Est-ce une bonne nouvelle à recevoir, en ce jeudi de l’Ascension ? Sciences Po Paris va proposer une formation sur la religion, destinée aux cadres et futurs cadres des différents cultes. Il faut sans doute attendre un peu pour en savoir plus, car les informations qui nous parviennent sont encore d’ordre très général, et il est difficile de se bien repérer. Il ne semble pas qu’il s’agisse vraiment d’enseignement à proprement parler doctrinal puisque les personnes concernées seront déjà instruites dans le cadre de leur propre confession. Ce sont des ministres de chaque religion qui participeront à ce module : rabbins, prêtres, pasteurs, imams, moines, etc. Peut-être certains n’auront-ils pas encore achevé leur formation spécifique, mais le problème n’est pas de la conduire à terme. Il est, si l’on comprend bien, de permettre une meilleure cohabitation. Le but, c’est une meilleure maîtrise de l’environnement politique et institutionnel français, européen aussi, qui conditionne les pratiques religieuses, avec une particulière insistance sur la laïcité.
On jugera à la pratique du bien-fondé de ce module de formation. On nous assure qu’il dispose de l’aval des grandes structures religieuses, et notamment de la Conférence des évêques de France. Par ailleurs, comment ne pas se féliciter de l’attention portée au phénomène religieux dans un cadre universitaire ? Cependant, il est permis de s’interroger sans nécessairement se montrer hostile au projet sur son statut épistémologique, pour parler cuistre. L’Église catholique a déjà une certaine pratique de dialogue interreligieux, et elle en connaît les embûches. Même si on se refuse à parler directement doctrine, en se contentant du registre culturel, qui fournit un langage commun, on ne peut éviter la question de l’hétérogénéité des génies religieux. Sans doute, s’agit-il d’interroger le sens de l’existence dans un certain rapport à une transcendance, à un sacré. Mais le christianisme et l’islam ne répondent pas exactement aux mêmes questions, en dépit de points de contact historiques. C’est encore plus vrai du christianisme et des religions orientales, qui ont des désaccords fondamentaux, y compris sur la définition de l’homme et sur ses finalités. Ce n’est pas une raison pour s’ignorer et se combattre, sans aucun doute. Mais c’est une raison pour fournir les clés de discernement indispensables.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 5 mai 2016.
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