L’expo sur le Linceul à St-Nicolas-des-Champs et conférence le 27 mars - France Catholique
Edit Template
La justice de Dieu
Edit Template

L’expo sur le Linceul à St-Nicolas-des-Champs et conférence le 27 mars

Copier le lien

Il y a deux jours, le matin du 3 mars, j’ai installé l’exposition sur le Linceul de Jésus en la paroisse Saint-Nicolas des Champs, aidé par un séminariste indonésien, François-Xavier, originaire de Sumatra, et par un laïc de la paroisse, Thierry Rondeau. Il y a déjà quelques années, j’avais déposée l’exposition en cette belle église qui jouxte la rue Turbigo à Paris : j’ai été heureux de constater que le curé de la paroisse en a gardé un souvenir bienveillant puisqu’il a désiré qu’elle revienne chez lui pour le carême.

C’est toujours pour moi une grande joie que de voir s’allonger ce cortège d’une quarantaine de toiles imprimées chacune de quatre à six petits panneaux de format A3 comportant nombre de textes explicatifs et de photographies. Ainsi, elle me semble vivre. Par contre, je déteste la désinstaller …

Oui, joie, et sans doute même « joie de joie » : car le Linceul est bien autre chose qu’une simple image à vénérer, même si ce point a une réelle importance : il doit être aujourd’hui considéré comme un efficace outil catéchétique, qui enseigne avec précision tout ce qui concerne la Passion du Christ mais aussi qui incite à se poser la question centrale sans laquelle tout ce qu’a souffert Jésus n’aurait en rien la signification que nous lui connaissons : il s’agit bien sûr de la Résurrection.

D’abord en effet, le Linceul commence par ‘’illustrer’’, pas à pas, détail après détail, chacun des aspects revêtus par ces ‘’épouvantes’’ que le Seigneur a dû, volontairement, traverser : l’agonie de Gethsémani, l’arrestation, les interrogatoires, la flagellation, le couronnement d’épines, le portement de croix, la crucifixion !

Le mot ‘’épouvante’’ n’est pas suggéré par les écrits des évangélistes : c’est que ces récits sont très sobres, comme avares de détails… Un jour, quelqu’un m’a rétorqué : c’est qu’il n’est donc pas nécessaire de connaître ces détails puisque les évangélistes n’ont pas cru devoir nous les transmettre ! Un autre, cette fois il s’agissait d’un prêtre, me lança comme un reproche qu’il ne fallait pas s’attarder sur les douleurs ressenties par le Sauveur puisqu’Il est ressuscité : s’y attarder, disait-il, équivalait à une sorte de dolorisme très dangereux. Mais le Linceul est devant nos yeux et je ne crois pas qu’il soit parmi nous inutilement. De plus, il va de soi que jamais on ne peut oublier, tout en méditant sur les atrocités qui Lui furent infligées, le mystère de ce surgissement du plus profond de la mort opéré par le Christ vivant. Quel mystère plus nécessaire ? Plus fort ?

Avant de parler de ce document sans pareil, il convient de faire deux remarques : la première est qu’il est certain que Matthieu, Marc et Luc n’ont pas suivi Jésus tout au long de ces événements. Avec les apôtres et leurs disciples, ils ont noté ce dont ils étaient certains, de ce qui avait été dit et répété par ceux qui avaient vu et témoigné. Puis, qu’est-ce que Jésus leur en avait dit, après ? Les apôtres Pierre, Jacques et Jean, pris par Jésus après l’instauration de l’eucharistie pour l’accompagner, n’ont rien compris à ce qui s’était réellement passé au secret du Jardin de Gethsémani : tandis qu’ils dormaient, il n’y eut à cet endroit qu’un témoin très paradoxal, le Linceul justement, encore que son témoignage ne porte que sur l’intensité de la souffrance ici à distinguer du mot douleur. Quant au disciple bienaimé, Jean l’évangéliste, il fut presque toujours à suivre Jésus ; je pense qu’il ne fut pas avec les trois apôtres à l’entrée du Jardin de l’Agonie : plutôt était-il à suivre la troupe de ceux qui montèrent de Jérusalem afin d’arrêter le « Fils de l’Homme ». Il est le seul à témoigner de la révélation que fait Jésus de son ‘’identité’’ avant de se laisser arrêter, ce que ne fit pas Marc que Pierre aurait pu renseigner s’il avait entendu la réponse de Jésus : « Moi, Je suis », courte phrase théophanique qui fit chuter les gardes du Temple, saisis de frayeur. Ensuite, Jean accompagna pas à pas Jésus, même s’il faut nécessairement penser qu’il ne fut pas dans la cour des soldats romains où eut lieu la flagellation : elle fut si puissamment mortelle qu’il en aurait été profondément marqué, affligé, et en aurait rendu compte.

La seconde remarque porte sur le Linceul lui-même : ce tissu a tout vu, si j’ose m’exprimer ainsi, tout ‘’constaté’’. Mais tous ces détails qui nous ‘’enseignent’’, seules les recherches scientifiques peuvent les mettre au jour, les ‘’expliquer’’. Ainsi, la présence d’une proportion exceptionnelle de bilirubine dans le sang conservé par ce linge nous oblige d’abord à reconnaître que ce corps est bien passé par « la sueur de sang » – en langage médical ‘’hématidrose’’, de deux mots grecs ‘’aïma’’ (sang) et ‘’droso’’ (rosée) – dont la définition, très courte, est « symptôme d’une souffrance absolument intolérable ». Chaque mot compte et nous révèle le pourquoi de l’expression ancienne « agonie de Gethsémani ». Oui, des Pères de l’Église ont médité cette heure si forte qu’ils ont décrite comme « le sommet de la Passion ». Le Linceul, à sa manière silencieuse, ne dit pas autre chose. Le sommet ! Pour que la souffrance en vienne à cet excès, il faut que la prière du Christ, que ses réflexions et sans doute aussi ses tentations aient été d’une singulière intensité, force et violence. D’une nécessité pour nous inconcevable.

Mais le Linceul introduit les autres actes de la Passion tel celui de la flagellation : Jean ne fait que dire à son sujet « Et Pilate le fit flageller ». Quand on finit par comprendre que sous les coups reçus, si nombreux, Jésus aurait dû normalement mourir, on entre naturellement ou surnaturellement dans une réflexion à jamais ancrée en notre esprit : recevoir, après des trente-neuf premiers, entre quatre-vingt et cents coups tous potentiellement mortels, c’est aussi bien se poser la question humainement sans réponse : ‘’pourquoi ?’’ ; c’est encore saisir qu’Il ne peut pas se dérober vu l’enjeu infini qui est en cause et qui l’engage Lui tout autant qu’est engagé le Père.

Et il en va ainsi de tous les aspects que revêt la Passion, tous doivent être revus, réfléchis, quitte à accepter de modifier, de nécessairement modifier une image de la crucifixion qui s’est incrustée en notre esprit depuis tant de siècles : d’abord parce que Jésus serait mort en quelques minutes – ce que ne voulait pas le droit romain – s’il n’avait pas été soutenu sous les aisselles et donc les bras pas obligatoirement tendus, peut-être même pliés en W … Ensuite, il ne pouvait être que figé dans une totale « rigidité cadavérique » dès avant la seconde du souffle ultime, d’où une position du corps très différente de ce que nous montre l’imagerie traditionnelle des piétas.

La science donc nous a appris à ‘’lire’’ le Linceul, appris à aller au-delà de ce que disent les évangélistes sans oublier pour autant que ce document correspond parfaitement à ce que nous révèlent leurs textes – vingt-sept points de correspondances existent entre ces textes et ces images mais aucune divergence ne se constate ! – ce qui en soit est extraordinaire et même incompréhensible, quoique ce ne soit peut-être pas le plus important : la remarque que font les scientifiques quand, cherchant à ‘’expliquer’’ ce qu’ils ne peuvent pourtant pas, ils osent, sachant que leur propos va au-delà de ce que peut dire la science, user d’un terme presque absurde, celui de ‘’dématérialisation’’. Ce mot signifie qu’il y a un cadavre qui n’obéit plus aux lois de l’espace temps … mais on n’a pas le moyen de le prouver.

Le 27 mars au soir (à vingt heures !) en l’église Saint-Nicolas-des-Champs, j’explorerai les travaux essentiels de ces explorateurs qu’ont été jusqu’ici les ‘’sindonologues’’, sans oublier de préciser pourquoi on ne peut plus aujourd’hui faire confiance au carbone 14 pour la datation des vieilles étoffes qui ont beaucoup vécu…
Dominique Daguet