vous ai donc transmis en premier lieu ce que j’avais moi-même reçu, à savoir que le Christ est mort pour nos péchés selon les Ecritures, qu’il a été mis au tombeau, qu’il est ressuscité le troisième jour selon les Ecritures, qu’il est apparu à Pierre, puis aux Douze. Ensuite, il est apparu à plus de cinq cents frères à la fois – la plupart d’entre eux demeurent jusqu’à présent et quelques-uns se sont endormis – ensuite il est apparu à Jacques, puis à tous les apôtres. Et, en tout dernier lieu, il est m’est apparu à moi aussi, comme à l’avorton. » (1Co15, 3-8)
Ceci est la toute première information de la résurrection du Christ que nous possédons : une information certaine que Paul « a reçu » entre un et trois ans après la crucifixion.
Nous ne sommes pas certains du lieu où Paul l’a reçue. Dans sa lettre aux Galates, peut-être écrite en l’an 46 mais plus probablement plus tard, Paul raconte sa visite à Jérusalem trois ans après sa conversion lorsqu’il « (monta) à Jérusalem rendre visite à Pierre et (demeura) auprès de lui quinze jours » (Ga1,18).
Cependant, juste après sa conversion de Damas, il rencontra les leaders du mouvement de Jésus dans cette même ville, et a très bien pu entendre cette information à ce moment-là.
Excepté quelques exceptions, même les universitaires sceptiques acceptent que cette toute première information « non-écrite » de la résurrection ne date pas plus d’un ou deux ans après la crucifixion. Les seuls qui ne soient pas d’accord avec cette thèse sont les « mythicistes » dont la critique est plus radicale. Pour eux, Jésus de Nazareth n’a jamais existé et ce passage de la première lettre aux Corinthiens aurait été inventé au 2ème siècle de notre ère lorsque les grecs païens auraient inventé le « mythe du Christ ».
Mais, pour la plupart des historiens, dont les sceptiques, l’information de Paul dans la première lettre aux Corinthiens est ce qu’elle semble être : le récit, au milieu des années 50, lorsqu’il a certainement écrit cette lettre, d’une information qu’il a entendue très tôt, après sa propre vision de Jésus ressuscité sur la route de Damas.
Bien entendu, cette première information soulève quelques difficultés pour qui veut harmoniser toutes les versions des informations que nous possédons sur la résurrection (ce que je fais dans mon dernier livre, Enquête sur le début du christianisme).
La première chose est qu’il n’y a aucune mention d’un tombeau vide, alors que ceci est décrit dans les Evangiles. Ni des femmes qui, les premières, trouvèrent le tombeau vide. En plus de cela, cette première information se réfère à plusieurs individus qui ont vu Jésus ressuscité et qui ne sont pas mentionnés dans les Evangiles, tels que les « cinq cents ».
Ce qui est cependant le plus important, c’est que ce passage nous montre que les disciples de Jésus ont cru extrêmement tôt que celui-ci était ressuscité d’entre les morts.
La plupart des universitaires sceptiques du monde entier affirment ceci, parmi lesquels figurent des agnostiques tel que Bart Ehrman, des sceptiques du « Jésus Seminar » comme Robert Funk, et des historiens séculiers comme Marcus Borg et E.P. Sanders.
Robert J. Hutchinson est un écrivain américain. Son livre le plus récent est Enquête sur le début du christianisme. Comment une poignée de pêcheurs, de soldats et de prostituées ont transformé le monde, Salvator, 2018.
Il tient un blog : www.roberthutchinson.com