À ce jour, combien de réfugiés ukrainiens la Pologne a-t-elle accueillis ? Je ne sais pas exactement, mais il semble que le chiffre de deux millions ait été dépassé depuis plusieurs jours. Et ce que les témoins nous rapportent de la chaleur de l’accueil qui est réservé à toute cette population exilée est proprement admirable. On s’étonne de la rapidité avec laquelle tout un dispositif a été créé pour faire face sur tous les plans : réconforter, soigner, loger, nourrir tant de monde. Si cela se passait à nos frontières, saurions-nous faire preuve d’autant de générosité, d’ingéniosité et de courage ?
N’est-ce pas l’occasion de saluer cette Pologne qu’il n’y a pas si longtemps on accablait de reproches et qu’on accusait même de xénophobie. Sans doute y a-t-il une grande proximité entre Polonais et Ukrainiens du fait de l’histoire, de la culture et du christianisme. Mais cela n’empêche pas que cette solidarité se paie d’un prix exceptionnel en Europe. Faut-il rappeler que la Pologne demeure un pays catholique avec une pratique religieuse importante et aussi des réseaux caritatifs qui fonctionnent, peut on dire, à plein régime. Qu’on le veuille ou pas, c’est toute une civilisation avec sa culture, son art de vivre, qui se perpétue au pays de ces personnalités exceptionnelles qu’étaient le bienheureux cardinal Wyszynski et saint Jean-Paul II.
Certes, l’époque du pape polonais et celle de l’épopée de Solidarnosc s’éloigne de nous. Et la Pologne elle-même s’est beaucoup transformée depuis qu’elle a recouvré son indépendance. Mais nous sommes en ce moment-même face à une sorte de retour de l’histoire. Tout ne se ramène pas à l’économie, la diplomatie revient en force avec les données de la géopolitique qui refait surface avec des perspectives de réarmement. La Pologne qui a subi trois partages de son territoire – le dernier entre Staline et Hitler ayant provoqué la Seconde Guerre mondiale – sait plus que toute autre nation que l’histoire est tragique et qu’il faut une énergie indomptable pour sortir victorieusement de ses provocations.