Dans quelques jours, doit paraître un livre du pape émérite Benoît XVI, rassemblant des textes qui concernent la politique. C’est son successeur le pape François qui en a écrit la préface, et les quelques extraits publiés par le Vatican donnent l’envie de connaître au plus vite le contenu de l’ouvrage. Car, pour François, il s’agit « d’une sorte de boussole pour comprendre notre temps présent et trouver une orientation solide pour l’avenir ». On ne s’étonne pas de l’accord profond des deux papes sur des notions centrales de philosophie politique, en accord avec leur éclairage théologique. Mais on leur sait gré de montrer en quoi une telle philosophie nous éclaire par contraste avec d’autres conceptions du monde qui tendent à s’imposer à la conscience des hommes d’aujourd’hui.
Il m’arrive souvent de m’interroger pour savoir si un Jacques Maritain, aujourd’hui, pourrait contribuer à la rédaction d’une charte universelle des droits de l’homme, comme il l’avait fait au lendemain de la guerre avec des penseurs qui ne partageaient pas ses conceptions religieuses, tel le juriste René Cassin. Depuis lors, en effet, des différences essentielles se sont creusées, qui empêcheraient un véritable consensus, à partir de conceptions proches de l’homme, ou suffisamment voisines pour se recouper. La lutte contre le nazisme et la réflexion qu’appelaient les transgressions horribles commises par lui, conduisaient sans doute, par réaction, à redéfinir des principes communs montant la garde autour de la dignité humaine. Je ne suis pas sûr qu’on retrouverait aujourd’hui la même unanimité.
Quand le pape François met en cause « la colonisation des consciences », celle qui amène à nier les différences entre masculin et féminin, à planifier la production d’êtres humains et à tenir pour logique et licite l’élimination de ceux qui ne s’acceptent plus créés, donnés, conçus et générés, il désigne ce qui constitue aujourd’hui un véritable schisme anthropologique. Apparaissent, dit encore François à la suite de son prédécesseur, « des droits orientés vers l’autodestruction de l’homme » parce qu’ils nient que l’homme est une créature de Dieu, qui en protège la liberté et la dignité. On pourrait bien redécouvrir ainsi comment l’obéissance à Dieu est la condition première du respect véritable des droits de l’homme.