Obsèques de François Cavanna au père Lachaise aujourd’hui. Cavanna, vous en avez probablement entendu parler, si vous ne l’avez pas lu dans ses journaux et dans ses livres. Le lire n’était d’ailleurs pas sans intérêt, l’écrivain avait un réel talent et ses souvenirs d’enfance ont une saveur que même les plus rétifs au style Hara-Kiri sont prêts à reconnaître. Mais, me direz-vous, pourquoi m’attarder sur ce personnage qui, visiblement, n’était pas de votre paroisse, alors que l’actualité toute chaude est là qui vous sollicite de la façon la plus urgente ? Tout simplement parce que nul homme en ce monde ne mérite notre désintérêt et parce que celui-là, en particulier, avait une épaisseur d’humanité à laquelle j’étais sensible. Nous étions en désaccord à peu près sur tout, il m’arrivait de détester la littérature et les dessins qu’il accueillait dans ses journaux. Mais c’était tout de même Cavanna, une gueule, une personnalité, l’expression d’un vrai morceau de société qu’il représentait assez bien.
Je ne l’ai rencontré qu’une seule fois. C’était à une fête d’Hara-Kiri où un complice m’avait subrepticement convié avec quelques amis. Le climat était plutôt du genre anar-pas-triste, on y buvait assez franchement. J’avais été surpris de constater que Cavanna n’était pas vraiment de la fête. Il préférait rester dehors en échangeant avec quelques interlocuteurs à l’écart du brouhaha et de la cohue. Il n’avait pas fait la grimace lorsqu’on m’avait présenté à lui, et nous avions aimablement discuté de problèmes de stylistique journalistique.
C’est peu dire qu’il n’aimait pas les curés. C’est vrai qu’il s’en faisait une drôle d’idée et qu’il les associait à la catégorie des bonimenteurs, des astrologues, des devins, ou encore des sorciers ou des guérisseurs. Ça ne m’empêchera pas d’avoir une pensée pour toi ! Adieu Cavanna !