L’immigration et les questions que l’on pose rarement - France Catholique
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L’immigration et les questions que l’on pose rarement

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L’efficacité, le profit économique, la satisfaction d’une préférence sont les catégories par lesquelles la culture dominante évalue les controverses morales et politiques. Mais en agissant ainsi, on exclut certaines questions qui devraient être posées, dont certaines semblent être fondamentales en ce qui concerne la signification de la vie humaine.

Ainsi prenez, par exemple, le débat sur le décret du Président Obama sur l’immigration. Que cela vienne de droite ou de gauche, les arguments principaux pour soutenir ou critiquer reviennent presque toujours sur ce qui peut être mesuré, avec toutes les questions commençant par « quel nombre », « quel coût », et « est-ce vraiment désirable ». Ce qui ne peut se mesurer, et doit donc être ignoré, c’est à quel point cette amnistie peut avoir façonné la personnalité de tous ses bénéficiaires, y compris à la fois les immigrants autant que tous ceux d’entre nous qui avons profité de leur présence dans ce pays.

Beaucoup de gens sont attirés aux Etats-Unis précisément à cause de la stabilité de ses institutions et de la variété des opportunités que cette stabilité leur offre. Mais afin d’offrir cette amnistie, le président doit enfreindre la loi de la séparation des pouvoirs de la nation, portant atteinte au principe fondamental de cette stabilité même qui attire ces hommes, ces femmes et ces enfants dans ce pays, pour commencer. Ironiquement, cela signifie que le président entraîne ces immigrants à être complices de son méfait, et ainsi il leur montre à eux ainsi qu’à toute la population de la nation qu’il n’escompte pas que ces immigrants se conduisent en bons citoyens.

D’une part, il contribue à leur donner une mauvaise réputation au nom de l’aide qu’il leur apporte et ainsi il insulte et blesse les personnes mêmes qu’il déclare aider. Comme un papa à Disneyland qui, pour satisfaire les préférences de ses enfants, porte atteinte à l’intégrité de leur personne, le président offre à ses immigrants tous les avantages de la société civile, tout en suggérant qu’ils n’ont pas besoin de respecter son infrastructure afin d’en bénéficier.

D’autre part, Il y a ceux qui se situent politiquement à la droite du président, qui commencent leurs questions sur le sujet avec la même série d’expressions :  « quel nombre », « quel coût », « est-ce vraiment désirable ». Ne voyant pas ces immigrants comme des personnes d’une valeur et d’une dignité qui ne se mesure pas, faites à l’image de Dieu, ils les voient comme de simples sources d’une main d’œuvre bon marché, un moyen par lequel les capitaines d’industrie peuvent fournir des produits et des services à meilleur marché à de vastes couches de population suburbaines qui réclament plus de sécurité aux frontières, mais profitent énormément de l’absence de cette sécurité.

C’est pourquoi, il est bien trop tard, dans cette affaire, pour que l’un ou l’autre parti, se réclame de hautes références morales. Les démocrates veulent des votes à bon compte. Les républicains veulent de la main d’œuvre à bon marché. Le groupe, au centre, le « Tea Party », veut l’application de la loi et la sécurité aux frontières, quoiqu’ils ne semblent pas être dérangés par le fait que les coûts de leur construction, de leur hôtel, de l’entretien de leur pelouse et de leurs restaurants soient bien inférieurs à ce qu’ils seraient autrement , précisément à cause de la prolifération de travailleurs sans papiers qui veulent bien accepter des salaires que très peu de citoyens simplement envisageraient.

Ainsi, il semble que chaque parti dans ce débat sur l’immigration arrive à la table de discussion les mains sales et les poches bien remplies, car tous, ils ont profité, d’une façon ou d’une autre, des politiques laxistes et incohérentes de notre nation.

Comme on le dit souvent, nous sommes une nation d’immigrants. Mes arrière grands parents, du côté de ma mère ont immigré de Naples et de Sicile au début du 20ème
siècle.

Tout comme leurs contemporains, immigrants comme eux, ils furent attirés par ce pays à cause des opportunités qu’il leur offrait. Mais ces opportunités ne sont pas venues de rien, toutes faites. Elles étaient le résultat de l’acceptation d’une liberté ordonnée, de la répartition des pouvoirs, de l’état de droit, du respect de la propriété, et de la dignité de l’individu qui pénétrait une grande partie de l’atmosphère culturelle de cette époque, même quand les gens de cette nation ne l’appliquaient pas toujours bien.

Bien sûr, je sais que certains de ces immigrants ont subi bien des épreuves à cause des préjugés culturels et ethniques qu’ils ont rencontrés dès leur arrivée sur ces côtes. Il n’est pas bon d’édulcorer cette réalité. Néanmoins, ils sont entrés dans ce pays légalement, n’ont pas été traités avec mépris par l’occupant de la Maison Blanche de cette époque-là. Ils ont construit et soutenu des communautés, des familles, des églises, et des synagogues qui apportaient consolation spirituelle et stabilité sociale, que le gouvernement, Dieu merci, ne prétendait pas leur promettre.

Il est temps pour tous les gens pieux et de bonne volonté de rejeter les catégories de mesures quantitatives que nos « spécialistes» déclarent être la seule manière d’évaluer la crise américaine de l’immigration. Car il s’agit, au fond, d’une question morale qui n’a laissé personne indifférent.

Vendredi 21 Novembre 2014

Source : http://thecatholicthing.org/2014/11/21/immigration-and-the-questions-rarely-asked/

Photo : Les immigrants légaux dans l’Indiana prêtent le serment d’allégeance pour devenir des citoyens américains.