On n’a pas suffisamment prêté attention au communiqué du Conseil permanent de la Conférence des évêques de France, publié le 13 juin dernier. Pourtant, la fermeté et la clarté du propos méritent d’être retenues, d’autant qu’elles anticipent aussi sur l’avenir prochain : « La loi créant un nouveau statut du mariage et de la filiation a suscité depuis près d’un an la mobilisation de beaucoup de nos concitoyens, notamment par des manifestations. Parmi ces foules paisibles et vigilantes, de très nombreux jeunes, mariés ou célibataires, ont vécu là une expression publique forte de leur engagement. Cet engagement n’a pas été vain. Il aura encore à se déployer dans d’autres domaines où la vigilance est requise pour le respect de la personne humaine. Venues de tous horizons, ces foules ont signifié leur détermination dans le calme et le respect des institutions. Vouloir récupérer leur protestation à des fins partisanes ou chercher à l’amalgamer ou à la réduire à des extrémismes violents est inadmissible. »
Cette dernière remarque est particulièrement bienvenue, parce qu’elle opère un discernement précieux. Nos évêques refusent d’être dupes des manœuvres qui ont consisté à travestir la protestation populaire contre la loi Taubira en violence de rue et même en atteinte à la légitimité des institutions. Les sous-entendus insidieux, les amalgames fabriqués ne tiennent pas devant la réalité d’un phénomène dont la spécificité retient désormais l’attention des observateurs en sociologie politique, à cause de son caractère inédit. L’Église catholique n’est nullement étrangère à l’éclosion d’une génération qui s’est montrée apte au service civique, même si celle-ci s’étend à d’autres familles spirituelles. C’est pourquoi nos évêques affirment leur devoir d’accompagnement, qui ne saurait se limiter à un moment, puisque ce qui appartient au domaine du jugement de la conscience dépasse le court terme législatif et se trouve sans cesse éveillé par d’autres sollicitations. Dans l’ensemble complexe et étagé que constitue une société, l’Église catholique assume un rôle fondamental d’éveil et de formation qui, lorsqu’il se confronte à des occasions comme celle que nous vivons, montre la force et la lucidité d’un engagement. En désaveu à une sociologie infirme, le christianisme a montré ces derniers mois comment il était capable de renouveaux qui ne sauraient surprendre ceux que saint Irénée a instruits dès les origines : « Avec Lui-même, le Christ a apporté toute nouveauté. »