L'Obéissance - France Catholique
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Le trésor des psaumes
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L’Obéissance

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Dans sa récente homélie du Jeudi Saint, le Pape Benoît XVI a fait référence à l’appel à la désobéissance lancé par certains membres du clergé en Europe. Il est certain que l’obéissance n’a pas bonne presse pour de multiples raisons. La plupart sont d’ordre psychologique et ne seront donc pas vraiment l’objet de ce propos.

Une raison, d’ordre culturel celle-là, c’est que l’obéissance à un supérieur terrestre, un prêtre ou un évêque, est considérée comme avilissante. Mais cela n’a rien à voir. On n’a le droit d’obéir que si le supérieur (autre terme politiquement incorrect) nous demande quelque chose de bon sur le plan moral. Et donc, comment cela pourrait-il être avilissant ?

Faire le bien, c’est notre raison d’être, et pourtant nous ne savons pas toujours personnellement de quel bien particulier il s’agit. Il n’existe pas d’autre bien moral plus élevé que de suivre le Christ. Les pasteurs, les supérieurs religieux et les évêques ne sont là que pour aider les gens à suivre le Christ.

Il est intéressant de noter que les gens qui ont des problèmes avec l’obéissance à l’Église ne cessent d’obéir à leur patron, à la météo, ou au policier qui effectue sa ronde, sans remarquer l’incohérence. Suivre le Christ et son Église se situe au degré le plus élevé dans la hiérarchie des biens.

Une autre prétendue raison de désobéir, c’est qu’obéir à l’autorité de l’Église, c’est lui donner trop de pouvoir, ce qui est tout simplement inacceptable à une époque matérialiste. C’est vrai, faire le bien, c’est effectivement d’une puissance extraordinaire sur le plan culturel.
Voyez l’Église en Pologne au temps des Nazis et des Communistes. Voyez l’Église aux États-Unis où tant de paroisses et d’associations travaillent dans la discrétion à aider les sans-abri, les malades et les mourants, pour ne citer qu’un seul vaste domaine de service.

Le genre de pouvoir qui a été à l’origine de l’objection contre l’obéissance remonte au siècle des Lumières, époque où le pouvoir de l’église était allié de trop près à l’élite dirigeante dans différents pays. Mais il y a bien longtemps que cette alliance a été rompue, par exemple aux États-Unis. Et ce n’en est que mieux parce que cette rupture permet effectivement à l’Église d’être Église plutôt que simple loisir pour l’élite.

Maintenant, il faudrait que l’obéissance ait du succès parce nous grandissons seulement lorsque nous recevons quelque chose de l’extérieur de nous-mêmes. Cela peut être aussi simple que la nourriture ou aussi vital que l’impératif d’aimer et de suivre la vérité. Nous sommes rattachés à tant de réalités qui nous dépassent : bébés, nos sommes rattachés à nos parents ; étudiants, à nos universités ; ouvriers, à nos usines ; catholiques, à l’Église, et ainsi de suite.

La liste est sans fin. On ne peut se passer des multitudes de choses que nous recevons chaque jour. L’amour, la nourriture, les informations, l’exercice de nos droits politiques et économiques, tous ouvrent la vie à quelque chose qui nous dépasse. Et donc, même dans un sens purement naturel : « aucun de nous ne vit pour soi-même, et personne ne meurt pour soi-même. » (Romains 14,7)

Mais en fait Paul écrivait ce passage à propos de gens dont le comportement procédait d’un acte de foi. L’obéissance, le fait de nous donner, est une composante de la foi. Pour le dire autrement : « il n’y a pas d’autre possibilité pour posséder une certitude sur sa propre vie sinon de s’abandonner, dans un crescendo continu, entre les mains d’un amour qui s’expérimente toujours plus grand parce qu’il a son origine en Dieu. » *
Voyons un seul exemple d’abandon de soi : nous nous abandonnons à suivre les documents de Vatican II et nous pouvons dire avec Benoit XVI 1 :


 » Il est nécessaire qu’ils soient lus de manière appropriée, qu’ils soient connus et assimilés, comme des textes qualifiés et normatifs du Magistère, à l’intérieur de la Tradition de l’Église… Je sens plus que jamais le devoir d’indiquer le Concile comme la grande grâce dont l’Église a bénéficié au vingtième siècle : il nous offre une boussole fiable pour nous orienter sur le chemin du siècle qui commence »

Et il poursuit :

Moi aussi j’entends redire avec force tout ce que j’ai eu à dire à propos du Concile quelques mois après mon élection comme Successeur de Pierre : « Si nous le lisons et le recevons guidés par une juste herméneutique, il peut être et devenir toujours davantage une grande force pour le renouveau, toujours nécessaire, de l’Église » 2

Notre obéissance est donc à la fois lecture de documents et découverte de ce qu’ils veulent dire du point de vue de l’Église. Elle nous ouvre à la grâce et nous conduit à la conversion et au renouveau !

Pour terminer, une pensée de Henri de Lubac :  » Un apprentissage de ce genre ne se termine jamais : il est dur pour la nature, et ceux-là même qui pensent être le plus éclairés sont ceux qui ont le plus besoin (c’est pourquoi il leur est d’une aide précieuse), pour pouvoir être débarrassés de leur fausse richesse, ‘d’humilier leur esprit sous une autorité visible’  » (Fénelon)


Bevil Bramwell, prêtre Oblat de Marie Immaculée, enseigne la théologie à la Catholic Distance University. Il est titulaire d’un doctorat de l’Université de Boston et travaille dans le domaine de l’ecclésiologie.

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Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2012/obedience.html

  1. (NDT : citant Jean Paul II)
  2. NDT : traduction tirée de : http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/motu_proprio/documents/hf_ben-xvi_motu-proprio_20111011_porta-fidei_fr.html