Un événement s’est déroulé à Chartres, il y a trois jours, dont l’écho a été beaucoup trop faible eu égard à son importance hautement symbolique. Il s’agissait, en effet, de la célébration du soixante-dixième anniversaire du décès de l’abbé Franz Stock, un prêtre allemand qui, sous l’Occupation à Paris, accompagna des centaines de prisonniers sur le lieu de leur exécution. C’est ainsi qu’il assista Honoré d’Estienne d’Orves, celui-ci recevant à genoux la bénédiction du prêtre avant d’être fusillé avec ses compagnons. À l’heure où le sacerdoce est souvent sali, il est salutaire de méditer sur une telle figure qui incarna jusqu’à l’extrême héroïsme la compassion dont il était le ministre. Il eut droit, après la guerre, à la reconnaissance de nombreuses familles de résistants, qui dans la tragédie, avaient pu reconnaître la grâce du sacerdoce. Dans les circonstances de la guerre, un Allemand fut ainsi le signe que l’appartenance à l’Église du Christ dépassait les pires conflits et surtout les haines inexpiables de l’époque.
Mais l’abbé Franz Stock ne devait pas en rester là. Fait prisonnier au moment de la Libération en tant qu’Allemand, il bénéficia d’une autorisation qui lui permit de fonder et de diriger ce qu’on appela le Séminaire des barbelés. En effet, des centaines de séminaristes allemands, eux-mêmes soldats prisonniers, furent regroupés dans un camp, auprès de Chartres, pour se préparer au sacerdoce. Le futur pape Jean XXIII, qui était alors nonce à Paris, protégea le Séminaire des barbelés et lui rendit visite. Pour lui, ce séminaire était l’honneur de l’Église de France et de l’Église d’Allemagne. Mais Franz Stock devait mourir à l’âge de 44 ans. Comment ne pas honorer une telle mémoire ? Joseph Folliet, ce bon journaliste catholique, a pu écrire de lui : « Je crois qu’il n’existe que de rares destinées chrétiennes qui témoignent de l’universalité de l’Église et de la Paix du Christ, d’une façon aussi permanente et durable que celle de Franz Stock. »
Sa cause de béatification est en route. Un hommage lui a donc été rendu samedi à Chartres dans l’église Saint-Jean-Baptiste-de-Rechèvres où se trouve sa tombe. Mgr Jacques Perrier, lui-même ancien évêque de Chartres, est très attaché à celui dont il a écrit la vie, a évoqué sa mémoire, entouré d’une foule de fidèles qui savaient que Franz Stock est une des plus belles figures de l’Église au XXe siècle.