L'avenir de Charlie Hebdo - France Catholique
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Marie dans le plan de Dieu
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L’avenir de Charlie Hebdo

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On apprenait, hier, que l’autel – l’autel, c’est le terme employé – à la mémoire des 17 victimes des attentats de Paris avait été saccagé pour la quatrième fois, Place de la République, les couronnes de fleurs arrachées et les dessins déchirés. Émoi, colère, incompréhension. C’est qu’il y désormais un véritable culte Charlie Hebdo, les autres victimes des attentats étant assimilées à celles du journal dans un même souvenir. Est-ce à dire pour autant qu’il existe une identité parfaitement claire, reconnue de Charlie, en dehors de la cause de la liberté d’expression ? La question se pose, et d’abord aux intéressés, les survivants, les héritiers, qui vont devoir continuer le journal, ce qui n’est pas une tâche évidente. Dans un excellent papier, publié dans le supplément magazine du Monde, notre collègue Raphaëlle Bacqué nous fait participer aux affres d’une rédaction, qui n’est pas délivrée de son cauchemar et s’interroge sur son avenir.

Il faut sortir, en effet, du mythe Charlie et envisager les réalités. « Les dernières années, les rangs des amis de Charlie s’étaient clairsemés. Les jeunes ne les lisaient pas. D’autres ne les trouvaient pas drôles. » Déjà, il fallait réfléchir à l’évolution du contenu, à des collaborations nouvelles. Exigences qui se sont encore renforcées. Mais il ne semble pas qu’il y ait abondance de candidatures. Par ailleurs, il faut bien convenir que le style a complètement changé. De l’insouciance goguenarde d’autrefois on est passé au souci lancinant de la menace permanente, celle qui justifie un engagement tendu, qui risque de se concentrer sur un adversaire.

Quel adversaire ? Le djihadiste totalitaire, assassin de la liberté ? Sans aucun doute. Mais comment échapper aux amalgames et à la stigmatisation de l’ensemble des musulmans ? Là-dessus, la controverse à gauche fait rage, et des reproches cinglants jaillissent, tels ceux d’Emmanuel Todd qui déclare : « Blasphémer l’islam, c’est humilier les faibles de la société que sont les immigrants. » Quoi qu’on en pense, le défi apparaît radical et la mutation accomplie décisive. Le vingt-et-unième siècle affirme sa différence avec le vingtième, où fut conçu le projet d’un journal bête et méchant, surtout lorsque la méchanceté vous surplombe, rendant dérisoires les armes d’autrefois.

Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 23 février 2015.