Les prédateurs publics, à savoir les politiques et bien d’autres, prélèvent pour leur EPI 5 % du PIB. Les « autres » dépassent de beaucoup le groupe des politiques : compagnons de route, hauts fonctionnaires, syndicalistes. Pour désigner cette population d’environ 10 000 personnes, j’emploierai ici le terme de « caste », utilisé par nos amis italiens pour désigner les « Hifis » locaux qui sont au moins aussi voraces que les nôtres. En France, les membres de la caste pourraient parfaitement ne pas accepter l’EPI en gardant, dans l’honnêteté, ce qui suffirait pour faire fonctionner la gigantesque machinerie étatique qui écrabouille le peuple français.
De récentes informations, le magazine Capital révèle que les fonctionnaires du sénat sont payés trois fois plus cher que leurs collègues de l’État. Cela vient d’une accumulation de primes dont bénéficient ces fonctionnaires bien spécifiques. Par exemple : le versement d’une prime individuelle de chauffage. Avec la hausse du pétrole, la prime a littéralement explosé, en passant de 1500 euros par an en 2000 à 4035 euros en 2011. Ce magazine nous apprend qu’en 2008, la cagnotte du Sénat s’élevait à 1,5 milliard d’euros. Le président du sénat, Jean-Pierre Bel, a expliqué que celle-ci servait avant tout à payer les retraites des sénateurs et des fonctionnaires du Sénat ; ces retraites sont très fastueuses et font justement partie comme telles de l’EPI de cette population. Au même moment, l’association « contribuables associés » toujours très bien informée sort un dossier : « ce que nous coûtent vraiment nos élus » ; le dossier se limite au cas des élus, mais d’autres dossiers de « contribuables associés » traitent abondamment de l’EPI d’autres membres de la caste.
PAS VU, PAS PRIS
Dans la « République Fromagère (RF) » sont énoncés des principes qui permettent à la caste de s’enrichir en douce sans que personne ne fasse la synthèse nécessaire et urgente. Les médias largement assis au banquet républicain sont eux-mêmes complices ; l’un de ces principes s’écrit : « pas vu, pas pris ».
Il est néanmoins possible, malgré l’omerta, d’énoncer la liste des principaux moyens utilisés par les membres de la caste pour s’enrichir indûment sur le dos des populations. La voici en désordre et non exhaustive : cumuls, salaires excessifs, retraites, nourriture gratuite, fêtes en tout genre, droit au reclassement en cas de panne, voyages luxueux dans des coins paradisiaques, droit d’engager des collaborateurs familiaux, créations de postes ou même d’administrations inutiles, bureaux fastueux parfois dans des palais, notes de frais abusives, voitures avec chauffeur, salles à manger de direction, caves magnifiques, etc.
Ces rapines, car ce sont bien des rapines, sont couvertes par la loi, laquelle est justement fabriquée à cet effet par la caste elle-même. Nous comptons donc pour rien les magouilles éventuelles qui expliquent que, parfois, dans la caste il se trouve des repris de justice.
Pour apprécier l’étendue de l’EPI, il faut tenir compte de ce que l’essentiel des avantages est informel et échappe ainsi à une kyrielle d’impôts ; pour apprécier réellement le total et le comparer à l’enrichissement de ceux qui travaillent honnêtement dans un marché libre il faudrait sans doute multiplier par deux l’EPI.
En application du « pas vu, pas pris », des explications sont mises en avant. Certains élus justifient leurs fabuleux gains par un travail harassant. L’aveu est tragique. Ce qui les harasse, c’est la fabrication du déluge de lois qui accompagné de la bougeotte habituelle nous conduit à la ruine.
Il existe au profit des députés une indemnité représentative des frais de mandat (IRFM) de 6000 euros mensuels. En novembre 2011, deux députés ont déposé une proposition de loi à ce sujet. Il s’agissait d’organiser des contrôles et de demander des justificatifs sous forme de notes de frais comme cela se pratique partout. La proposition a été sèchement refusée sous prétexte quelle faisait porter la suspicion sur l’honnêteté des élus du peuple. Elle pourrait laisser entendre que l’argent public est mal géré et « porter atteinte » aux institutions de la république : pas vu, pas pris.
LES CHIFFRES
Comment peut-on arriver à ce pourcentage important de 5% minimum du PIB ? Le calcul réel est impossible à faire.
Quelques exemples permettront de comprendre l’immensité des chiffres.
Les anciens présidents de la République et Premiers ministres bénéficient d’un statut princier dont nul, ni même les bénéficiaires ne peut mesurer l’ampleur. Un ancien premier ministre, Michel Rocard, a trouvé que cela ne suffisait pas. Le 13 mars 2009, il fut nommé par Nicolas Sarkozy, ambassadeur de France chargé des négociations internationales relatives aux pôles arctique et antarctique. Quelle est la structure onéreuse qu’il dut créer pour ne pas se trouver tout seul à se geler dans cette fonction ? Quel est le degré de désordre qu’il a introduit dans l’organisation des affaires étrangères ? Insondable mystère.
Le droit permanent au reclassement en cas de panne dans la carrière est d’une valeur inestimable. En février 2008, Philippe Douste-Blazy est devenu, à ce titre, conseiller spécial des « sources novatrices de financement du développement » auprès du Secrétaire général des Nations unies. L’importance du grade ouvre de vastes horizons à l’EPI de l’heureux propriétaire. L’objectif est très inquiétant pour le monde entier avec des effets négatifs probables et non mesurables. Quelle est la valeur exacte d’une nomination au Conseil, économique, social et environnemental ?
Il paraît que lorsque l’on part en vacances on est fatigué. Soit. Des maires, pour caresser leur électorat, ont inventé la « journée valise ». Ils donnent aux fonctionnaires de la mairie une journée pour faire leur valise : cette journée supplémentaire s’ajoute à des congés déjà excessifs. La République fromagère (RF) n’ayant pas de limites connues, personne ne saura si cette mode détestable a gagné beaucoup de mairies.
Quand j’évoque le 5%, cela vise essentiellement le haut du panier. Lorsque l’on ajoute les innombrables petites grattes du genre « journée valise », l’on dépasse très probablement les 5%.
DES EFFETS DEVASTATEURS
Cet EPI des membres de la caste grâce à de l’argent enlevé par la loi au reste du peuple explique pour une grande part des calamités, comme la panne de croissance, le chômage, les délocalisations, la paupérisation et les restos du cœur. Inversement, le phénomène montre une fois de plus l’importance de la marge de manœuvre qu’un pouvoir « Libérateur » trouverait pour prendre le chemin de la prospérité.
Les plans d’austérité se succèdent sans interruption et assènent l’austérité à l’ensemble de la population, épargnant avec soin l’EPI des membres de la caste. Un plan contraire devrait signifier : austérité pour la caste et richesse retrouvée pour tous.