L’information est passée presque inaperçue. Il y a quelques jours, une « brève » de La Croix annonçait l’ouverture du procès de béatification de Jacques et Raïssa Maritain. Elle ne peut, pourtant, que nous toucher profondément en tant que catholiques français, gardant en mémoire la mission accomplie au vingtième siècle par ce couple de convertis, voués à l’intelligence du mystère de la foi dans les défis de la modernité. L’histoire est encore proche de nous, mais ceux qui ont vécu la canonisation d’un curé d’Ars ou d’une Thérèse de Lisieux ont pu avoir ce même sentiment de familiarité. Les saints ne sont pas seulement les figures légendaires d’un passé lointain. Ce fut un des mérites de Vatican II que de proclamer la vocation universelle des baptisés à la sainteté. Le concile signifiait par là qu’il ne s’agissait nullement d’une sorte de privilège aristocratique. L’entrée dans la communion baptismale destine chaque fidèle à vivre de la sainteté même de Dieu.
Sans doute y a-t-il des figures éminentes. Celles qui sont distinguées par l’Église à travers les déclarations solennelles de béatification et de canonisation. Celles-ci nous servent de modèles et d’intermédiaires. Le fait que soient désignés de quasi-contemporains permet une proximité bienfaisante à tous. Les saints sont parmi nous, ils vivent de notre destin commun, ils sont confrontés à nos propres difficultés. Ils ont des qualités éminentes, mais ce ne sont pas des surhommes. Ils peuvent avoir des défauts, ils sont mêlés aux querelles de leur temps. On n’est pas toujours tenu de se reconnaître dans toutes leurs positions.
Mais une différence notable les distingue, c’est d’avoir fait le choix suprême de la charité, et d’avoir, en toutes occasions, donné la première place à Dieu, lumière de leur intelligence et de leur cœur. Jacques et Raïssa Maritain nous ont donné cet exemple admirable de consécration totale. Que l’Église veuille leur en rendre hommage ne nous étonne pas et suscite notre reconnaissance.