Que retenir de cette rentrée littéraire 2010 ? Un grand libraire ami me répond: « en priorité, le Michel Houellebecq. Il est en progrès, notamment parce qu’il s’ouvre de plus en plus à la compassion. » J’ai retenu la formule que j’ai trouvée belle et me suis plongé dans le roman intitulé « La carte et le territoire » (Flammarion).
C’est vrai que l’impitoyable observateur des mœurs contemporaines est fidèle à son projet – balzacien, à sa manière – de rendre compte de la société où nous sommes plongés. Y a t-il plus de compassion que dans les précédents romans? C’est bien possible, malgré cette terrible ironie qui tourne souvent en dérision notre pauvre humanité. Au passage, j’ai accroché sur une page où Houellebecq croque en quelques traits la figure d’un prêtre contemporain. Pour être franc, je vous dirai que j’ai un peu grincé, parce que si compassion il y a, elle s’adresse quand même à un être assez étrange, presque lunaire.
Je cite: « Humbles et désargentés, méprisés de tous, soumis à tous les tracas de la vie urbaine sans avoir accès à aucun de ses plaisirs, les jeunes prêtres urbains constituaient, pour qui ne partageaient pas leur croyance, un sujet déroutant et inaccessible. »
Cher Michel Houellebecq, il faudrait peut-être recycler vos connaissances et vos relations, aller voir un peu du côté des Bernardins comment sont formés les jeunes prêtres d’aujourd’hui, et surtout au-delà d’une vague interrogation sur les croyances, s’intéresser à ce qui est au cœur d’une vie sacerdotale, à ce secret où le cœur vibre devant le buisson ardent. Ce qui change tout et fait surgir un autre monde. Oui, un tout autre monde que celui, épouvantablement désenchanté, de Michel Houellebecq !
Chronique lue le 22 septembre 2010 sur Radio Notre-Dame