Jean d’Ormesson et Johnny Hallyday, « Jean d’O » et Johnny. L’académicien non-conformiste et le saltimbanque inventif. L’aristocrate dilettante et le va-nu-pieds acharné. L’enfant gâté de la haute société et l’enfant perdu d’un père absent. L’homme entouré de bonnes fées et celui qui dut se faire lui-même. L’enfant terrible de la noblesse du « Côté de Guermantes » et le forçat stupéfiant du « show-business ».
Ces dernières années, l’un fut un vieil homme souriant d’une vitalité surprenante, et l’autre un artiste émérite luttant héroïquement contre un cancer. Et de longue date, Jean d’O, l’esprit sceptique mais ouvert qui acceptait de parier sur l’Espérance, et Johnny, l’adepte inébranlable d’une humble foi chrétienne jamais démentie. Tous deux ont été happés par la mort, rendant leur âme à Dieu. L’un après l’autre, à une journée d’intervalle.
La France a exprimé son chagrin. Pour Jean d’Ormesson, dans la cour des Invalides, c’était l’hommage des corps constitués, du Président de la République aux « Immortels » de l’Académie française, pour cet écrivain enchanteur devenu leur doyen après avoir été leur cadet… Répondant à son vœu, Emmanuel Macron a posé sur son cercueil un crayon, « le crayon des enchantements ».
Pour Johnny Hallyday, ce chanteur à la voix puissante, après un impeccable défilé de motos sur les Champs-Elysées, la messe solennelle d’un Requiem rempli d’espérance, en l’église de la Madeleine. Devant près d’un million de « fans » jusque sur la Place de la Concorde, et plusieurs millions de téléspectateurs stupéfaits et bouleversés.
Après un éloge funèbre du Président de la République sur le parvis de l’église, cette messe a été dite devant le Tout-Paris du monde du spectacle et les représentants de l’Etat. Dans un silence absolu, observé jusque dans les rues par la foule immense des fans et des amis de Johnny. Pour celui qui était « une force qui va », comme l’a dit Emmanuel Macron citant Victor Hugo. Mais aussi pour un croyant.
Devant son épouse Laeticia qui, très digne, portait sur elle la croix de son mari, devant sa famille, on a salué l’esprit d’enfance de Johnny Hallyday. Un homme bienveillant doté de « la faculté de pardon », dont le maître-mot était « amour ». Un homme qui, mourant, a levé les yeux au ciel. Le jour de l’adieu de ses amis, au-dessus de la capitale d’une France qui se souvenait de son baptême, le ciel était d’un azur serein et doux.