À l’égard du nouveau Président de la République, on peut éprouver les sentiments les plus divers et émettre les jugements les plus contrastés : adhésion ou désaccord, confiance ou défiance, sympathie ou éloignement. Le sens civique élémentaire commande que l’on fasse des vœux pour qu’il gouverne au mieux des intérêts fondamentaux du pays et de sa population, dans le contexte de la solidarité européenne et des flux de la mondialisation. L’opposant le plus résolu reconnaîtra l’extrême difficulté de la tâche, à l’heure où, avec tous nos voisins, nous avons à nous battre contre les effets déstabilisateurs de la crise financière. Loin de s’améliorer, la situation économique se dégrade, avec la perspective de licenciements massifs dans les secteurs industriels qui subsistent. Comment relancer la croissance, diminuer la dette publique alors que la logique perverse de la déflation est déjà en train de détruire un pays comme la Grèce ?
C’est dire combien la solidarité nationale devrait s’imposer, sans empêcher l’expression d’une juste critique. On constatera bientôt s’il y a une différence significative dans la gestion d’un gouvernement socialiste par rapport à celle d’un pouvoir libéral. Une telle différence s’inscrit dans le registre classique de l’exercice de l’autorité, avec l’éventail des possibles. Mais il y a une limite à la légitimité politique, c’est celle qui concerne le respect des lois non-écrites, celles qui relèvent de la conscience. Dès lors que l’on veut légiférer à propos du mariage, de la bioéthique et de la fin de vie, l’intervention législative et étatique ne concerne plus seulement l’ordre des moyens mais celui des fins. L’arbitrage par la loi majoritaire ne saurait violer l’espace des interdits. La figure d’Antigone symbolise depuis longtemps la résistance souveraine contre l’ordre injuste de Créon. Lorsqu’il y a transgression morale, la légitimité politique s’absente, c’est le règne de l’arbitraire. L’objection de conscience en pareil cas ne saurait qu’adoucir la violence de fait. Mais la division profonde des esprits et des cœurs qui résulte de cette transgression constitue un lourd handicap pour l’unité du pays et l’entente des citoyens. La blessure morale que constituerait l’atteinte à la nature du mariage ainsi qu’aux interdits moraux ne serait pas humainement réparable.
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