C’était presque hier, et c’est presque complètement oublié. Un auteur à succès, idolâtré par les médias, théologien converti en mythologue, prêtre recyclé en gourou sectaire, s’adressait à son évêque pour lui signifier définitivement que « le vieil argument de l’historicité du christianisme, mis en avant depuis les Pères de l’Église, ne fait plus le poids face aux données de l’histoire des religions ». Et de prendre pour exemple type l’Ascension, la montée du Seigneur au Ciel. Dans cet événement rappelé par le Nouveau Testament, il n’y aurait à proprement parler rien d’historique. Tout serait de l’ordre du symbolique pur.
Sans doute s’agit-il d’un cas singulier, d’un personnage en rupture avec la foi ecclésiale. Mais il faut bien reconnaître que trop souvent tant l’Ascension du Seigneur que l’Assomption de la Vierge Marie sont escamotées dans les commentaires, comme relevant d’un domaine difficile à assimiler par le commun des mortels, ce dernier appartenant à une civilisation d’inspiration très positiviste. Et pourtant, c’est toute l’originalité du christianisme qui est en cause. Celle qui se rapporte au mystère de l’Incarnation et qui veut que Dieu ait visité la Terre, en revêtant notre humanité. Ainsi une alliance, jusqu’ici inconcevable, s’est-elle établie entre le Ciel et la Terre. Le rapport ordinaire des anciennes religions avec le monde de l’au-delà et de l’invisible avait toujours été d’ordre mythologique, au sens où c’est l’imagination humaine qui se déployait pour dessiner la figure de ses dieux. Le philosophe Feuerbach y discernait justement le mouvement par lequel l’homme se désappropriait de lui-même pour inventer l’essence divine.
L’inédit de la révélation chrétienne veut que ce soit le Ciel qui s’adresse directement aux hommes dans la présence vivante du Verbe incarné. Dès lors, il n’y a plus de mythologie concevable et les événements les plus caractéristiques de la venue de Dieu, en Christ, relèvent de l’histoire et non de représentations symboliques. Il en va de l’Ascension comme de la Résurrection. « Pourquoi vous étonnez-vous ainsi à regarder le Ciel ? » demandent les anges aux apôtres. « Celui qui vous a été enlevé, ce même Jésus, viendra comme cela, de la même manière dont vous l’avez vu partir vers le Ciel » (Actes 1,11). L’Ascension est la manifestation la plus sensible de l’indéfectible communion que le Christ est venu établir entre le Ciel et la Terre. Nous sommes désormais citoyens d’un monde nouveau, appelé à la gloire.
Pour aller plus loin :
- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- Jean-Paul Hyvernat
- Liste des ouvriers pastoraux, Evêques, Prêtres, Religieux, Religieuses et Laics tués en 2011 et 2010
- Malentendu islamo-chrétien ou malentendu entre chrétiens sur l'islam ?