Ainsi donc le second synode sur la famille a pris fin hier, dimanche. Déjà une avalanche de commentaires nous est tombée dessus, de la part de gens plus ou moins bien inspirés, avec des grilles d’analyse discutables. J’avoue, pour ma part, avoir besoin de temps pour digérer l’événement et sa portée, d’autant plus que les véritables conclusions seront données par le Pape lui-même dans plusieurs mois. C’est d’ailleurs un des paradoxes de la situation actuelle : d’un côté on envisage plus de décentralisation dans les affaires ecclésiales, et par ailleurs on fait appel au successeur de Pierre pour qu’il trouve le point d’équilibre nécessaire entre les avis contrastés qui se sont exprimés. Cela n’étonnera pas ceux qui connaissent l’histoire de l’Église.
Mais il y a l’objet même du synode : le mariage, la famille. En dépit de l’avertissement de François, l’attention s’est portée presque exclusivement sur la question des divorcés-remariés. Je ne veux pas la minimiser, elle est incontestablement cause de troubles dans la vie pastorale. Mais je suis obligé de constater que les solutions envisagées relèvent toutes de ce qu’on appelle traditionnellement la casuistique. Un mot qui désigne exactement ce dont il s’agit, c’est-à-dire l’étude approfondie des cas particuliers, afin de relever dans les histoires personnelles ce qui peut être l’objet d’un jugement approprié. Mais qui dit casuistique exclut les généralités. Et on ne doit pas attendre de solution massive et globale à la question posée. C’est pourquoi, en dépit de beaucoup de gloses répandues ici et là, on doit craindre finalement beaucoup de déceptions, l’attente ayant été quelque peu démesurée.
Je n’entends décourager personne et j’entends aussi l’appel du Pape à un grand mouvement de miséricorde qui englobe tous les membres de notre famille, notre Église n’étant pas seulement celle des saints. On verra comment pourra se déployer sur le terrain cette ouverture manifeste. Mais je m’interroge aussi sur d’autres dimensions qui me paraissent presque plus graves que celle du divorce dans nos pays d’Occident. Nos évêques se sont-ils vraiment interrogés sur le refus de l’engagement et donc sur le refus du mariage, qui n’a cessé de s’amplifier depuis les années soixante ? Avant même les ruptures douloureuses, il y a globalement une crise de l’institution, celle dont le non-chrétien Pierre Legendre clame depuis longtemps le caractère crucial. Refuser le mariage, c’est refuser d’instituer la vie. C’est singulièrement grave et cela mérite toute l’attention de l’Église.
Chronique diffusée sur Radio Notre-Dame le 26 octobre 2015.
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