La pratique synodale dans l’Église s’identifie à son histoire même. Il suffit de consulter les spécialistes pour le comprendre, si complexes soient par ailleurs son exercice et son autorité. Ainsi que l’écrit Marie-Françoise Baslez : « Le contexte a créé le besoin. Dans les premiers siècles de la pratique synodale, à la fin du IIe siècle, il s’agissait de gérer des divergences doctrinales dans ce bouillonnement d’idées et de théories qui caractérise l’époque. » (Comment les chrétiens sont devenus catholiques ?, Tallandier.)
Primauté romaine
Précisément, il s’agit de viser l’unité ecclésiale. Le synode est « un palier intermédiaire qui permet aux Églises locales de s’intégrer à l’universel ». Sans doute, l’Église du XXIe siècle est-elle structurée plus efficacement que celle des origines, avec l’affirmation de la primauté romaine et ses effets de juridiction universelle. Mais l’organisation issue de Vatican II a facilité un retour à la pratique régionale des synodes. Est-ce au risque d’un affaiblissement de l’unité ? Ce qui se passe à l’heure actuelle pour l’Église en Allemagne pourrait le faire craindre.
Le 29 juin dernier, le Pape écrivait dans une lettre envoyée « au peuple de Dieu pèlerin en Allemagne » : « Chaque fois qu’une communauté ecclésiale a cherché à sortir de ses problèmes toute seule, en se confiant seulement à ses propres forces, à ses propres méthodes et à sa propre intelligence, elle a fini par multiplier et alimenter les maux qu’elle voulait surmonter. » C’est en pleine connaissance de cause que François s’est permis d’énoncer un avertissement si grave, rappelant avec force le sensus ecclesiæ, parce que « le chemin entrepris ne doit pas finir isolé dans la particularité ». Le cardinal Reinhard Marx, président de la Conférence épiscopale allemande, a tenu à assurer le Pape et les autorités romaines, notamment le cardinal Marc Ouellet, de son sens ecclésial et de son souci de l’unité de toute l’Église. Il n’empêche que le malaise est bien réel.
Prier intensément pour l’Église
Sans doute s’explique-t-il d’abord par la crise subie à la suite de la révélation des scandales sexuels, qui a affecté le pays avec une particulière violence. Cette crise justifie-t-elle pour autant une remise en question des structures d’autorité, de la discipline des mœurs, avec la perspective de ruptures avec la Tradition ?
On ne peut faire abstraction d’un glissement doctrinal qui a déjà affecté une certaine théologie, de la volonté même de s’émanciper de l’enseignement ecclésiologique de Vatican II, en vue d’une mutation pour un néo-christianisme. Celui-là même que dénonçait le Père de Lubac dans sa somme sur la postérité de Joachim de Flore, concernant l’affranchissement de la règle de la foi. On peut espérer que nos amis allemands échapperont aux tentations de la division et de la transgression. Au moment où un autre synode, celui pour l’Amazonie, suscite aussi des craintes, l’heure est venue pour l’ensemble des catholiques de prier intensément en faveur de l’intégrité de leur Église.