Après le cauchemar de Daesh, l’Irak se relève de ses cendres et beaucoup de chrétiens qui avaient fuis les régions contrôlées par les djihadistes reviennent chez eux. Pourtant, leur courage et l’espoir qu’il suscite ne doit pas cacher la réalité vécue par les minorités religieuses. Le cardinal Sako, Patriarche de l’Église chaldéenne, rappelle que sa communauté continue d’être discriminée. Il craint ouvertement que le petit reste des chrétiens irakiens ne finisse par choisir l’émigration, pour le plus grand malheur de son pays. Il en appelle donc à son gouvernement, pour qu’il fasse respecter leurs droits. « L’absence de mesures sérieuses » pour protéger les droits des religions minoritaires dans le pays, a-t-il déclaré à l’Aide à l’Église en Détresse, « poussera le reste des chrétiens et les minorités à choisir l’émigration ».
Il a énuméré un certain nombre de facteurs qui poussent les chrétiens et les autres minorités à quitter le pays. Il s’agit notamment de la « fragilité de la situation sécuritaire » et de la « faiblesse institutionnelle de l’Irak en matière de justice », de l’incapacité de l’État à protéger les non-musulmans contre la discrimination dans les domaines de « l’éducation, l’emploi et la vie sociale », ainsi qu’au niveau politique.
Une grande perte pour l’Irak
Le Cardinal déplore que des chrétiens exceptionnellement compétents au niveau professionnel se voient refuser des postes, uniquement à cause de leur foi. Ce sont « la qualification et la compétence », a insisté le Cardinal, et non la religion d’un individu, qui devraient être des « critères d’embauche ».
Or, souligne-t-il, les chrétiens et les minorités « ont joué un rôle important en enrichissant la diversité culturelle, sociale et économique de l’Irak, en faisant de précieuses contributions à l’éducation, à la santé, à l’administration publique et aux services sociaux (…) Sans eux, l’Irak deviendrait un pays uniformisé [qui] pourrait s’isoler du monde et [qui] pourrait engendrer une sorte de radicalisme [et] de fanatisme ethnique et sectaire. »
Pour s’opposer à cette situation qui nuit à tout le pays, il propose avant toute chose d’appliquer la législation irakienne, qui donne des droits aux chrétiens. Il fait observer, notamment, que les chrétiens sont privés de leur quota légitime de cinq sièges au parlement. Il a également appelé à l’application d’un « droit civil pour tous les Irakiens », plutôt qu’à la soumission des chrétiens et des autres minorités religieuses « à un Tribunal islamique en ce qui concerne les questions spirituelles, religieuses, maritales, successorales, … »
Mesures concrètes
Le Patriarche Sako a proposé un certain nombre de « mesures concrètes » supplémentaires pour lutter contre « les injustices et la discrimination » subies par les minorités religieuses. Il a appelé les autorités à combattre « l’extrémisme religieux qui fait usage de la violence » et à prendre des mesures pour « désarmer les milices, assurer la sécurité et la stabilité, lutter contre l’extrémisme, la discrimination, le terrorisme et la corruption ».
Enfin, le Patriarche a appelé à l’adoption de lois qui contribuent à créer « de bonnes conditions qui garantissent aux chrétiens et aux autres minorités religieuses… la pleine citoyenneté et la liberté de pratiquer leurs religions de façon explicite, de préserver leur patrimoine, les monuments archéologiques et historiques comme une partie intégrante de la civilisation irakienne, afin de leur permettre de continuer à vivre dignement ».