L'Encyclique Lumen Fidei : premières impressions. - France Catholique
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L’Encyclique Lumen Fidei : premières impressions.

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Ce vendredi 5 juillet S.S. François a publié l’Encyclique Lumen Fidei (Lumière de la Foi). Les Encycliques ne sont pas destinées aux informations d’actualité, et la richesse du texte est un défi à toutes les controverses. Mais quelques-unes parmi les premières impressions ressenties peuvent aider les lecteurs à se retrouver dans ce texte-ouragan.

Le Saint-Père François rend au Pape émérite Benoît XVI un immense crédit pour cette première Encyclique. Il conforte ainsi l’importance de Vatican II dans l’Année de la Foi entamée en octobre dernier par Benoît XVI. Il insiste sur la continuité de l’enseignement de l’Église à la fois par le Concile et par son pontificat. Plus avant dans ce texte, il propose de vigoureux rappels sur l’autorité et l’importance du Magistère.

Le texte est plein de puissance intellectuelle, sans pédantisme, pas « intello ». Les lecteurs de tous niveaux peuvent l’aborder, il est ancré à l’Écriture, et consacre beaucoup de réflexions à l’histoire du peuple juif, comme à l’anticipation pour les juifs à la venue du Christ.

S.S. François précise nettement qu’il faut lire cette lettre dans la veine des Encycliques précédentes de Benoît XVI, « Deus Caritas Est » et « Spe Salvi ». Elles constituent une trilogie sur les vertus théologales que Benoît et François trouvent plutôt négligées ou incomprises à notre époque.
Les Encycliques sont des documents pédagogiques dans l’esprit de leur époque. Pie X publia  » Pascendi Dominici Gregis » pour répondre au modernisme et à ses méfaits. Léon XIII écrivit « Rerum Novarum » en un temps où les problèmes du capitalisme ouvraient la voie au socialisme. Pie XI, dans les années 1930, s’exprima contre ces formes politiques intrinsèquement modernes, le fascisme et le communisme.

Ces Encycliques rappellent les vérités éternelles de l’enseignement de l’Église à l’occasion de circonstances particulières, cette trilogie fait de même. Les lettres concernant la foi, l’espérance et l’amour répondent aux pathologies caractéristiques de l’époque post-moderne: perte des vertus, divorce entre foi et raison, et relativisme, individualisme, laissant un grand nombre à notre époque dans le malaise spirituel, l’apathie remarquée par des écrivains tels que Walker Percy et T.S. Eliot, que cite S.S. François.
Cette lettre traite de la foi non comme une méthode ou une doctrine — la doctrine a cependant son importance — mais comme une rencontre avec Dieu, le Père, Dieu, le Verbe, Dieu, l’Esprit Saint. Cette rencontre avec des Personnes est indispensable pour nous, humains, afin de comprendre notre propre nature et notre dignité de personnes.

L’Encyclique trace l’enchevêtrement entre foi, espérance et amour et, dans l’amour, entre foi et vérité. Elle souligne la place centrale des sacrements et de la prière. Elle rappelle constamment la lumière apportée par le don de la foi.

Et elle traite tout ceci en rappelant les réalités concrètes, notre condition matérielle. Le gnosticisme est rejeté, et la réalité est affirmée à la fois de l’amour infini de Dieu et de Sa création qui nous entoure.

La lettre réunit foi et raison, comme S.S. Benoît avait tant cherché à le faire par ses enseignements. Elle marque la relation fructueuse entre l’Écriture et la pensée grecque, souligne l’importance de la foi dans la recherche de la vérité en tous domaines (de la théologie aux sciences naturelles), et nous rappelle les dangers de toutes les formes d’idolatrie, « contraire absolu de la foi ». Le pape cite la définition de l’idolâtrie par Martin Buber: il y a idolâtrie « quand un visage se tourne respectueusement vers un visage qui n’est pas un visage.»

Sans la véritable foi, nous nous tournons vers toutes sortes de faux visages: idéologie politique, profit, mammon, veaux d’or. Cette Encyclique est une invitation à nous écarter de toutes les idoles de la modernité et de la post-modernité et à nous tourner vers l’amour lui-même.

Cette lettre n’est pas un manifeste politique, mais elle touche la politique et l’économie, en temps utile pour les États-Unis comme pour l’Europe. Nous avons lu à propos de la « lumière de la foi » qu’elle est au service de la justice, de la loi, et de la paix, et que l’enseignement de l’Église rappelle que le bien commun est l’objet de tous les actes politiques et économiques, sous les gouvernements dont l’autorité, rappelons-le, vient de Dieu. Le pape repousse la doctrine de Hobbes dans la pensée politique comme dans l’utilitarisme:

« La foi n’éloigne pas du monde et ne reste pas étrangère à l’engagement concret de nos contemporains. Sans un amour digne de confiance, rien ne pourrait tenir les hommes vraiment unis entre eux. Leur unité ne serait concevable que fondée uniquement sur l’utilité, sur la composition des intérêts, sur la peur, mais non pas sur le bien de vivre ensemble, ni sur la joie que la simple présence de l’autre peut susciter.» (Lumen fidei, 51).

Et la lettre porte l’affirmation incontestable et bienvenue de l’enseignement de l’Église sur le mariage, fondé sur la différence des sexes et la famille, et sa relation à la politique: « La première institution où la foi enrichit la cité des hommes est la famille. Je pense d’abord et essentiellement à l’union stable de l’homme et de la femme dans le mariage.»

La lettre est un véritable régal par ses références à un large éventail de penseurs, depuis l’Église primitive jusqu’à nos jours. St. Justin, St. Thomas d’Aquin, le Bienheureux Jean-Paul II, Dante, et déjà nommé, T.S. Eliot.
Mais les saints Pères François et Benoît nous montrent deux sources bien particulières: St. Jean l’évangéliste, avec de nombreuses citations de son évangile, et St. Augustin, dont la pensée imprègne la lettre, et qui est un préféré du pape émérite.

Ces deux grands saints insistent, et la lettre le reprend, sur la relation entre foi, espérance et amour; amour, foi et vérité. Tous deux font preuve de vies marquées par la foi et la raison. Tous deux ont vécu à l’époque de l’empire romain, St. Augustin assistant au début de son déclin.

Et peut-être est-ce peu significatif, mais la lettre fut signée par S.S. François le jour de la fête des Saints Pierre et Paul, martyrs de la foi à Rome.

À une époque, c’est un rare et immense privilège, où le Vatican abrite François et Benoît, ces deux évêques de Rome se sont unis pour dire à notre génération, à toutes les générations, ce que nous avons bien besoin d’entendre.

Joseph Wood enseigne à l’Institut de Politique mondiale à Washington.


http://www.thecatholicthing.org/columns/2013/first-impressions-of-lumen-fidei.html