Il est un livre que je relis tous les ans, Jean-Paul II, témoin de l’espérance, biographie de Karol Wojtyla par George Weigel. Un homme remarquable — le saint homme qui deviendrait le Bienheureux Jean-Paul II — qui brille dans ce récit limpide, mais aussi un évêque remarquable. Wojtyla devint évêque auxiliaire de Cracovie, en Pologne (1958), archevêque de Cracovie (1963), et enfin pape et évêque de Rome le 16 octobre 1978.
Il fut d’abord un évêque sous la chape de l’oppression communiste dans son pays. Et dans cette situation vicieuse il s’accrocha à la vérité en toutes circonstances. Weigel insiste: « Pour lui, l’épiscopat est avant tout une question de prédication et d’enseignement. » Son épiscopat est édifiant car il prenait terriblement à cœur le mystère de l’Incarnation. En toutes circonstances le Verbe se faisait chair.
Avec persévérance et grands efforts Wojtyla s’imprégna de la compréhension de son rôle dans la vie intellectuelle et culturelle de Cracovie: « Il était un patriote polonais dans une cité où l’Histoire de la nation était enchâssée dans la cathédrale.» Il était à la fois un écrivain et « un prêtre, évêque dans une cité grande porteuse du témoignage de la foi ». Exemple vivant de l’intégration de l’Église et du pays, il la percevait intellectuellement. Il devait personnifier pour son peuple cette vivante intégration; sinon, qui l’aurait fait ?
L’Incarnation concernait Dieu et l’Histoire de l’homme. En Wojtyla vivait un homme exemple remarquable de cette intégration. Il se savait successeur de « grands témoins de la foi, Saint Stanislas, un exemple pour ses successeurs… Piotr Skarga, prédicateur du XVI ème siècle pour le renouveau national par le renouveau spirituel… Adam Stephan Sapieha » son prédécesseur en sainteté. Tous vivaient une union de la dévotion aux saints avec la vie intellectuelle. Pour Wojtyla cette intégration se faisait grâce à sa discipline spirituelle: « Wojtyla était un évêque gouvernant son diocèse (et pratiquant la philosophie et la théologie) « agenouillé » — ou à sa table de travail en la présence sacramentelle de son Seigneur.» Et il y réussit dans un diocèse comptant un million et demi de catholiques.
Wojtyla gardait en permanence le contact avec les milieux intellectuels à qui il s’adressait en égal. Il touchait les paroisses, les étudiants d’université, le monde des travailleurs. Alors que les autorités interdisaient la construction d’une église dans la ville nouvelle de Nova Huta, il décida d’y célébrer la Messe de minuit chaque Noël. Les autorités finirent par céder, et l’église fut consacrée en 1977. Lors de la messe inaugurale, il déclara: « les habitants de cette cité ne sont pas abandonnés, nul ne peut leur faire subir quoi que ce soit. C’est la cité des enfants de Dieu. »
Point de vue frappant, sans doute surprenant, montrant son sens profond de la vraie solidarité entre enfants de Dieu même lorsqu’ils étaient soumis au mode de vie — on ne peut dire « culture » — hostile et brutalement matérialiste du régime communiste. La règle communiste était « division et conquête ». Au lieu de quoi Wojtyla apportait à son diocèse l’unité, la mise en pratique du Corps du Christ. Il la vivait lui-même, ne manquant jamais l’occasion de l’exprimer. Son comportement prenait racine dans le dogme de l’Église sur la nature humaine du Divin Fils. Et c’était manifesté lors des centaines de célébrations eucharistiques, de processions eucharistiques, de distribution de pain béni à Noël [NDT: Oplatek, tradition dans les pays Baltes et en Pologne], et tant d’autres occasions.
Ironie du sort, les horreurs de l’occupation nazie ont aidé Wojtyla à acquérir ce comportement. Très tôt il a appris comment accomplir son devoir, quoi qu’il arrive. C’est une leçon que nous devons retenir chez nous en Amérique. Les interventions gouvernementales dans la vie de l’Église et un sécularisme agressif se sont rapidement développés au cours des dernières décennies. Mais une réaction courageuse et complète est à venir.
Wojtyla participa à toutes les sessions du Concile Vatican II; non seulement il fit de remarquables contributions, mais il s’assura que son diocèse étudiait et comprenait précisément ce que le Concile avait à dire. Il prononça pendant le concile plusieurs allocutions radiodiffusées à Cracovie. Il travailla également avec des journalistes polonais, les encourageant à chercher en profondeur la signification du Concile, à l’inverse de leurs confrères occidentaux. Nombre de groupes de travail qu’il avait lancés alors poursuivent actuellement leurs études. Il ne s’est jamais produit à Cracovie de ruptures ou de chicanes après le Concile, comme c’est survenu en de nombreux endroits du globe.
Pour celui qui deviendrait le Bienheureux Jean-Paul, le Concile a été un « immense cadeau à l’Église, à tous ses participants, à toute la famille des hommes ». On ne trouve chez Wojtyla aucune concession au confortable matérialisme et au sécularisme grandissant qui nous envahissent en Occident. Le Verbe incarné, c’est le Verbe incarné. Un évêque véritable se tient au Verbe, et ne s’en excuse pas. Wojtyla a su montrer que c’est possible, même dans des circonstances défavorables, et comment.
— – Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/karol-wojta-bishop.html
— – Source : http://www.thecatholicthing.org/columns/2011/karol-wojta-bishop.html
Pour aller plus loin :
- Vladimir Ghika : le contexte politique avant la guerre de 1914-1918
- Le défi du développement des peuples et le pacte de Marrakech - la fuite en avant des Nations Unies
- VEILLEE A LA BEATIFICATION
- Saint Jean XXIII et saint Jean-Paul II dans une histoire commune
- LE MINISTERE DE MGR GHIKA EN ROUMANIE (1940 – 1954)