Gabbatha de Fabrice Hadjadj : le théâtre au service de la Parole - France Catholique
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Funérailles catholiques : un temps de conversion
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Gabbatha de Fabrice Hadjadj : le théâtre au service de la Parole

La Compagnie du Caillou Blanc rejoue, jusqu'au 17 février, la pièce de Fabrice Hadjadj « Gabbatha », à l'espace Georges Bernanos. L'occasion pour nous de revenir sur cette tragi-comédie, brillante et émouvante. Celle-ci nous emmène en chemin vers Pâques à la suite d'un auteur moderne et profond servi par des acteurs excellents dans une mise en scène qui ne cesse de s'affiner.
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Vous rejouez la pièce de Fabrice Hadjadj, Gabbatha, une deuxième année de suite, en ce début de carême, à l’espace Georges Bernanos. Pouvez-vous nous raconter cette aventure ?

Michel-Olivier Michel : À la demande des éditions du Cerf, Fabrice (Hadjadj) a écrit Gabbatha en 2003 à partir du polyptique du peintre Arcabas sur la Passion et la Résurrection du Christ. Dès que j’ai lu le texte, j’ai été frappé par l’approche décalée entre le sujet éminemment solennel et le traitement proche du café-théâtre que Fabrice avait choisi, dans lequel il faisait intervenir des personnages insolites : des clowns, un démon, un ange, des vieilles dames, une prostituée, etc. Je trouvais qu’il y avait là une nouvelle forme théâtrale, une sorte de « cabaret mystique » et je me suis dit qu’il fallait absolument en faire un spectacle. C’est ce que nous avons fait, pour le carême l’année dernière avec Véronique (Ebel). Nous avons choisi sept tableaux sur vingt-quatre, ceux qui nous paraissaient les plus emblématiques de la Passion et de la Résurrection. Il s’agissait d’endosser à deux tous les personnages, excepté celui du coryphée interprété par Golchehr (Damghani) qui dit les Évangiles, et de se transformer devant les spectateurs.

En revoyant la scène de l’espace Bernanos, et vu la manière dont nous avions abordé la scénographie avec la projection des tableaux sur des panneaux de bois, nous avons voulu tenter l’aventure. Nous avons alors proposé l’idée au nouveau directeur de l’espace Georges Bernanos, le père Xavier Lefebvre qui a tout de suite été d’accord.

Le lavement des pieds
Le lavement des pieds

Les scènes que vous jouez sont très diverses, n’est-il pas difficile, en tant qu’acteur de passer de l’une à l’autre ?

Véronique Ebel : Ce n’est pas si difficile parce qu’on les aborde d’une manière « café-théâtre ». Un peu comme des sketches plus que comme des scènes dramatiques dans lesquelles il faut un certain temps pour rentrer. Là on se jette dedans et puis on est obligé d’être dans le personnage tout de suite… C’est sûr qu’il faut de l’énergie.

M.-O. Michel : Il faut avoir, à chaque début de scène, un objectif très clair, très précis. Est-ce que c’est difficile ? C’est très physique mais j’aime beaucoup en tout cas.

V. Ebel : Je trouve ça jubilatoire.

M.-O. Michel : Oui, il y a une vraie jubilation à varier les personnages à pouvoir passer d’une adorable grand-mère qui s’émerveille devant le mystère de l’eucharistie, qui redécouvre la folie d’un Dieu qui se donne à manger, à un démon qui séduit sa proie pour mieux se l’approprier, puis à un ange qui s’épuise à faire entrer les humbles au paradis… Même dans l’interprétation des personnages, on suit vraiment cette Passion Résurrection. Il y a un mouvement un peu comme pour les mystères joyeux, douloureux, et glorieux.

Durant le spectacle, un coryphée proclame la Parole de l’Évangile. Quel est le lien entre ces passages d’Évangile et les scènes ?

Golchehr Damghani : On a souhaité cette année modifier la place du coryphée pour mieux mettre en valeur la parole de Dieu autour desquelles s’organisent les scènes.

M.-O. Michel : La Parole est au centre. De cette Parole que Golchehr prend en charge surgissent les tableaux magnifiques d’Arcabas d’où jaillissent les personnages que nous interprétons avec Véronique.

Comment dire la Parole sur une scène de théâtre ? On a l’habitude de l’entendre à l’église. Et tout à coup cette Parole est proclamée dans un lieu qui n’est a priori pas fait pour. C’est une vraie question que l’on s’est posée : comment doit-elle être transmise sur un plateau de théâtre ? Doit-elle être lue, jouée, proclamée ? Pour que celle-ci parvienne, il nous a semblé que la simplicité était une bonne piste.

Clowns
Clowns

Et quel est le rôle de la Parole dans la pièce  ?

M.-O. Michel : Toutes les scènes sont des méditations sur la Parole. Ce qui m’a frappé dans ce texte, c’est que la Parole est abordée sous un angle auquel nous ne sommes pas habitués.

V. Ebel : Un angle vraiment théâtral, mais aussi burlesque.

M.-O. Michel : Burlesque et tragique. Ce qui me paraît très intéressant dans ce qu’a écrit Fabrice, c’est comme s’il s’était mis à la place d’un enfant devant ces tableaux et qu’il découvrait la Parole pour la première fois. Et cela donne des situations cocasses et terribles : au sein d’une même scène, l’univers de Tex Avery, du cirque et de la farce côtoie celui du drame le plus absolu.

Je trouve ça très intéressant comme manière d’appréhender la Parole. Le rire et parfois l’effroi, que ce décalage provoque, me paraissent très justes. Le rire s’il n’est pas associé à la moquerie n’est jamais irrespectueux. Rire c’est libérateur. Comme disait Molière, la fonction du théâtre est de purger les spectateurs dans un grand éclat de rire. Ici, Fabrice soulève nos travers, avec humour et tendresse. Et l’on rit parce qu’on se reconnaît.

V. Ebel : Il n’y a pas que la Parole, il visite aussi notre humanité.

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Cette revisitation de la Parole et de notre humanité peut-elle en changer notre appréhension  ?

M.-O. Michel : J’espère. Il me semble que parfois nous pouvons nous habituer à ce mystère un peu trop grand de l’Incarnation. Dans la scène avec la vieille Germaine et la vieille Edmonde par exemple, elles sont en train de redécouvrir qu’elles viennent de mâcher l’infini. Fabrice pointe les choses du doigt pour nous interpeller : est-ce que nous nous rendons vraiment compte  ?

G. Damghani : En même temps, peut-être que nous mourrions si nous avions pleinement conscience de ce qui se passe…

M.-O. Michel : Pour que Ève fut créée, il a fallu qu’Adam soit plongé dans un profond sommeil ; Dieu agit sans que nous ayons forcément conscience… Quoi qu’il en soit l’écriture de Fabrice a cette force d’aller explorer et interroger le mystère pour lui demander : que veux-Tu nous dire ?

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Lire la critique de la pièce.

« Gabbatha », de Fabrice Hadjadj. Mis en scène par Michel-Olivier Michel et Véronique Ebel.

Joué par Michel-Olivier Michel, Véronique Ebel et Golchehr Damghani.

Du mardi 5 au dimanche 17 février 2013 du mardi au samedi à 20h30 et le dimanche à 16h. Relâche lundi 11 et mercredi 13 février.

À l’Espace Bernanos – 4 rue du Havre – Paris 9e.

Réservation au 06.60.85.74.54 ou en ligne.