La sociologie politique en émoi - France Catholique
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Le martyre des carmélites
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La sociologie politique en émoi

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Décidément, il s’est vraiment passé quelque chose ces derniers mois, qui modifie substantiellement les données de la sociologie politique, au sens large. Cette réalité dérangeante a été longtemps niée par ceux qui voulaient tout ramener à leur logiciel ou à leurs coordonnées idéologiques. Cela continue d’ailleurs. Une théorie se développe en ce moment pour rendre compte du phénomène de la Manif pour tous, sous le chef de la panique morale. Face aux évolutions irréversibles des sociétés démocratiques, toute une mouvance, souvent inspirée par l’Église catholique, révélerait son affolement et son incompréhension. Sous-entendu : d’ores et déjà cette mouvance est condamnée par l’histoire, elle a déjà perdu la bataille, comme elle a perdu toutes celles qui l’ont précédée dans l’ordre des mœurs.

Pourtant, sous l’assurance d’un tel discours, perce une inquiétude, car il n’y a pas si longtemps, ceux qui le développent assuraient que le refus de la loi Taubira concernerait une opposition résiduelle, incapable de mordre sérieusement sur l’opinion et sûrement pas de déclencher une protestation populaire de cette ampleur. Un tel déferlement les a littéralement abasourdis, on le comprend, parce qu’il contredisait toutes les prévisions et tous les diagnostics. C’est à un point tel que désormais les politologues sont contraints d’analyser la nouvelle donne avec des critères complètement recyclés. C’était très intéressant de suivre, par exemple, l’émission d’Yves Calvi C dans l’air, où assez libres des interprétations idéologiques, des universitaires sérieux et pourtant bien en cour, notaient que la manifestation pour tous modifiait le champ habituel de leur discipline en faisant intervenir un facteur inattendu, puissant, qui désorientait les politiques et les obligeait à envisager le futur avec d’autres paramètres. Il était patent que c’était une autre culture qui se formulait avec la jeune génération et que les formations telles que l’UMP étaient obligées d’en tenir compte.

Quand la gauche elle-même se met à réfléchir en dehors de son aire bien balisée, elle constate qu’il se passe bel et bien quelque chose d’irréductible. J’en veux pour preuve le colloque de la fondation Jean-Jaurès qui s’est tenu hier. Certes, la théorie de la panique morale y a été largement développée par Caroline Fourest, mais plusieurs intervenants moins convenus n’ont pas manqué de souligner que le débat, et plus largement la culture, étaient en train de modifier leur champ structural et qu’il fallait que la gauche s’adapte, sous peine de ne pas pouvoir faire face à cette configuration intellectuelle.

Chronique lue sur radio Notre-Dame le 6 juin 2013.