L’annonce s’est faite à l’improviste, même si elle était attendue : Emmanuel Macron souhaite inscrire dans la Constitution en 2024 la « liberté des femmes de recourir à l’IVG ». Pourquoi une telle précipitation alors que l’avortement est déjà dans la loi depuis 50 ans ? À quel calcul politique répond-elle, alors que le nombre d’avortements n’a jamais été aussi élevé en France (234 300), et qu’aucune politique nataliste ne vient stimuler le déficit de naissances ?
D’autant que la voie choisie, celle d’une révision constitutionnelle par les deux chambres réunies en Congrès, et non par référendum, est assumée par l’Élysée : « Un référendum aurait abouti à un débat inutile “pour” ou “contre” l’IVG. (…) cela aurait donné aux opposants au texte une tribune disproportionnée » (Le Figaro). Quel aveu de faiblesse dans une démocratie que de refuser le débat !
Mais il est bien connu que la révolution finit toujours par s’autodétruire et dévorer ses enfants. Car comment lutter efficacement contre la violence et l’inhumanité dans la société et dans le monde quand le massacre des Innocents se poursuit en toute légalité ? Et comment l’inscription de cette pseudo-liberté pourra-t-elle être conciliée avec la liberté de conscience des médecins, elle aussi garantie par la Constitution ? Quant à la liberté de vivre du fœtus, n’en parlons même pas…
Au final, c’est la Constitution elle-même, comme loi fondamentale du pays, qui risque d’être affaiblie dans son rôle d’équilibre des pouvoirs, au-dessus des partis et des idéologies. Dès lors, cette décision pourrait ouvrir la porte à des révisions plus profondes encore de nos institutions. Car quand la loi se fait injuste, qu’est-ce qui la différencie de l’arbitraire ? « Enlève le droit – et alors qu’est-ce qui distingue l’État d’une grosse bande de brigands ? », disait même saint Augustin, repris par Benoît XVI devant le Bundestag allemand, en 2011. L’irréversibilité invoquée par l’exécutif pourrait n’être qu’un vœu pieux.
Mais il ne faut pas se leurrer. Il y a 30 ans déjà, l’encyclique de Jean-Paul II Veritatis splendor affirmait que la perte de la foi allait de pair avec « l’obscurcissement du sens moral ». C’est donc en amont que se situe en premier lieu le combat à mener : c’est par l’annonce, à temps et à contretemps, de l’espérance chrétienne que pourra être retrouvé le sens de la vraie dignité humaine.
Une parole de vérité
La fête du Christ-Roi de l’univers, célébrée à la fin de ce mois, avait été instaurée par Pie XI dans une période troublée, notamment par la politique antireligieuse du cartel des gauches en France. Elle avait pour vocation d’étendre le règne du Christ dans les cœurs et les sociétés. « Si les hommes venaient à reconnaître l’autorité royale du Christ dans leur vie privée et dans leur vie publique, des bienfaits incroyables – une juste liberté, l’ordre et la tranquillité, la concorde et la paix – se répandraient infailliblement sur la société tout entière ».
En attendant, le combat semble être celui de David contre Goliath, mais il n’y a pas lieu de désespérer : il s’agit de lui opposer une parole de vérité, fondée sur le roc, pour toucher les consciences. Car le relativisme se heurtera nécessairement à ce qui résiste : l’Église. Selon un proverbe russe cité par Soljenitsyne dans son discours du prix Nobel, 1972, « une parole de vérité pèse plus que le monde entier ».