L’équipe de The Catholic Thing profite de l’article du jour de l’an pour présenter à ses lecteurs ses meilleurs vœux pour l’année nouvelle.
Le monde séculier s’est rapidement débarrassé des scènes de nativité qu’il s’était hâté d’installer après Thanksgiving. Je t’en prie, Seigneur, nos églises et nos maisons les ont toujours, bien visibles. La crèche est plus qu’une décoration. C’est une aide pour notre prière. Comme toutes les fêtes où nous célébrons Notre Seigneur, Noël nous place ici et là-bas, à Bethléem, pour assister à la naissance de Notre Seigneur. La crèche place la scène devant nos yeux et nous invite à apprendre et imiter les vertus des protagonistes de ce premier Noël.
La vertu la plus voyante dans la crèche est l’humilité. Toute la scène est une étude d’oubli de soi. Chaque personnage ne pense pas à lui-même mais à l’Enfant dans la mangeoire. En retour, le Christ enfant nous regarde, conduisant nos regards vers Lui en union avec les autres. Par simple adoration, les personnages autour du berceau révèlent différents éléments de l’humilité. Ensemble, ils forment une mosaïque de cette vertu.
Un premier groupe de personnages est composé de ceux qui sont en-dessous de l’homme et de ceux qui sont au-dessus de lui : les animaux et les anges. Les animaux – le bœuf et l’âne – révèlent la forme d’humilité la plus fondamentale, celle de la créature. L’inspiration qui a poussé Saint François d’Assise à les inclure dans la scène vient du premier chapitre d’Isaïe :
Un bœuf connaît son propriétaire,
et un âne, la mangeoire de son maître ;
Mais Israël ne sait pas,
mon peuple n’a pas compris (Isaïe 1:3).
Le prophète compare les animaux et l’homme. Même les bêtes ont l’humilité de reconnaître leur maître. Pourquoi l’homme ne peut-il reconnaître le Seigneur ?
Les animaux dans la grotte nous rappellent notre statut de créature. Le péché de départ a été le rejet de cette nature de créature, le refus d’accepter ce que Dieu avait fait de nous. Nous voulions autre chose que ce qu’Il nous avait donné, pour être autre que tel qu’Il nous avait créés. Nous avons repoussé notre condition de créatures. Nous voulions être comme des dieux.
Et c’est toujours le cas. Nous voyons ce vice largement inscrit dans l’idéologie transgenre, le rejet des limites créées entre mâle et femelle. Mais tout péché est une exaltation de la créature au dépend de son Créateur et donc un rejet des limites de notre nature. Le bœuf et l’âne ont l’humilité de connaître leur statut dans la Création, qu’ils sont des créatures – et non le Créateur. En cela au moins, ils sont plus avisés que nous.
Les anges révèlent quelque chose de différent : l’humilité en étant surpassés. Si l’humilité des animaux nous nous rappelle notre condition de créatures, celle des anges nous rappelle notre promotion lors de l’Incarnation. Dieu est devenu homme, Il n’est pas devenu un ange. Dans l’ordre de la nature, les anges sont supérieurs à nous ; plus intelligents, plus puissants. Mais dans l’ordre de la grâce, l’homme a été élevé au-dessus d’eux.En devenant homme, Dieu donne à la nature humaine une dignité surpassant même celle des anges. Les anges adorent maintenant l’homme Jésus-Christ.
Dieu qui se dépouille de Lui-même entraîne les anges à exercer une humilité similaire. Il leur est demandé de se réjouir d’être surpassés par nous qui sommes tellement en-dessous d’eux. Les anges déchus éprouvent du ressentiment contre l’humilité de Dieu précisément parce qu’elle requiert également leur humilité. Les bons anges, tels ceux qui apparaissent aux bergers, se réjouissent de l’humilité de Dieu. En effet, ils partagent Son humilité en se réjouissant de notre promotion au-dessus d’eux.
Un autre groupe de Bethléem est composé des bergers et des mages. Ces deux groupes – les pauvres et simples bergers sans éducation et les mages savants, riches et bien éduqués – ne voudraient pas être associés ensemble si ce n’était pas pour le Christ enfant. Tous approchent humblement le berceau, mais par des chemins différents.
Les bergers nous montrent l’humilité des démunis. Nous associons habituellement l’orgueil avec la vanité et la vantardise concernant ses possessions. Mais l’orgueil, c’est simplement se centrer excessivement sur soi. Cela peut également prendre la forme d’une préoccupation excessive de ce qui nous manque. Alors l’orgueil peut produire le désespoir en raison d’un sentiment d’infériorité. Rongé par l’orgueil, un homme se focalise sur son manque et est incapable de voir la générosité du Seigneur.
Les bergers sont en paix avec leur pauvreté. Ils nous montrent l’humilité des pauvres en esprit, de ceux qui n’ont rien à apporter. Ces hommes vivant en marge de la société, dans les champs avec les moutons, n’ont ni richesse, ni talent, ni savoir à offrir. Mais leur dénuement ne les trouble pas. Ils procurent un réconfort en n’ayant rien d’autre à offrir au Seigneur que leur attention, leur affection et leur adoration. Ils sont en paix en venant devant Lui les mains vides.
Bien sûr, nous venons tous à Lui les mains vides. Nous n’avons rien qui nous appartienne vraiment à Lui offrir, pas de réussites que nous puissions revendiquer comme nôtres. « Que possédez-vous que vous n’ayez reçu ? »(1 Corinthiens 7:4). Plutôt que nous centrer sur nous-mêmes et désespérer de notre néant, nous apprenons des bergers cette humble joie de n’avoir rien que nous-mêmes à apporter au Seigneur.
De l’autre côté, les mages nous montrent l’humilité des talentueux. Si les bergers nous montrent l’humilité qui nous garde du désespoir, les mages exposent l’humilité qui nous préserve de la vantardise.
Les mages sont les savants et par conséquent les riches et puissants. Leur savoir les a menés au pied du berceau, et, dans ce sens, il est bon. Mais pour réaliser son but, il doit s’effacer devant le Seigneur, et dans ce sens, être sacrifié. Alors les mages doivent se rendre humbles eux-mêmes – laisser de côté leur richesse, leur pouvoir et leurs privilèges – pour adorer l’enfant. Ils anticipent la leçon que les Pharisiens doivent apprendre – que le Seigneur d’Israël n’est pas tant atteint que reçu. Mêmes nos plus grands talents et nos plus grands efforts ne sont que Ses dons en vue de nous disposer à Le recevoir. Pour rester à leur juste place et ne pas devenir une cause de vanité, nos talents, dons et réalisations doivent s’effacer devant la divine autorité du Christ enfant.
Le dernier humble duo, c’est bien sûr Marie et Joseph. Joseph, tout d’abord, fait montre d’une humble autorité. Il est la tête de la Sainte Famille, mais le plus petit de la Sainte Famille. Ainsi, il exerce son autorité légitime avec à la fois fidélité et humilité, toujours avec la conscience de son devoir et de son indignité. Il préfigure la conduite de serviteur du Christ, qui est venu non pour être servi mais pour servir. Par humilité, il accepte l’autorité qui lui est dévolue tout en se gardant de l’exercer de manière autoritaire.
Marie nous montre l’humilité qui fait autorité. Non pas dans le sens d’avoir un titre ou une position ou quoi que ce soit de ce genre. Elle comptait pour très peu dans l’estime du monde. Elle fait autorité plutôt dans le sens où son humilité établissait les normes d’humilité pour tous les chrétiens. Elle fait autorité parce que, par son humilité, Marie s’est parfaitement conformée à l’esprit de son Créateur.
Le Seigneur Lui-même expose cette humilité lors de Sa naissance et plus tard par ses paroles. Avant cela, Marie manifeste cette vertu fondamentale. Il n’y a en elle ni concentration sur soi ni pensée autoréférentielle pouvant entrer en compétition avec Lui. Son humilité permet à la grâce de Dieu d’œuvrer parfaitement en elle, de la combler de grâce, de faire d’elle le modèle – faisant autorité – du chrétien.
Bien sûr, toutes ces formes d’humilité – des animaux et des anges, des bergers et des mages, de Marie et de Joseph – ne sont que des reflets de l’humilité de Notre Seigneur. Il s’est humilié Lui-même pour partager notre nature humaine de créature, la hissant ainsi au-dessus des anges. Il est le Bon Berger, né dans la pauvreté, venant à nous les mains vides. Ayant toute autorité, Il nous appelle non par la menace de la force mais par son propre dépouillement, par le simple regard d’un enfant.
Le père Paul Scalia est un prêtre du diocèse d’Arlington (Virginie), où il est vicaire épiscopal pour le clergé.
Illustration : « L’adoration des mages » par le Giotto, vers 1320 [le Met, New-York]
Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/01/01/bethlehems-mosaic-of-humility/