Une controverse a surgi lors de la réponse du pape François à un journaliste qui l’interrogeait la semaine dernière sur le fait « d’éviter une grossesse » face au virus Zika. Par la suite, les remarques d’un porte-parole du pape n’ont fait qu’ajouter à la confusion. L’affirmation actuelle, quel que soit son mérite, ne permet pas de penser qu’il y ait eu un changement dans l’interdiction définitive par l’Eglise de la contraception au sein du mariage, même dans le but d’éviter la naissance d’un enfant malade ou handicapé. Il ne modifie pas non plus l’appréciation actuelle de la contraception en cas de viol, ni l’affirmation du pape Benoit que les préservatifs ne sont pas le bon moyen de gérer une maladie.
Le journaliste a demandé : « (à propos du virus Zika) certaines autorités ont proposé l’avortement, ou la contraception. A propos de la contraception, sur ce sujet, est-ce que l’Eglise peut prendre en considération le concept du « moindre mal » ?
François a répondu « L’avortement n’est pas un moindre mal. L’avortement est un crime, un mal absolu…Par contre, en ce qui concerne le « moindre mal » : éviter une grossesse en est un cas – nous parlons en termes de conflits entre le cinquième et le sixième commandement. Paul VI, le grand, dans une situation difficile en Afrique, a permis aux religieuses d’utiliser des contraceptifs en cas de viols. Il ne faut pas confondre le mal qu’est en soi la contraception, avec l’avortement….Eviter une grossesse n’est pas un mal absolu. »
François affirmait la doctrine catholique quand il assurait que, au contraire de l’avortement, la contraception n’est pas un mal absolu. En fait, alors que l’Eglise interdit toujours l’avortement, elle reconnait qu’il peut y avoir des raisons morales sérieuses d’éviter une grossesse. Dans ces cas-là, éviter une grossesse peut être un devoir moral et n’est jamais traité de « moindre mal ». C’est pourquoi les couples qui pratiquent l’abstinence et les moyens naturels de régulation des naissances, pour des raisons graves, ne font aucun mal.
La brève réflexion du pape doit être considérée dans le contexte de l’enseignement définitif du magistère selon lequel il y a une « connexion absolue, divinement créée, entre la signification unitive et la signification procréative….inhérente à l’acte conjugal » (Humanae vitae 12). Par conséquent on ne peut jamais « justifier délibérément le fait de priver l’acte conjugal de sa fertilité en proclamant que l’on choisit le moindre mal », même s’il s’agit « de défendre et de procurer un bienfait que ce soit pour les individus, les familles ou les sociétés. » (HV14)
Ceci veut dire que bien que le fait d’éviter une grossesse ne soit pas un mal absolu, l’utilisation de la contraception dans le mariage est toujours mal. Aussi, les époux ne peuvent pas justifier les contraceptifs par l’argument qu’ils essayent d’éviter la naissance d’enfants malades ou handicapés, plutôt que d’éviter une grossesse.
Les commentaires du pape sur la contraception dans le cas de viol impliquent un problème qui n’a pas été défini explicitement par le magistère, mais il ne représente aucune innovation dans la morale catholique. De nombreux évêques ont approuvé les protocoles hospitaliers qui autorisent les contraceptifs en cas de viol, à condition que ceux-ci ne soient pas abortifs. Cependant, ceci n’es pas basé sur une exception à l’enseignement définitif, ou un recours à un « moindre mal », mais la triste réalité que le viol est un acte de violence, et non un acte conjugal dont la fertilité ne doit jamais être empêchée.
La référence du pape au cas (non avéré) de Paul VI et des religieuses africaines, n’ajoute guère d’éclairage sur l’usage de contraceptifs en cas de viol, parce qu’il n’y a aucune trace publique d’une telle décision. Certains chercheurs affirment donc que Paul VI n’a jamais donné vraiment cette permission, alors que d’autres proclament qu’il a donné un accord tacite.
Le pape n’explique pas ce qu’il veut dire quand il appelle le fait d’éviter une grossesse « un moindre mal » dans « les conflits » entre le cinquième commandement (meurtre) et le sixième (chasteté). Le 30 novembre, il a fait une remarque tout aussi énigmatique à un journaliste qui l’interrogeait sur l’usage de préservatifs pour éviter l’infection du HIV. Mais il est sûr qu’il serait incorrect d’interpréter ces commentaires comme suggérant que la violation du sixième commandement, y compris l’usage de contraceptifs dans le mariage, est autre chose qu’un péché.
Les remarques du porte-parole du pape, qui ont suivi, ont malheureusement entretenu la confusion plutôt que la clarté, surtout sur deux points. D’abord, il a parlé d’un « sérieux discernement de la conscience » sur l’usage des contraceptifs et des préservatifs dans des situations graves. Mais il n’a pas souligné qu’un tel discernement nécessite des critères moraux objectifs, y compris le sixième commandement et la nature de l’acte conjugal. Déjà, en dehors du mariage, leur usage ne peut pas être le résultat d’un sérieux discernement, car la conscience rejetterait entièrement toute activité sexuelle ; dans le mariage, l’usage en est interdit, même dans de graves circonstances. En fait il n’y a qu’un seul cas où leur usage est approuvé : le viol.
Ensuite, il a dit que Benoit XVI « a parlé de l’usage des préservatifs dans le cas de risque de contagion » sans ajouter l’analyse morale de Benoît : « Ce n’est pas le bon moyen de gérer l’horreur de l’infection du HIV ».
Où en sommes-nous alors à propos du virus Zika ? Si ce virus cause véritablement la microcéphalie, c’est l’un des nombreux dangers qui menacent un enfant à naître ou une mère. Nous devons faire face à de profondes tragédies dans ce monde qui s’écroule. Les chrétiens sont appelés, en union avec Jésus crucifié et ressuscité, à porter leur croix, à ne pas se laisser « vaincre par le mal, mais à venir à bout du mal par le bien », sachant par la foi que « toute chose travaille pour le bien de celui qui aime Dieu ».
Dans le cas du mariage, cela veut dire que pour le bien des individus, des familles et des sociétés, un couple peut avoir besoin de s’abstenir de l’union conjugale, peut-être pendant un longue période. De nombreux catholiques vivent cette réalité quotidiennement, avec amour et courage. Ils méritent notre admiration et notre soutien.
Dieu dans sa miséricorde nous a révélé ces vérités pour que notre joie soit abondante, même au milieu de la souffrance. Et Il nous fortifiera pour que nous vivions l’Evangile en dépit de nos peurs, de nos manques et de nos péchés. C’est cela l’enseignement constant de l’Eglise, le seul contexte valide pour nous approcher de la vie chrétienne – ou pour comprendre les déclarations des papes, des évêques et des porte –paroles du Vatican.
25 février 2016
https://www.thecatholicthing.org/2016/02/25/francis-contraception-and-the-zika-virus/