Si le mois de mai, dévolu à la dévotion à la Vierge Marie, nous incite spontanément à méditer le mystère propre à la femme dans l’économie divine, la canonisation de Jean-Paul II nous permet de le reconsidérer avec l’insistance de celui qui, à la suite de saint Louis-Marie Grignion de Montfort s’était voulu tout entier voué à la Vierge sainte, Mère du Sauveur. Or cette orientation de la théologie s’insère aujourd’hui dans une remise en cause générale du statut des sexes et dans le contexte des « études de genre ». De ce point de vue, le charisme marial est souvent mal perçu, dans la mesure où il insiste sur la vocation particulière de la femme. Une tribune d’une rare violence a été publiée à ce sujet contre Jean-Paul II sur lemonde.fr (2 mai 2014) sous la signature d’Anne Soupa (présidente du Comité de la jupe). Sa conclusion est sans appel : « Comme le différentialisme prôné par les Blancs américains envers leurs concitoyens Noirs, le différentialisme catholique initié par Jean-Paul II se révèle être d’abord un combat pour ne pas reconnaître aux “différents” le statut de sujet. »
L’outrance et la violence d’un tel propos pourraient conduire à passer son chemin, si la question posée n’avait une réelle importance. Car de l’accusation lancée contre le saint pape, on pourrait rapprocher une affirmation tirée du Deuxième sexe de Simone de Beauvoir, laquelle inspire visiblement notre polémiste: « Peut-être le mythe de la femme s’éteindra-t-il un jour. Plus les femmes s’affirment comme des êtres humains, plus la merveilleuse qualité de l’Autre meurt en elle. » Le féminisme beauvoirien a été précisément récusé chez nous par une Antoinette Fouque, qui voulait défendre l’éternel féminin contre ses détracteurs. On peut très bien reconnaître la différence féminine en militant pour la promotion sociale de la femme. La promotion, ce n’est pas seulement la possibilité pour cette dernière « d’être un homme comme les autres », mais d’affirmer une charge symbolique qui peine à être reconnue tout autant dans un univers lourdement masculin que dans une culture homosexuelle qui méconnaît la nécessité de l’échange et de l’équilibre des sexes. Qui connaît de près la vie de Jean-Paul II perçoit le ridicule de l’accusation d’avoir voulu empêcher les femmes d’être d’authentiques sujets. Déjà en Pologne, il n’avait cessé d’encourager les jeunes filles et les jeunes femmes à affirmer leur personnalité dans le cadre d’un mariage sacramentel puissamment reconsidéré et rénové. Celui qui canonisa Edith Stein et se sentait si amicalement proche d’une Geneviève de Gaulle, savait à quel point le génie féminin, dans la lumière du culte marial, permettait à l’humanité de respirer et de vivre sous le signe d’un amour généreusement donné.