La terre des anges - France Catholique
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Noël : Dieu fait homme
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La terre des anges

Si certaines apparitions mariales sont associées à des manifestations angéliques, aucune ne rivalise avec celles du Laus (Hautes-Alpes). La Vierge Marie y est apparue pendant 54 ans à Benoîte Rencurel, qui a également vu les anges plus de 600 fois ! Reportage.
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Le sanctuaire de Notre-Dame du Laus dans les Hautes-Alpes.

Le sanctuaire de Notre-Dame du Laus dans les Hautes-Alpes.

Rien sur place n’atteste la présence du surnaturel. Le sanctuaire de Notre-Dame du Laus se niche sur les contreforts d’une vallée sur la commune de Saint-Étienne-le-Laus, à quelques kilomètres de Gap. Il rythme la vie du hameau où de modestes fermes témoignent encore d’une activité agricole. Les moutons pâturent non loin des sapins et des broussailles. Au XVIIe siècle, la Vierge Marie s’est manifestée auprès de Benoîte Rencurel, en lui confiant que le Laus était une terre qu’elle avait demandée à son Fils pour la conversion des pécheurs.

Depuis, les pèlerins se recueillent dans la basilique construite sur le lieu des apparitions mais aussi sur la colline de Pindreau, où la mère de Dieu s’entretenait également avec la voyante. Les anges, qui se sont manifestés après la Vierge, n’ont quant à eux laissé aucune trace, hormis la statue du col de l’Ange, à une bonne demi-heure de marche du sanctuaire. Souriant, élevé à deux mètres de hauteur sur une colonne qui surplombe un oratoire, la créature ailée témoigne du combat spirituel enduré par la voyante.

À plusieurs reprises, Benoîte Rencurel se sentit en effet transportée sur cette montagne en pleine nuit. Véritable déplacement physique ou voyage intérieur ? La bergère se sentit bousculée et effrayée et elle ne dut son salut dans l’épreuve qu’aux anges, venus la ramener dans la chambre de sa petite maison située à côté de la basilique. La présence angélique, telle qu’elle transparaît dans le paysage du Laus et dans la vie de Benoîte, est une discrète évidence.

« Les bons anges sentent bon »

Les purs esprits se sont manifestés à la voyante à travers les cinq sens. Cela peut être l’odorat : « Les bons anges sentent bon, donnent de la joie et de la consolation », confie la bergère dans les manuscrits du Laus. Ou bien l’ouïe, quand elle entend « des chants mélodieux qui lui donnent une joie inconcevable ». Enfin elle les voit tels qu’ils se font voir pour être reconnus : « Son bon ange lui apparaît sous la forme d’un petit enfant, avec des ailes comme on le dépeint, brillant comme le soleil, sans éblouir. » L’expression rapportée dans les manuscrits du Laus, « comme on le dépeint », est intéressante. Les anges se manifestent en prenant l’apparence par laquelle nous avons l’habitude de les imaginer. Ainsi, Benoîte sait que l’être spirituel qui est auprès d’elle est bien un ange.

Des témoins amicaux

Quelle est sa mission auprès de la voyante ? « Les anges du Laus ne sont pas là pour transmettre un message. Ils témoignent d’une amitié spirituelle à une époque, la période janséniste, où l’homme est loin de Dieu », explique le Père Ludovic Frère, le recteur du sanctuaire Notre-Dame du Laus. Benoîte les accueille parfois avec une grande familiarité. Ainsi, un jour, un ange lui apparaît de bon matin. « C’est trop tôt. Je vous prie d’attendre. Je ne suis pas encore habillée ! », lui répond-elle alors en chemise de nuit… « L’expérience de Benoîte avec les anges l’aide à simplifier son rapport à Dieu », ajoute le Père Frère. Comme dans une relation véritablement amicale, les anges sont là dans les épreuves, pour consoler la bergère du Laus, pour la mettre en garde face au danger, ou pour la libérer d’inquiétudes inutiles. « Ainsi l’ange dit à Benoîte de ne pas se troubler dans les affaires du monde, qu’elle fasse ce qu’elle pourrait et que Dieu ferait le reste » s’émerveille le recteur.

De bons conseilleurs

Les conseils prodigués sont souvent très simples : être patiente et ne pas se fâcher en recevant les pèlerins, qui afflueront par milliers dès que les premières apparitions mariales seront dévoilées en 1665.

La bergère ne voit pas toujours les mêmes anges et l’expression « ange gardien » n’était pas courante à l’époque. Lorsqu’il apparaît seul, Benoîte le nomme « mon bon ange » et sa compagnie est naturelle. Elle n’est pas non plus troublée par la pluralité et la diversité de ces êtres, qu’elle décrit parfois comme des angelots.

Maîtres de prière

Mais, s’ils ne délivrent pas de message, ils sont des maîtres de prière, de louange et d’adoration. Ainsi la nuit de Noël 1700, après la messe de minuit, Benoîte voit une procession d’anges se rendre dans l’église, « portant un grand étendard parsemé de belles fleurs. Ils étaient en très grand nombre, habillés moitié de blanc et moitié de rouge. Ils chantaient le “Gloria in excelsis” ». Jamais la voyante ne connaîtra une expérience aussi solennelle.

Le jour de la Toussaint en 1702, elle sera cependant fortement impressionnée par une procession d’âmes tirées par deux anges hors du purgatoire. « Ils chantaient les litanies des saints et les âmes bienheureuses répondaient. » Cette dimension extraordinaire des visions se conjugue avec la pratique quotidienne du chapelet récité avec son « bon ange » qui commence le « Je vous salue Marie » tandis que Benoîte lui répond.

Tant de simplicité, mêlée à tant de majesté, trouve son acmé au moment de la messe. Les anges permettent, en effet, à Benoîte d’entrer dans le mystère car ils sont les précieux gardiens du respect de l’Eucharistie.

Benoîte est bouleversée de découvrir tant de prévenance. Les manuscrits du Laus rapporte qu’elle voit, au cours d’une messe, un prêtre étranger faisant, par mégarde, tomber une hostie en communiant : « Un ange la lève, la met dans le ciboire », racontera-t-elle… Une autre fois « à la grand-messe, Benoîte voit jusqu’à la consécration un ange en l’air. Au-dessus du tabernacle, il souriait aux prêtres, aux clercs et aux personnes dévotes. Il disparaît ensuite quand Jésus se rend réellement présent ».

Pour le recteur du Laus, il faut retenir « le sourire des anges ». « Eux qui jouissent au Ciel de la vision béatifique, ils reflètent de tout leur être le sourire de Dieu. Comme les anges, il faut laisser le sourire divin nous gagner, pour pouvoir, nous aussi, le refléter. Par eux, nous devons donc aussi apprendre à sourire davantage à la vie. »

L’autre enseignement souligné par le prêtre est la propension naturelle de Benoîte à prier avec les anges. Propension d’autant plus remarquable que ces créatures ont chacune une personnalité, qu’ils sont francs et ne s’embarrassent pas de mots. « Cela permet de ne pas faire des anges des demi-dieux » ajoute-t-il.

Le sourire des anges

Pour le Père Ludovic Frère, le but des anges est de glorifier le Seigneur et de convertir les âmes. Les anges ont un immense respect pour la Vierge Marie, Reine des anges, qu’ils honorent, mais ils sont là pour conduire la voyante à Jésus. La finalité de l’amitié angélique est d’aller au Christ.

Le recteur, qui veille sur le sanctuaire du Laus depuis onze ans, confie combien ces purs esprits ont changé sa vie spirituelle : « Les anges sont devenus des amis et des facilitateurs. Il m’arrive de prier mon ange gardien et je l’envoie visiter l’ange gardien d’une personne avec qui j’ai des relations difficiles. Ensuite, lorsque je célèbre la messe à l’autel, je pense souvent que les anges sont là, et qu’ils sont en adoration. Quel mystère extraordinaire ! Cela nous aide à ne jamais banaliser la messe. »

Ainsi les anges du Laus nous apprennent-ils l’essentiel à travers l’amitié qu’ils tissent avec certains êtres humains : la vie spirituelle n’est pas un aspect parmi d’autres de notre vie. Elle doit tout transformer en nous et entre nous.

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Nota : Les manuscrits du Laus sont l’œuvre de quatre auteurs qui ont connu Benoîte. Le texte ci-dessus est émaillé de phrases extraites des manuscrits.