La liturgie du dimanche des Rameaux est composée de deux parties. La première est la bénédiction des rameaux, suivie d’une procession. Dans la seconde, suivant l’entrée dans l’église, la messe commence. Ce qui relie entre elles ces deux parties, en en faisant une seule action liturgique, ce sont les évangiles proclamées dans chaque partie.
Cette année, c’est le récit de l’entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem, raconté par Matthieu, qui est énoncé. Lors de la proclamation de la Parole, durant la messe, c’est le récit de la Passion relaté par Matthieu qui est lu. L’entrée triomphante de Jésus dans Jérusalem trouve son achèvement dans sa passion, sa mort et sa résurrection. Tout comme ils ne forment qu’un seul récit dans l’Évangile de Matthieu, ils forment un tout liturgique lors du Dimanche des Rameaux, un tout qui trouvera son achèvement à la fin de la semaine, avec le Vendredi Saint et le Dimanche de Pâques.
Quelles est alors la signification théologique de l’entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem puis de sa mort et de sa résurrection à Jérusalem ?
Dans le récit de Matthieu, Jésus, monté sur un âne, part de Bethphagée sur le Mont des Oliviers, traverse la vallée du Cédron et remonte vers Jérusalem. Avant l’entrée dans Jérusalem, une foule nombreuse étale des manteaux et des palmes devant Jésus et proclame : « Hosanna au Fils de David ; béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ; hosanna au plus haut des cieux. » Certains sont intrigués et demandent : « Qui est-ce ? » On leur répond : « C’est Jésus le prophète, de Nazareth en Galilée. »
L’éparpillement de vêtements et de palmes exprime que la foule est en train d’acclamer un nouveau roi (Voir le deuxième livre des rois 9:13). Ce nouveau roi est un descendant du grand roi David, celui à qui Dieu a promis que son royaume durerait toujours (2 Samuel 7:12-13). La joyeuse acclamation « Hosanna » signifie « sauve-nous ». « Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur » fait référence au psaume 118 (verset 26).
Maintenant, qui est le nouveau roi et sauveur ? Nul autre que Jésus de Nazareth, car il est « le prophète » que Dieu a promis à Moïse : « Je leur susciterai [aux Israélites] un prophète comme toi, du milieu de leur frères. Je mettrai mes paroles dans sa bouche, et il leur dira tout ce que je lui commanderai » (Deutéronome 18:18).
En rejouant l’entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem, l’Église proclame avec jubilation ce que toute la foule a proclamé de lui. Jésus est le nouveau David, celui qui vient au nom de Dieu lui-même, et dont le royaume n’aura pas de fin. Jésus est le Sauveur car il est le prophète définitif promis, la Parole de Dieu incarnée.
Bien qu’étant joyeuse dans ses louanges et proclamation de Jésus, la foule ne savait pas comment serait accompli tout ce qu’elle annonçait. À la fin de la semaine, Jésus serait condamné à mort et cloué sur une croix. Ironiquement, ce qui a été joyeusement déclaré le Dimanche des Rameaux est réalisé le Vendredi Saint, et donc nous procédons maintenant à la lecture du récit de la Passion dans Matthieu.
Nous n’avons pas la place d’examiner ici tout le récit de la Passion, mais nous pouvons relever quelques éléments saillants.
Quand Jésus est arrêté et amené devant Pilate, ce dernier lui demande : « Es-tu le roi des juifs ? » Jésus répond : « Tu le dis. » Sachant que Jésus est innocent de tout crime, Pilate entreprend de le relâcher. Il demande aux autorités juives si elles veulent qu’il relâche le criminel Barabbas ou « Jésus appelé Christ ». Les chefs des prêtres et les anciens poussent la foule à demander la libération de Barabbas et la crucifixion de Jésus.
Les foules, lors de son entrée à Jérusalem, ont acclamé Jésus comme leur nouveau roi et reconnu implicitement qu’il était le messie de Dieu, le Christ, le prophète promis de longue date. Comment Jésus, le Christ crucifié, peut-il être le roi des Juifs ?
Durant son agonie sur la Croix, Jésus est injurié et moqué. « Toi qui allait détruire le Temple et le rebâtir en trois jours, sauve-toi toi-même, si tu es le Fils de Dieu, et descends de la croix !… Il en a sauvé d’autres ; il est incapable de se sauver lui-même. Ainsi, il est le roi d’Israël ! Qu’il descende maintenant de la croix et nous croirons en lui. Il faisait confiance à Dieu ; que Dieu le délivre maintenant s’il tient à lui. Car il a dit : ‘Je suis le Fils de Dieu’ »
L’ironie se fait jour à travers ce sarcasme et ce mépris. Comme Grand Prêtre, Jésus offre avec amour le sacrifice parfait, sa vie sainte et innocente, au Père. Sur la Croix, comme Fils de Dieu incarné, il est le temple nouveau au sein duquel le sacrifice parfait pour le pardon des péchés est offert. De cette façon, il sauve définitivement les autres du péché. De même, Jésus descendra de la Croix, non de la manière demandée par les chefs des prêtres, mais en étant relevé glorieusement d’entre les morts par le Père.
Jésus fait confiance au Père, et le Père l’aime, il l’aime tant qu’en le relevant d’entre les morts, il en fait le Seigneur du ciel et de la terre. Bien plus, par sa mort et sa résurrection, Jésus devient le roi des Juifs et, en tant que tel, le Sauveur du monde. Ironiquement, encore une fois, tout ce qui a été matière à injures et moqueries devient le moyen par lequel Jésus parachève le royaume davidique salvateur sans fin promis par Dieu, un royaume que Jésus crucifié et ressuscité incarne maintenant et à jamais.
Les salutations du Dimanche des Rameaux deviennent maintenant les acclamations de Pâques. « Hosanna au Fils de David ; béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ; hosanna au plus haut des cieux. » Et pour qui cette allégresse ? « Jésus, le prophète, de Nazareth en Galilée. »
Donc, l’entrée triomphale de Jésus dans Jérusalem trouve son point culminant avec sa mort et sa résurrection triomphales à Jérusalem. En raison de ce qu’il a accompli dans la Jérusalem terrestre, Jésus demeure maintenant dans la nouvelle Jérusalem. A la fin des temps, le Seigneur Jésus ressuscité descendra de la Jérusalem céleste et nous arrachera à la tombe.
Alors, avec de joyeux hosanna, venus de toutes cités et nations, nous entrerons triomphalement dans la Jérusalem céleste, avec Jésus de Nazareth en Galilée.