Rappelez-vous ! Nombreux étaient ceux qui disaient que la réforme de l’État et la baisse des dépenses publiques en Allemagne dans les années 2000 se faisaient au détriment de la qualité des services publics et du niveau de vie. La suppression du statut des fonctionnaires, la vente de nombreux groupes et CHU donnaient naissance à de grands groupes privés comme Asklepios, 45000 employés, 3 mds € de CA ou Helios, 71000 employés pour 5,6 Mds € de CA.
Aujourd’hui, on ne peut que subir l’inefficacité des hôpitaux publics français comparés aux établissements allemands qui accueillent des malades français du coronavirus. Et pourtant, il y a beaucoup plus de cas détectés en Allemagne qu’en France !
ALLEMAGNE | FRANCE | |
NOMBRE DE CAS (29/03) | 57 695 | 38 105 |
NOMBRE DE DÉCÈS | 433 | 2317 |
MORTALITÉ / 1 millions habitants | 5,2 | 35,5 |
LITS REANIMATION / 100000 habitants | 29,2 | 11,6 |
DÉPENSES PUBLIQUES (2019) % PIB | 44.3 % | 53.8 % |
DÉPENSES DE SANTÉ (2018) % PIB | 11,1 | 11,5 |
La France aurait donc 5,3 fois plus de morts que l’Allemagne alors que celle-ci aurait 20000 cas de plus. Il faut d’emblée couper court aux arguments budgétaires. La France ne manque pas d’argent : par rapport au PIB (2018), elle est le pays où les dépenses de santé sont le plus élevées en Europe : 11,5% contre 11,1 % en Allemagne, 11 % en Suède, 10,4 % en Autriche, entre 10 et 10,5 % aux Pays-Bas et en Belgique. L’Espagne et l’Italie, qui sont terriblement touchées par le virus, sont à environ 9 % du PIB. La France est aussi championne des prélèvements obligatoires et des dépenses publiques (53,8 du PIB contre 44,3 % en Allemagne, 9 points de plus en 2019 !)
Selon les chiffres de l’OCDE, 35,22% des emplois hospitaliers en France ne sont pas médicaux ou paramédicaux, contre 24,3% en Allemagne, une différence de 9 points. La fonction publique hospitalière, c’est environ 1,2 millions de personnes en France ou 21 % du total des fonctionnaires ; en Allemagne, les emplois publics consacrés au secteur hospitalier ne dépassent pas 5 % du total des emplois publics.
Cela n’a pas empêché l’Allemagne d’avoir plus de lits en réanimation (29,2 pour 100000 habitants contre 11,6 en France) ! Dans notre pays, même le nombre de lits « normaux » d’hôpital a connu une chute vertigineuse ces dernières années : de 468000 en 2003 à moins de 400000 aujourd’hui. En 2018, environ 180000 patients en urgence ont passé une nuit dans un couloir faute de lit disponible et près de 5 % des lits en région parisienne sont considérés hors d’usage faute de personnel. Au lieu de nous gargariser à longueur de journée avec notre prétendu « meilleur système de santé au monde », il faudra en tirer les leçons après cette crise et le réformer en profondeur. En prenant comme modèle les Allemands, par exemple…
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* Institut de recherche économique et fiscale (IREF)