Décidément, il s’en passe de belles dans notre République! J’avais à peine achevé la lecture des extraits substantiels que l’hebdomadaire Marianne a publié Samedi, du dernier ouvrage de Pierre Péan, que le lendemain à la première heure, la livraison du Journal du Dimanche complétait le tableau de la corruption et des étranges réseaux entretenus dans les coulisses du pouvoir. Bien sûr, la prudence exigerait de mettre partout du conditionnel, et la présomption d’innocence la plus large possibilité aux présumés accusés de se défendre. Mais je connais assez Pierre Péan pour savoir le sérieux de ses enquêtes depuis toujours. Et j’ajouterai: l’efficacité de ses coups. Le journal Le Monde en sait quelque chose. La publication en 2003 de « la face cachée du Monde », signée par Pierre Péan et Philippe Cohen, avait provoqué un séisme dont le quotidien ne s’est peut-être pas encore remis.
Aussi bien le nouveau livre de Pierre Péan « La République des mallettes » (paru chez Fayard) que le témoignage de l’avocat Robert Bourgi dans le Journal du Dimanche nous livre des récits hallucinants sur les méthodes de financement de la politique et des étranges personnages qui jouent des rôles d’intermédiaires aux confins du grand banditisme, des affaires et des tractations au cœur des palais nationaux. Bien sûr, tout le monde se récrie. Jacques Chirac et Dominique de Villepin, fusillés à bout portant, veulent porter plainte. Les candidats socialistes à la présidentielle en appellent à la justice.
Mais que tout cela éclate brusquement laisse penser à beaucoup qu’il y a une manœuvre là-dessous. La violence des rapports entre factions aboutit à une explosion qui risque de faire trembler le régime sur ses bases. Est-ce enfin la vérité de la politique qui s’impose à l’encontre de tous les discours sur la vertu républicaine ? Et parmi les responsables, où sont les corrompus, où sont les naïfs ?
Chronique à Radio Notre-Dame le 13 septembre.