Il me faut aujourd’hui m’excuser de la part personnelle que comporte cette chronique, mais il se trouve que le candidat François Hollande a visité mardi une petite ville qui me touche particulièrement, parce qu’elle est celle de ma naissance, de mon enfance, de mes souvenirs familiaux. Qu’elle ait été pour quelques heures sous les feux de l’actualité m’a ému d’autant que Hirson peut-être qualifiée de ville sinistrée. Et c’est d’ailleurs la raison qui a amené le leader socialiste à rencontrer ses habitants pour leur promettre un sort meilleur.
La ville de mon enfance était en relative expansion – c’était la période des Trente glorieuses. La population était en croissance, d’autant que les petites industries locales garantissaient un taux d’emploi appréciable. Mais ce n’était pas une commune riche, les salaires étaient très modestes. Et déjà, on guettait l’avenir avec inquiétude, en considérant la fragilité du tissu industriel et l’exode des jeunes cherchant ailleurs des professions plus rémunératrices. Si l’on observe les courbes statistiques, on constate que le déclin de Hirson a commencé au début de la décennie 80, avec une décélération démographique qui n’a cessé de s’accentuer. De près de 12 000 habitants, la population est passée à moins de 9 500. On me dit que des rues entières sont à vendre, avec leurs maisons désertées. Les entreprises ont fermé les unes après les autres, et la ville a perdu son atout majeur avec la disparition du nœud ferroviaire qui avait été à l’origine de son essor au début du XXe siècle.
On ne s’étonne pas dans ces conditions de l’importance du vote protestataire, qui s’est encore amplifié dimanche dernier, plaçant Marine Le Pen en seconde position pour tout le département de l’Aisne. François Hollande voulait donc réconforter cette population, en choisissant une ville particulièrement représentative de la désindustrialisation et du chômage. A-t-il pour autant les solutions appropriées pour rendre à toute la région, et plus généralement au nord-est de la France, l’élan économique qu’il faudrait? C’est toute la difficulté actuelle, celle qui consiste à transformer la déshérence et la protestation en sursaut salvateur. Hollande s’en expliquera avec Sarkozy. Ce n’est pas gagné d’avance !