Notre éditorial de la semaine dernière sur la prise de position inadmissible du Mouvement rural de la jeunesse chrétienne (MRJC) à propos d’un prétendu droit à l’IVG, ne fermait pas la porte à ses dirigeants. Nous souhaitions qu’ils puissent parler ouvertement des graves problèmes posés par la civilisation des mœurs contemporaines, notamment en ce qui concerne l’ouverture à la vie, avec d’autres jeunes chrétiens particulièrement motivés par le sujet. Ce faisant, nous éludions, au moins provisoirement, la question de la cohérence de l’Église de France liée étroitement à la responsabilité des évêques par rapport aux mouvements qui revendiquent une appartenance ecclésiale. Or, il se trouve qu’au moment ou nous publions ce journal, une réunion se tient au siège de l’épiscopat à Paris entre les évêques du Conseil pour les mouvements et associations de fidèles et les responsables de ces mouvements. Nul doute que la crise ouverte par le MRJC y a été analysée et que les mises au point nécessaires ont été opérées. Cependant, il faudra sûrement du temps pour envisager l’existence habituelle d’une communauté catholique, qui plonge ses racines dans une histoire souvent conflictuelle et qui peine à assurer sa communion sur ce qui pourtant devrait la rassembler.
Notre collègue Bénédicte Lutaud, dans un excellent article publié dans La Vie, fait le point sur une mouvance Action catholique (à laquelle sont associés les Scouts et les Guides de France) qui se plaint de se trouver désormais marginalisée. L’aumônier du MRJC, le père Jean-Paul Havard, explique que les militants « peuvent avoir le sentiment que ce qu’ils ont à cœur de travailler sur cette Église “servante et pauvre” du concile Vatican II compte peu, qu’ils sont considérés comme un reliquat du passé, des restes de l’aile “gauchiste” de l’Église ». C’est vrai que depuis les années soixante-dix, la culture propre au catholicisme français a subi de profondes évolutions et qu’il s’est produit une mutation considérable dans les personnels, les références, les façons de prier. Cette mutation était évidente déjà en 1975, l’Année sainte décidée par le bienheureux Paul VI, et qui avait vu le premier rassemblement à Rome des nouvelles communautés. Les anciens mouvements se sont trouvés, par la force des choses, relégués dans l’ombre et estiment ne pas avoir leur juste place, surtout quand une lame de fond comme La Manif pour tous semble submerger l’espace. L’Église de France doit faire place à la plus large diversité, mais en assumant la cohérence de l’ensemble. Cela ne se fera pas sans un échange continuel entre fidèles de toutes les générations pour reconnaître les légitimes aspirations, les ancrages pluriels, mais aussi ce qui définit l’axe commun et le foyer où s’affirme la foi de l’Église.
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- SYRIE : ENTRE CONFLITS ARMES ET DIALOGUE INTERNE
- Jean-Paul Hyvernat
- La République laïque et la prévention de l’enrôlement des jeunes par l’État islamique - sommes-nous démunis ? Plaidoyer pour une laïcité distincte
- Dénoncer les abus sectaires dans la vie consacrée et passer l’épreuve en union au Christ Epoux