Être Catholique comporte de nombreuses merveilles. Parmi celles-ci, il y a le fait que le Catholique apprend à communiquer en tant que personne. Quand cela se produit, et c’est le cas chez les saints, alors il se manifeste quelque chose dans ce monde qui reflète l’existence du Dieu trinitaire. Tous les êtres humains naissent en tant que « personne ». Mais ceci ne signifie pas que l’on utilise très efficacement ce caractère de personne humaine créée, sans parler de développer les vastes possibilités spirituelles qui résident dans la grâce. Le péché et la concupiscence rendent cela difficile. Ils produisent trop de solipsisme et de malveillance.
Cependant, avec la rédemption et la grâce, les individus « cessent d’exister pour eux-mêmes et acquièrent une personnalité en étant en Christ, » selon Hans Urs von Balthasar, qui poursuit : « Le Christ n’absorbe pas les sujets conscients eux-mêmes ; il les dote « d’en haut » (Ephesians 4,10) d’une personnalité et d’une mission qui leur apporte l’épanouissement dans leur vie. » Cette grâce élève l’être humain de multiples façons, « car vous êtes tous un en Jésus-Christ. . » (Galates 3,28). Comme l’explique von Balthasar : « théologiquement parlant, il est impossible de devenir une personne si nous ne devenons pas frère du ‘Premier-né' »(Romains 8,29), à la suite de ceux qui sont de même choisis pour l’être.
Donc, qu’en est-il de la manière dont communiquent les Chrétiens lorsqu’ils croient en vérité ? Il s’agit ici des Chrétiens qui veulent que l’Esprit du Christ les convertisse entièrement, non de Chrétiens pour lesquels le Christ constitue une préoccupation parmi d’autres, comme leur entreprise, leur voiture, et leur partie de golf. Pour eux, les habitudes de communication apprises à la maison ne sont pas suffisantes, toutes ces préférences que l’on apprend, ce groupe ethnique plutôt que tel autre, cette classe sociale plutôt que telle autre, ce clan-ci et pas celui-là.
Les styles de communication habituels comportent toutes sortes de défauts intrinsèques parce qu’ils ont été mis en place par des pécheurs. Il y a des manières d’entrer en relation, de s’imposer aux autres qui n’ont rien à voir avec le fait d’être chrétien. Faire comme si les gens n’existaient pas, user de représailles, tout cela n’a rien à voir avec l’amour chrétien. Saint Paul le disait bien : » Si vous mordez et vous déchirez les uns les autres, prenez garde, vous en arriverez à tous vous détruire. » .”(Galates 5,15)
L’amour, c’est désirer et travailler pour le bien de l’autre dans tout ce qu’on fait avec lui, dans toute pensée et toute prière, parce que, pour reprendre von Balthasar, « dans la mesure ou l’homme est esprit, il a la possibilité de disposer de lui-même. Il est en capacité de décider de ce qu’il va dire et de la manière dont il le dira… Il est la première entité qui peut dire librement la vérité, mais pour la même raison il est également le premier à pouvoir mentir. » Il peut fabriquer une justification à sa violence, à sa domination sur les autres. Il peut justifier sa mise à l’écart de telle personne, sa manipulation de telle autre, tout en se disant croyant. Cependant, devenir une personne, en se laissant inclure dans le mystère du salut et en agissant pour apprendre (cela ne tombe pas simplement du ciel) comment aimer l’autre, tous les autres, implique que l’on abandonne la sécurité de ses conduites passées.
De plus, il s’avère que, dans l’esprit humain, sortir de soi-même en amour et venir à soi-même en pleine conscience sont deux choses très proches. L’adage « Aime ton prochain comme toi-même » (Matthew 19,19) montre cette proximité. Nous apprenons beaucoup sur l’humain dans les écritures. C’est là que la personne authentique apprend véritablement en amour : « l’amour est inséparable de la vérité. Il est impossible de concevoir une vérité sans amour, pas plus qu’il n’est possible d’accéder à la connaissance sans amour. » (encore von Balthasar !)
Et il poursuit : « l’amour ne se trouve pas à l’extrémité opposée de la vérité. Au contraire, c’est l’élément de vérité qui lui garantit un mystère toujours nouveau derrière chaque découverte. C’est ce « supplément » par rapport à ce que nous savons déjà… C’est ce qui interdit à la connaissance de reposer en elle-même mais en fait la servante de quelque chose de supérieur. » Notre communication en tant que Catholiques concerne la vérité de la vie exprimée avec amour, telle que l’a fait le Christ par son Incarnation.
Evidemment cette communication bouscule les programmes qui nous sont chers. Elle élimine notre fascination pour ce qui est convenu. Elle met de côté nos préjugés. Mais alors « Qui veut sauver sa vie la perd, mais qui perd sa vie en mon nom la trouve. » (Matthieu 16,25) Perdre sa vie peut être vraiment désagréable, ou cela peut être, par votre intermédiaire, le signe du salut de Dieu pour ce pauvre ou ce voisin dans le besoin.
La véritable communication c’est essentiellement reconnaître les autres (tous les autres) comme personnes, ces centres spirituels infinis et irréductibles qui sont des créations uniques de Dieu. Au moins au départ, « le sujet laisse de côté, pour ainsi dire, toute sa subjectivité, pour qu’ensuite il puisse n’être que pure ouverture pour comprendre » l’autre.(von Balthasar) Finis les préjugés, finis les commérages et la communication au vitriol dans laquelle se laissent entraîner tant de Catholiques. On devient le Bon Samaritain en paroles et en actes.
Le Père Bevil Bramwell, appartient à la congrégation des Oblats de Marie Immaculée, et est Doyen du premier cycle à la Catholic Distance University. Il a publié Laity: Beautiful, Good and True (Les Laïcs : Beaux, Bons, Vrais) et and The World of the Sacraments (Le Monde des Sacrements).
Photo : Hans Urs von Balthasar, 1905-1988
Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/catholic-communication-is-personal.html