Le ton de la supplique était à la mesure de la gravité de la situation : évoquant des heures de « douleur incommensurable et d’épreuve terrible » pour le peuple ukrainien, les évêques latins du pays avaient demandé au pape, le 3 mars, « d’accomplir publiquement » un acte de consécration de l’Ukraine et de la Russie au Cœur immaculé de Marie, « comme demandé par la Sainte Vierge à Fatima ». Le 25 février déjà, lendemain de l’invasion russe, l’épiscopat ukrainien avait demandé aux prêtres de réciter, après chaque messe, l’acte de consécration de l’Ukraine au Cœur immaculé.
« La Russie se convertira »
La demande à laquelle font référence les prélats ukrainiens est survenue le 13 juillet 1917, lors de la troisième apparition mariale à trois jeunes bergers, dans la ville portugaise de Fatima. « Lorsque vous verrez une nuit éclairée par une lumière inconnue, sachez que c’est le grand signe que Dieu vous donne, qu’il va punir le monde de ses crimes, par le moyen de la guerre, de la famine et de persécutions contre l’Église et le Saint-Père », prévient la Sainte Vierge, avant de mentionner spécifiquement la consécration de la Russie : « Afin de l’empêcher, je viendrai demander la consécration de la Russie à mon Cœur Immaculé et la Communion réparatrice des premiers samedis. Si l’on répond à mes demandes, la Russie se convertira et on aura la paix. Sinon, elle répandra ses erreurs à travers le monde, provoquant des guerres et des persécutions contre l’Église. Les bons seront martyrisés, le Saint-Père aura beaucoup à souffrir, plusieurs nations seront anéanties. » Avant de conclure : « À la fin, mon Cœur Immaculé triomphera. Le Saint-Père me consacrera la Russie qui se convertira, et un certain temps de paix sera accordé au monde. »
Vendredi 25 mars, durant la célébration pénitentielle de 17h00 dans la Basilique Saint-Pierre, je consacrerai au Cœur Immaculé de Marie la #Russie et l'#Ukraine. #PrisonsEnsemble #Paix
— Pape François (@Pontifex_fr) March 15, 2022
Une consécration explicite ?
Malgré une consécration du « monde » par Pie XII en 1942, puis « des peuples de la Russie » en 1952, ainsi qu’un renouvellement de la consécration du monde par Jean-Paul II entre 1981 et 1984 – sans mentionner la Russie, sur recommandation des diplomates du Vatican qui ne veulent pas froisser la Russie soviétique – le débat continue pour savoir si ces consécrations correspondent bien à la demande émise par la Vierge à Fatima, ou s’il faut encore une consécration publique, explicite, de la Russie, en collégialité avec tous les évêques. Cela pourrait être le cas le 25 mars prochain, jour de l’Annonciation, alors que Rome a annoncé que le pape François consacrera l’Ukraine et la Russie au Cœur immaculé de Marie. Le même acte sera célébré à Fatima par le cardinal Krajewski le même jour.
D’ici là, les catholiques du monde entier pourront se replonger dans les paroles de la consécration de 1984. Alors que le monde était toujours plongé dans la guerre froide, Jean-Paul II avait prononcé une litanie mariale, dont les mots n’ont rien perdu de leur actualité : « Ô, Cœur immaculé ! Aidez-nous à vaincre la menace du mal qui est si facilement enracinée dans le cœur des mêmes hommes aujourd’hui […] ! De la faim et de la guerre, délivre-nous ! De la guerre nucléaire, d’une autodestruction incalculable, de toutes les sortes de guerre, délivre-nous ! »