Le projet de la nouvelle Constitution apostolique sur la Curie romaine, Praedicate Evangelium (PE), contient des imprécisions doctrinales qui ont de graves implications pour la compréhension correcte de la relation entre le pape et le Collège des Evêques. Le deuxième chapitre, « Critères et principes pour la Curie romaine », invoque la Constitution dogmatique de Vatican II sur l’Église, Lumen Gentium, mais ignore l’enseignement clair de la Note préliminaire d’explication qui a été publiée en annexe à l’instruction spécifique du Pape Paul VI.
Le Secrétaire général du Conseil, Pericle Felici, a informé les Pères du Conseil que Paul VI avait ordonné que » la doctrine énoncée au chapitre III doit être expliquée et comprise conformément au sens et à l’intention de la présente note explicative « . Le chapitre III s’intitule « Sur la structure hiérarchique de l’Église et en particulier sur l’épiscopat ».
Ce qui est en question est la bonne compréhension de la relation entre le pape et les évêques en tant que « collège ». Le Collège des Évêques existe-t-il en dehors et indépendamment du pontife romain ? Le Collège peut-il agir en tant que corps distinct du pape et en opposition avec lui ?
PE indique : La Curie est au service du Pape et du collège des évêques, qui » avec le successeur de Pierre gouvernent la maison du Dieu vivant » (LG 18). La Curie exerce ce service auprès des évêques dans leurs Églises respectives, dans le respect de la collégialité, de la sinodalité et de la subsidiarité, qui sont dues aux successeurs des apôtres. Sur la base de l’ecclésiologie de Vatican II, le Collège des Évêques peut confier cette tâche à la Curie, temporairement ou définitivement ». (non souligné dans l’original)
PE précise : « Ce service de la Curie à la mission des évêques et à la communio n’est pas basé sur une attitude de supervision ou de contrôle, ni sur la décision d’être une autorité supérieure.
Il continue : « Chaque dicastère accomplit sa propre mission en vertu du pouvoir qu’il a reçu du Souverain Pontife et du Collège des Évêques qui, selon l’ecclésiologie du Concile Vatican II, guide l’Église avec le successeur de Pierre (cf. LG 22,2) ». (non souligné dans l’original)
Praedicate Evangelium fait une distinction erronée entre le pape et les évêques considérés comme un collège. La Note préliminaire d’explication à Lumen Gentium indique : Le Collège, qui n’existe pas sans la tête, est dit » exister aussi comme sujet de pouvoir suprême et entier dans l’Église universelle « . Il faut l’admettre par nécessité pour ne pas remettre en cause la plénitude du pouvoir du Souverain Pontife romain. Car le Collège, toujours et par nécessité, inclut sa tête, parce que dans le collège, il conserve sans entrave sa fonction de Vicaire du Christ et de Pasteur de l’Église universelle. En d’autres termes, il ne s’agit pas d’une distinction entre le Souverain Pontife romain et les évêques pris collectivement, mais d’une distinction entre le Souverain Pontife pris séparément et le Souverain Pontife avec les évêques. (emphases ajoutées)
La note préliminaire poursuit : « En tant que Pasteur suprême de l’Église, le Souverain Pontife peut toujours exercer son pouvoir à volonté, comme l’exige sa fonction même. Bien qu’il existe toujours, le Collège n’est pas par conséquent engagé en permanence dans une activité strictement collégiale ; la Tradition de l’Église l’indique clairement. En d’autres termes, le Collège n’est pas toujours « pleinement actif [in actu pleno] » ; il n’agit comme un collège au sens strict que de temps à autre et seulement avec le consentement de son chef. »
Le Collège des Évêques, par conséquent, ne « confie » aucune « tâche à la Curie romaine, ni temporairement ni définitivement », à moins que le pape ne l’y invite en tant que collège. Chaque acte d’un tel mandat doit inclure l’approbation de celui-ci par le pape ; il est le chef du Collège des Évêques, et le collège ne peut agir comme un organe contre la décision de son chef.
Le Collège des Évêques ne peut agir que cum Petro et sub Petro, avec Pierre et sous Pierre. La note préliminaire dit : L’expression » avec le consentement de sa tête » est utilisée pour éviter l’idée d’une dépendance à l’égard d’un tiers; le terme » consentement » suggère plutôt une communion entre la tête et les membres, et implique la nécessité d’un acte qui relève de la compétence du chef.
La Curie romaine est, en fait, un instrument du pape, et non des évêques du monde. Le Canon 360 déclare : « Le Souverain Pontife dirige habituellement les affaires de l’Église universelle par l’intermédiaire de la Curie romaine, qui agit en son nom et avec son autorité pour le bien et pour le service des Églises. » Le pape, agissant ordinairement par l’intermédiaire de sa Curie, est « l’autorité supérieure » dans l’Église qui prend les décisions qui impliquent « la supervision et le contrôle » des membres du collège des évêques. C’est le sens de la suprématie papale dans l’Église.
La Curie romaine n’est pas appelée « Curie du Pape et du Collège des Évêques » pour une bonne raison : chaque évêque diocésain a sa propre Curie. La Curie romaine dépend du pape seul et l’assiste dans l’accomplissement de sa mission divine.
Le Souverain Pontife est le Pasteur Suprême et le Chef Visible de l’Eglise sur terre. Pastor Bonus, la Constitution Apostolique qui régit actuellement les états de la Curie Romaine précise : « La Curie romaine est l’ensemble des dicastères et instituts qui aident le Pontife romain dans l’exercice de sa fonction pastorale suprême pour le bien et le service de toute l’Église et des Églises particulières.
Il faut éviter la confusion et le désordre qui seraient introduits dans l’Église en laissant entendre que le Collège des évêques peut agir séparément du pape et qu’il a un rôle à jouer dans la délégation d’autorité à la Curie romaine. Il s’agit d’une contradiction évidente avec la doctrine catholique perpétuelle telle qu’enseignée récemment par le Concile Vatican II.
23 juillet 2019
Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/07/23/the-latest-confusion-in-rome/
Photo : Le Pape s’adresse à la Curie, le 21 décembre 2018.