Trop tard, pour nous souhaiter notre fête à nous journalistes ! La Saint-François-de-Sales c’était hier. Hélas, la tradition de la messe annuelle qui rassemblait la profession s’est perdue. C’était pourtant l’occasion de réfléchir, d’une façon un peu décalée, à notre métier. J’ai le souvenir, à ce propos, d’une homélie du cardinal Lustiger, qui rétablissait la hiérarchie. Il préférait parler de chrétiens journalistes plutôt que de journalistes chrétiens, me semble-t-il. Car l’adjectif n’avait pas la même valeur que le substantif, qui seul donnait son sens à l’expression. On peut évidemment objecter à cela que le fait d’être chrétien ne dispense pas des qualités de sérieux, de pertinence voire de talent propres à la profession. Mais il est vrai aussi que l’adjectif ne saurait être purement décoratif et qu’il y a une différence chrétienne qui peut modifier substantiellement l’exercice d’une profession.
Reste que dans la vie quotidienne, cette profession se trouve bousculée par les conditions nouvelles qui n’existaient pas dans le passé. C’est une banalité de se référer aux réseaux sociaux qui exercent, désormais, un pouvoir que l’on peut trouver excessif, souvent contaminé par une mentalité complotiste. Ce n’est plus supportable lorsque c’est au prix de la liberté d’expression. Ainsi, un caricaturiste du Monde, Xavier Gorce, vient-il de démissionner du quotidien où il publiait ses dessins depuis une vingtaine d’années. Il avait provoqué la colère des réseaux sociaux en question par une provocation délibérée, ce qui lui avait valu d’être désavoué par sa direction.
L’incident est révélateur. Ce n’était pas la peine de proclamer sur tous les tons « Je suis Charlie » organe de la provocation hebdomadaire, si c’est pour abdiquer son indépendance face au diktat de ce qu’un collègue appelle « la meute numérique ».