La gestation pour autrui - France Catholique
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La gestation pour autrui

Le Conseil d'État vient de rendre un rapport très attendu sur la bioéthique où il prend position pour une recherche encadrée sur l'embryon, contre l'accès de la procréation assistée aux personnes homosexuelles ou contre la gestation pour autrui. C'est sur ce dernier point que nous entamons, en partenariat avec l'Alliance pour les Droits de la Vie, une série de pages sur les grands enjeux de la révision des lois sur la bioéthique, alors que les états généraux s'organisent.
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La question de la gestation Pour autrui – mère porteuse – a été posée à cause de certaines stérilités féminines complètes, soit liées à une rare anomalie congénitale soit aux séquelles d’un accident d’accouchement. D’où l’idée d’utiliser la fécondation artificielle avec le sperme du conjoint en vue d’implantation chez une autre femme à laquelle on versera une indemnité de service. Interdite en France, la technique s’est développée outre-Atlantique et en Asie, d’où le « tourisme procréatif » qui a fini par importer en France le débat en même temps que des enfants conçus à l’étranger.

Point d’actualité :
où en est la loi à ce sujet ?

Art. 16-7. de la loi bioéthique de 1994 – « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui est nulle. »
À ce jour, la gestation pour autrui est interdite et passible de sanctions pénales : la loi punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 € d’amende.
Un imbroglio juridique a été importé en France par les adultes ayant ramené de l’étranger des enfants qui posent la question de leur statut (état civil, filiation).
Point scientifique :
les techniques utilisées

Il existe trois schémas différents pour la pratique de la GPA :

o Insémination artificielle de la mère porteuse avec le sperme du conjoint de la future mère adoptive.

o Fécondation in vitro avec les ovocytes de la femme demandeuse puis implantation de l’embryon chez la mère porteuse qui fournira l’enfant au couple demandeur à l’issue de la grossesse.

o Fécondation in vitro avec les ovocytes d’une donneuse d’ovocyte, puis implantation de l’embryon chez la mère por­teuse qui fournira l’enfant au couple demandeur à l’issue de la grossesse.

Point international :
la situation à l’étranger

La pratique des mères porteuses serait légale ou possible dans une vingtaine de pays, soit parce qu’elle est explicitement légalisée comme en Russie ou dans certains États des États-Unis, soit parce qu’elle est assimilée à l’adoption, par exemple en Belgique. À noter qu’en Grande-Bretagne, c’est essentiellement par des proches que les personnes utilisent cette pratique, à l’exemple de trois sœurs qui se sont partagé les trois fonctions maternelles.
En Allemagne, en Suisse, en Autriche, en Espagne et en Italie, le recours aux mères porteuses est prohibé.
(Source : Étude de législation comparée n° 182 – janvier 2008 – La gestation pour autrui)


Point sociétal :
les forces en présence

Les pour

Les fers de lance des lobbies pro-GPA sont l’association Maia et l’association Clara, cette dernière étant la plate-forme des revendications de Sylvie et Dominique Mennesson. Ce couple a été médiatisé au fil des rebondissements de ses tentatives de se voir reconnaître par l’état civil le statut de parents des enfants obtenus par GPA à l’étranger. Les promoteurs de la GPA sont soutenus par des experts comme la psychanalyste Geneviève Delaisi de Parseval, le professeur Israël Nisand, la philosophe Elisabeth Badinter, qui compare la location d’un utérus au travail des nourrices d’antan. Nadine Morano, secrétaire d’État à la Famille, plaide également pour la légalisation des mères porteuses qu’elle appelle « femmes porteuses » et s’est illustrée en se disant prête à porter l’enfant de sa fille ou de sa nièce.
En janvier 2009, un sondage réalisé par Ipsos pour le magazine Top Santé et la chaîne de télévision France 5 a révélé qu’une majorité de Français (61%), émus par les situations présentées par les médias, se disent favorables à la légalisation des mères porteuses, contre 33% qui s’y montrent opposés. Un groupe de travail du Sénat, créé à la suite des revendications du couple Mennesson, a plaidé en juin 2008 pour une légalisation du recours à une mère porteuse, dans certains cas, encadrés par la médecine. Cette posture n’est pas représentative de l’avis de la haute assemblée.

Les contre

La majorité des parlementaires s’oppose en effet à la GPA, de même que Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, qui s’est déclarée « défavorable » à cette pratique. Le Forum des Républicains Sociaux (le parti de Christine Boutin) a lancé une pétition contre la GPA. Au Parlement, l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opesct) a émis de fortes réserves sur une éventuelle autorisation de la GPA. Dans un rapport de décembre 2008, les députés Alain Claeys (PS, Vienne) et Jean-Sébastien Vialatte (UMP, Var) « considèrent que les propositions visant à lever la prohibition de la gestation pour autrui en l’encadrant strictement ne lèvent pas les objections de fond qui entachent cette technique extrêmement biologisante. (…) Il est des couples que l’on souhaite aider mais la loi doit poser des limites. ». Le 10 mars 2009, l’Académie de Médecine s’est prononcée contre (à 43 votes sur 82) la légalisation des mères porteuses. Le 6 mai 2009, le Conseil d’État s’est également prononcé contre. Enfin, du côté des experts, la sociologue Sylviane Agacinski, le professeur René Frydman et le philosophe Dominique Folscheid s’y opposent, ce dernier l’assimilant à une forme de prostitution.

Ce que dit l’Église

« Légaliser cette pratique créerait plus de problèmes et de risques que cela n’en résoudrait. La gestation pour autrui ne répare pas un préjudice subi par l’enfant, mais l’organise pour remédier à la souffrance d’un couple sans enfant. Elle ne tient pas compte des liens créés lors de la période intra-utérine entre la femme enceinte et l’enfant, et conduit à l’abandon de celui-ci, avec les séquelles et difficultés identitaires qui en seront la conséquence.
Une telle pratique fait courir à la mère porteuse, en plus des risques médicaux inhérents à toute grossesse, des risques psychologiques non négligeables. Et de toute façon, la légalisation de la GPA ne pourrait régler tous les cas d’enfants nés de mères porteuses.
Cette légalisation bouleverserait les fondements mêmes du droit de la filiation, avec pour conséquence immédiate une insécurité juridique pour l’enfant abandonné, et pour conséquences plus lointaines un changement radical ou une incohérence de ce droit.
La légalisation de la GPA remettrait en question le principe juridique fondamental d’indisponibilité du corps humain. La notion de simple « dédommagement » risque fort soit de se révéler insuffisante, soit d’attirer des femmes spécialement vulnérables, ce qui conduirait à l’exploitation de cette vulnérabilité et à l’instrumentalisation du corps humain. »
(Extraits de Bioéthique. Propos pour un dialogue, de Mgr Pierre d’Ornellas et des évêques du groupe de travail de la Conférence des évêques de France).


L’avis de l’Alliance
pour les Droits de la Vie

Il faut reconnaître la souffrance des femmes désirant enfanter alors qu’elles sont privées d’utérus. Mais cette reconnaissance ne saurait légitimer qu’on porte atteinte aux droits de la personne humaine. Or la GPA :

o est contraire aux droits de l’enfant auquel on impose deux voire trois mères : génitrice (mère biologique), gestatrice (mère porteuse), éducatrice (mère adoptive). Cet éclatement de la maternité décidé avant même la conception est en totale contradiction avec les progrès des connaissances qui révèlent l’importance des interactions entre l’enfant non encore né et celle qui le porte. La GPA traite l’enfant comme objet d’un contrat.

o est contraire aux droits de la femme dont le corps est instrumentalisé comme s’il était une machine en complète contradiction avec les progrès du féminisme, le principe de dignité humaine et celui de non marchandisation du corps.
Cette double instrumentalisation se traduit par des contrats aux clauses choquantes voire absurdes : que faire si le bébé produit n’est pas conforme aux attentes ? Peut-on décider d’un avortement et qui décide ? La mère porteuse a-t-elle le droit de conserver l’enfant si elle découvre qu’elle s’y est attachée ? La mère demandeuse a-t-elle le droit de le refuser ?

Par ailleurs on peut relever trois arguments complémentaires :

o La GPA dévalorise la grossesse ravalée au simple rang de « service » (alors que d’autres techniques artificielles en font l’élément majeur de la maternité).

o La GPA favorise l’exploitation des corps des femmes pauvres, qui se sacrifient au « profit » de couples riches, comme on le constate déjà là où la GPA est légale.

o La GPA est un pas de plus vers d’autres dérives (procréation homosexuelle revendiquée par certains hommes) et conduit logiquement à l’utérus artificiel, (cf. le livre éponyme d’Henri Atlan). n