Depuis le début des conférences de carême à Notre Dame de Paris, j’ai tenu ici-même à prolonger l’écho d’un enseignement que je crois essentiel pour nous autres catholiques. Il importe de retrouver exactement le contenu du concile Vatican II pour comprendre quelle lumière il peut nous apporter aujourd’hui.
Hier, deux conférenciers sont revenus sur les textes phares du concile, Lumen gentium et Gaudium et Spes. Le Père Benoit-Dominique de la Soujeole a d’abord rappelé que « la lumière du monde », ce n’était pas l’Église mais le Christ lui-même, dont l’Église a mission de rendre visible et explicite la lumière. Le religieux de l’ordre de Saint Dominique a beaucoup insisté sur ce qu’on pourrait appeler le retournement eschatologique de l’histoire humaine, qui, par l’avènement du Christ est devenue histoire divine ou divino-humaine: « Nous vivons comme le dit l’auteur de l’épitre aux Hébreux, en ces jours qui sont les derniers, non pas comme si la fin du monde allait survenir maintenant, au sens où nous sommes dans la dernière période de l’histoire, celle de la plénitude des temps. » Et encore : « Le dernier jour révélé, celui de la pleine manifestation de la gloire du Ressuscité et de tous les saints à ses côtés, projette déjà sa lumière dans l’obscurité actuelle et nous communique l’orientation fondamentale de notre histoire. »
C’est cela d’abord et avant tout Vatican II, et souvent on l’a un peu oublié à travers des controverses intéressantes mais subalternes. L’intention de Jean XXIII était d’exposer dans toute son ampleur le projet de Dieu sur l’humanité et son accomplissement plénier en Jésus Christ. Le projet était dont complètement positif, il ne s’agissait pas de condamner d’abord des erreurs mais de mettre en évidence pour l’humanité d’aujourd’hui cet extraordinaire dessein de Dieu sur nous et notre histoire humaine.
C’est pourquoi l’autre texte proposé hier par Michel Camdessus, ancien président du Fonds Monétaire International, était le répondant nécessaire à Lumen Gentium. Gaudium et Spes a voulu montrer comment la lumière du Christ éclaire les réalités de l’histoire contemporaine, celles que nous avons à vivre. On a reproché à cette Constitution son optimisme excessif, lié à la période euphorique des Trente glorieuses, et l’avènement de la société de consommation et de la coexistence pacifique entre l’est et l’ouest. Mais c’est oublier que ces textes associaient l’espérance et la joie à l’angoisse et aux deuils inhérents à notre condition. Et s’il s’y trouve certains aspects teilhardiens qui évoquent la réussite de la création, il y a aussi l’étude des grands contemporains: la famille, la fin, la paix et la guerre.
Michel Candessus a insisté sur la crise économique actuelle à la lumière de Gaudium et Spes, en se montrant sévère sur les responsabilités qui ont amené à un dérèglement total du système frappant surtout le plus pauvre. Reprenant aussi la dernière encyclique de Benoit XVI, il a insisté sur la notion de don et des gratuité dans l’économie marchande pour retrouver le sens d’un bien commun. Ce qui permettait au père de La Soujeole de rappeler que cette notion de dons se rattache au don inouï que le Père faisait à l’humanité en la personne de son fils. Oui, il y a intérêt à revisiter Vatican II pour en saisir l’unité foncière d’inspiration et l’extraordinaire dynamisme qu’il confère à la mission des chrétiens aujourd’hui.
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« L’histoire du salut ». C’est le thème de la troisième conférence de Carême à Notre-Dame, prononcée le dimanche 7 mars. Un laïc, Michel Camdessus, ancien directeur général du FMI (Fonds Monétaire International), et un religieux, le frère Benoît-Dominique de La Soujeole, prieur du couvent dominicain de St-Albert le Grand (Fribourg), se penchent sur la question, en s’appuyant sur deux textes du concile Vatican II.
Promulguée en 1965, la constitution pastorale Gaudium et Spes était « un “oui” fondamental à l’âge moderne », selon Benoît XVI. En montrant que la réussite finale de l’homme est pleinement solidaire de celle du monde, elle engageait l’Eglise et les chrétiens à agir en vue du bien commun. Quarante ans après, quelle est l’actualité de ce texte ?
[http://catholique-paris.cef.fr>http://catholique-paris.cef.fr/132-Dimanche-7-mars-l-histoire-du.html]
Pour aller plus loin :
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- La France et le cœur de Jésus et Marie
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- LA « MODERNITÉ » : UN CENTENAIRE OUBLIÉ
- EXHORTATION APOSTOLIQUE POST-SYNODALE « AFRICAE MUNUS » DU PAPE BENOÎT XVI