« La Nuit debout » pour rêver tout haut à une autre République - France Catholique
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« La Nuit debout » pour rêver tout haut à une autre République

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Plusieurs milliers d’utopistes déçus du « système » actuel se sont rassemblés Place de la République à Paris et peu à peu dans une vingtaine de villes de province, non pas ces derniers jours mais ces dernières nuits, pour rêver ensemble à un autre monde, depuis le 31 mars. Parmi les plus hardis, certains ont décidé dimanche dernier qu’on serait, pourquoi pas, le 34 mars, grand bond en avant dans un avenir idéal… La plupart des participants proviennent des rangs des manifestants contre la Loi El Khomri dite Loi Travail, avec la présence plus ou moins mobilisatrice d’un « collectif » appelé « OnVautMieuxQueCa »…

Dans un texte adopté lors d’une « assemblée générale », il est dit, un peu comme une invitation, que « chacun se réapproprie la parole et l’espace public ». Sur un ton un peu solennel, on proclame et on annonce que « des personnes de tous horizons reprennent possession sur l’avenir de notre monde ». On déclare, à juste titre, que « la politique n’est pas une affaire de professionnels, c’est l’affaire de tous », et on considère avec une nette réprobation que « les intérêts particuliers ont pris le pas sur l’intérêt général », alors que « l’humain devrait être au cœur des préoccupations de nos dirigeants »… On semble très sceptique quant à la représentativité des actuels partis politiques… On cherche des solutions alternatives à de nombreux problèmes.
Place de la République, une « Université populaire » improvisée dispense déjà des cours de sociologie quelque part entre 20h et Minuit… Une commission Démocratie cherche doctement et longuement comment s’organiser sans hiérarchies : il est vrai que la question est ardue. L’économiste Frédéric Lordon propose de « rédiger une nouvelle constitution ». Certains parlent de créer une VIème République. Mais la présence de Jean-Luc Mélenchon ne semble guère souhaitée. Un service d’ordre plus ou moins improvisé et baptisé « Commission Sérénité » parvient à refouler sans bagarre un groupe de militants d’extrême-droite affiliés à l’écrivain-agitateur Alain Soral. Un autre Alain, le trotzkyste Alain Besancenot celui-là, vient se promener dans les parages, mais la plupart des gens l’ignorent, ou ne le connaissent pas. Sic transit gloria mundi… Le trotzkysme n’est pas un long fleuve tranquille.

Ce mouvement en herbe à l’avenir encore incertain tient à la fois d’une redite globalement non-violente de mai 68, du socialisme barbu et hugolien de… 1848 à la sauce romantique du XIXème siècle, d’une résurgence française du courant européen des « Indignés » qui ont battu le pavé récemment dans l’Espagne voisine en donnant naissance au parti d’extrême-gauche « Podemos », du Mouvement des Veilleurs et des Sentinelles issus de la Manifpourtous de 2013 version Frigide Barjot en ce qui concerne l’humour, la créativité et l’aspect insaisissable qui déconcerte la Préfecture de Police au moins momentanément… On pourrait y trouver de quoi faire un nouvel inventaire de Jacques Prévert revisité par des anarchistes ayant relu le Manifeste surréaliste d’André Breton… On ne sait pas encore ce qu’en pense Bernard Cazeneuve, notre ministre de l’Intérieur. Il faut avouer qu’il y a de quoi être perplexe…, comme le sont déjà les gros bonnets du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis et Julien Dray, qui ne savent pas par quel bout prendre ce mouvement improbable et inattendu. Qui vivra verra…

Denis LENSEL