Jean Le Cour Grandmaison : Ses Pères dans l'Église - de Janvier à Daniélou. - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Jean Le Cour Grandmaison : Ses Pères dans l’Église – de Janvier à Daniélou.

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Jean le Cour Grandmaison est un pacificateur, un conciliateur-né. Il n’aime pas le conflit, la division entre catholiques. Il recherche toujours le Bien Commun au-delà des divergences temporelles. Sa période de référence correspond à la première des divisions de son milieu : le ralliement à la République prôné par le pape Léon XIII en 1892 dans sa lettre « Au milieu des sollicitudes ». Les meilleurs amis du monde choisirent des chemins opposés. Et pourtant, témoignera sans relâche Jean Le Cour Grandmaison, ils purent rester amis et travailler ensemble à une œuvre commune. Albert de Mun, « catholique avant tout », acceptera le ralliement. Charles Le Cour Grandmaison, son grand ami, et père de Jean, restera au service des princes. Qu’importe, ils continueront à porter ensemble la doctrine sociale inaugurée par le même pape Léon XIII dans son encyclique « Rerum novarum » de 1891. Les deux textes, la lettre aux Français, et la lettre aux ouvriers, n’ont pas le même statut « canonique » !

Sur le même sujet, idem en 1926, mais réponse apparemment opposée. Jean Le Cour Grandmaison se soumettra au pape Pie XI lors de la condamnation de l’Action française parce que même s’il est et reste monarchiste, il est « catholique avant tout ». Les plus engagés dans la conciliation, le R.P. Janvier, o.p. et le R.P. La Brière, s.j., feront de même sans hésiter. Pour l’Eglise, Jean Le Cour comprend la priorité donnée par le pape à l’Action catholique sur l’Action française. On a parlé alors de « second ralliement » (Frédéric Bouthillon), mais il faut bien distinguer :

Le premier ralliement a fait long feu. Les républicains laïques n’ont pas accepté ces catholiques ralliés. Ces derniers n’ont pas entraîné les foules catholiques. Les premiers durcissent leur « laïcisme » pour empêcher toute contagion : loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat.

Le second ralliement s’est produit à une période d’apaisement religieux. Pour la première fois en 1930, des républicains catholiques entrent au gouvernement. Le conflit avec l’arrivée des communistes se durcit autour des questions économiques, sociales et internationales.

Les catholiques sont donc toujours pris à contre-pied.

Jean Le Cour Grandmaison n’a pas attendu 1924 pour s’apercevoir que le Bloc national qui domine la Chambre bleu-horizon n’est pas la victoire des catholiques ! L’union nationale est non seulement républicaine (sauf dans son département) mais elle reste inébranlablement « laïque ». Cela, Jean le dit ouvertement à Guérande dès décembre 1921. Les catholiques ont obtenu le rétablissement de l’ambassade de France auprès du Saint-Siège, mais ce sera pour solde de tout compte. Le bloc national n’est pas moins laïque en 1921 qu’avant la guerre, y compris Poincaré que la droite catholique continuera de soutenir contre l’Allemagne et pour la défense du Franc. Castelnau siège d’ailleurs à l’Alliance républicaine (son frère aîné Léonce siégeait avant- guerre comme rallié). Il restera toujours proche de la même droite républicaine et nationale des Louis Marin, François de Wendel, Henri de Kérillis, la bande de « L’Écho de Paris ».

Le combat de Castelnau en réaction au Cartel des Gauches ne surprend donc pas Le Cour Grandmaison qui l’a préempté tout au long de cette première législature. A part l’ambassade vaticane, les cabinets nationaux-républicains n’ont fait entre 1919 et 1924 aucune concession notable aux catholiques. La droite parlementaire n’est pas la solution qui sera donc extraparlementaire : la Fédération nationale catholique. Mais pas anti-parlementaire : la F.N.C. a bien compris que le combat n’est pas perdu dans le pays si les catholiques savent s’organiser et peser lors des élections, pari presque gagné en 1928. La F.N.C. n’est pas et ne sera pas une ligue.

Jean Le Cour Grandmaison a un pied dedans un pied dehors. Il est le seul à la Chambre à tenir le même langage à la tribune et chaque dimanche dans les assemblées diocésaines où il s’affiche sur les parvis et les estrades aux côtés des évêques, les ordinaires du lieu de réunion, et les orateurs attitrés du mouvement, trois principalement, l’abbé Bergey, son collègue de la Chambre, le R.P. Doncoeur et le R.P. Janvier. Les deux premiers sont des anciens combattants prestigieux qui ont fondé la D.R.A.C. (droits des religieux anciens combattants). Jean partage leur fierté d’ancien combattant qu’il fut aussi. Le R. P. Janvier, c’est autre chose, c’est le Père Joseph, l’éminence grise de l’épiscopat français mais aussi le fondateur du tiers-ordre auquel il a introduit Jean en mars 1926.

Se pose ici la question sensible de la nature de la Fédération et de sa pérennité.

Que la législation laïque soit durcie à nouveau comme l’annonce Herriot lors de son investiture en avril 1924, la tentative fait long feu puisqu’il doit quitter ses fonctions dès avril suivant. Jean Le Cour Grandmaison posera inlassablement la même question, en 1927, en 1928, en 1930, en 1936, en 1938, trop souvent pour que ce soit plus qu’un leitmotiv : pourquoi continuer ? Continuer pour quoi faire ?

Il y a bien entendu la question de l’enseignement catholique, puis celle de la jeunesse ouvrière et du syndicalisme qui le passionne de plus en plus. Il se rend compte que le national-catholicisme de Castelnau le coupe de l’approche catholique plus ouverte sur la société des nations, le désarmement (qu’il suit attentivement côté naval), la subsidiarité, le corporatisme, dont on parle de plus en plus dans les meilleures revues catholiques comme la jésuite « Etudes » sous la direction du R.P. du Passage, qui succédera en 1939 au R.P. Janvier comme aumonier national de la F.N.C. (resté à Paris, il sera assisté par un confrère jésuite, Ferdinand Cavallera, à Toulouse pendant toute la guerre). Aux « Etudes », c’est le R.P. Yves La Brière qui suit les questions politiques, servit d’intermédiaire en 1926 entre Rome et la rue de Rome et essaya vainement d’expliquer dans les années trente à un auditoire de droite les bienfaits de la S.D.N. On est loin ici des revues militantes dirigées par des dominicains engagés tels que « Sept » ou « Vie intellectuelle » qui ferraillent en 1937 avec « l’Echo de Paris », plus, il faut le reconnaître, qu’avec la F.N.C. directement.

La famille dominicaine était particulièrement divisée et de celle-ci Jean Le Cour Grandmaison n’en connaît bien que la province de Toulouse qui l’accueille régulièrement en retraite à Saint-Maximin, Biarritz ou Toulouse même : les R.P. Lacômme, Nicolas et Philippon, que la non-soumission en 1926 de leur supérieur, le R.P. Thomas Pègues, sur l’affaire de l’Action française, avait mis en position difficile et qui avaient choisi de sortir par le haut, la voie théologique et spirituelle. Le Cour Grandmaison les suit.

C’est ainsi que comme en 1921 Jean anticipera sur le Front populaire et le communisme dont il ne craindra donc pas en 1936/37 de relever le défi là où d’autres pensaient guerre civile. Il se lie alors avec des aumôniers de la J.O.C. comme l’abbé Jean Rodhain dont il restera l’ami proche sous Vichy puis au Secours catholique.

A partir de 1945, ses fonctions le mettront évidemment en contact avec toute l’Eglise de France, l’ensemble des évêques mais aussi un nombre incalculable de curés de paroisse soit par correspondance soit lors des congrès nationaux où il fera appel à leur témoignage pour illustrer les expériences de mission.

Les aumoniers nationaux de la FNAC seront eux-mêmes choisis parmi des pasteurs, curés de paroisse, les abbés Michel Guinchat et Jean Protat, ou leurs adjoints, les abbés Pierre Jobit et Muller. Depuis 1931 son interlocuteur privilégié avait été le chanoine Courbe, secrétaire des œuvres sociales du diocèse de Paris, responsable de l’Action catholique de France (ACF), promu évêque auxiliaire de Paris en 1943, et qui restera en charge de la F.N.A.C. jusqu’en 1958 (remplacé par Mgr Ménager, alors auxiliaire à Versailles). Celui-ci est un administrateur mais non un de ces grands orateurs publics auxquels il avait été habitué.

Au Congrès national de mai 1953, il est fait appel à Jean Daniélou qui développe les fondements bibliques et théologiques de la communauté ecclésiale, conférence reproduite par « la France catholique » en septembre et Octobre. Jean de Fabrègues salue alors (juin 1953) l’auteur de l’ « Essai sur le mystère de l’Histoire » (paru en 1952). Le même Daniélou enchaîne le mois suivant au Congrès pour la paix sous l’égide de Giorgio La Pira, maire « franciscain » de Florence. En 1954, Jean Le Cour donnait à Florence la priorité sur Genève où se tenait une conférence de paix sur l’Indochine. La Pira sera longuement interviewé en 1958 par le rédacteur-en-chef d’alors, L-H. Parias. Avec Daniélou, le relai est pris même si Jean Le Cour Grandmaison voit désormais les choses de plus loin. Encore quelques années et son entourage sera bénédictin ! Il verra cependant sans déplaisir Jean Daniélou poursuivre avec « l’oraison problème politique » (1965) le combat catholique dont il avait retrouvé le goût à la lecture du « Paysan de la Garonne » de Jacques Maritain, qui paraît en décembre 1966.

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INDEX

Bergey (Daniel) 1881-1950, député de Gironde de 1924 à 1936.

Blazy (Dom Marcel) 1902-1994, Abbé de l’abbaye bénédictine de Kergonan de 1963 à 1983, sa biographie par Dom Xavier Perrin, Téqui, 1998

Doncoeur (Paul) s.j. 1880-1961, sa biographie par Dominique Avon, « Paul
Doncoeur, un croisé dans le siècle », Cerf, 2001

Janvier (Albert) o.p. 1860-1939, conférencier de carême à Notre-Dame de Paris pendant 14 ans.

Du Passage (Henri) s.j. 1874-1963, directeur des « Etudes » de 1929 à 1940, successeur du P. Léonce de Grandmaison

De La Brière (Yves) s.j. 1877-1941, « les mouvements catholiques pour la paix à travers les papiers du Père Yves de la Brière », Bruno Goyet et Emmanuelle Picard, Matériaux pour l’histoire de notre temps, n°30, 1993

Lacômme (Hyacinthe) o.p. 1859-1945, régent des études à St-Maximin, André Laudouze, « Dominicains français et Action française », éd. Ouvrières, 1990

Nicolas (Marie-Joseph) o.p. 1906-1999, prieur de la province de Toulouse de 1946 à 1954

Philippon (Marie-Michel) o.p. 1898-1972, professeur à St-Maximin puis à Toulouse, expert à Vatican II, spécialiste de Ste Thérèse de Lisieux

Daniélou (Jean) s.j. 1905-1974, professeur à l’Institut catholique de Paris, cardinal en 1969, élu à l’Académie française en 1972

Rodhain (Jean) 1900-1977, aumônier J.O.C., puis du S.T.O., des prisonniers de guerre, maintenu en 1945 par le général de Gaulle, fondateur du Secours Catholique, président de Caritas international.

Courbe (Stanislas), 1886-1971, responsable de l’Action Catholique générale de 1931 à 1958