Qu’adviendra-t-il de cette triste affaire d’escroquerie qui concerne plusieurs joueurs de l’équipe de handball de Montpellier ? Je n’en sais rien et n’éprouve nulle envie de mêler ma voix au vacarme qui l’accompagne. De plus, je respecte la présomption d’innocence rappelée à juste titre par Maître Dupont-Moretti, l’un des avocats des joueurs. Toutefois, on est bien obligé une fois de plus de constater le rôle disproportionné joué par l’argent dans le sport de haut niveau. Les sportifs n’en sont pas responsables au premier chef, ils participent d’une certaine mentalité qui s’identifie à la société de consommation et qui finit par faire sauter toutes les digues de la morale et de ce que le romancier George Orwell appelait « la commune décence ».
Laissons le sport de côté et posons-nous quelques questions gênantes sur les ressorts d’une telle civilisation, où les normes anciennes sont réputées obsolètes et où certains, ne serait-ce qu’à propos du mariage homosexuel, ne craignent pas d’évoquer avec soulagement la fin des préjugés judéo-chrétiens. Sont-ils vraiment conscients de la portée d’un tel langage ? Ils seraient d’évidence furieux si on leur rappelait qu’il y a eu dans l’histoire du XXe siècle une sinistre bande qui avait fait de l’abolition du judéo-christianisme son objectif direct et avait employé tous les moyens à cette fin. Oh ! je n’entends nullement céder à ce que Léo Strauss appelait la « reductio ad Hitlerum » et ne suspecte personne de vouloir rouvrir les camps. Ce contre quoi je m’insurge, c’est la lutte sournoise contre les âmes, la destruction des ressorts intimes de l’esprit et de la sensibilité.
Cela vient de loin. Quand Voltaire se félicitait que « la nation rassasiée de réflexions morales et de disputes théologiques sur la grâce et les convulsions se mit enfin à raisonner sur les blés » – entendons là le commerce des grains – il annonçait un changement brutal de paradigme. J’emprunte cette citation à l’excellent Jean-Claude Michéa, un vrai penseur qui nous permet de prendre la mesure des dérives et du désarroi actuel. Mais cela me rappelle un autre Georges que Orwell, Bernanos, qui rageusement prévenait : « On ne nous aura pas, on ne nous aura pas vivants ! »