Au moment d’interrompre pour l’été cet éditorial, avant de nous retrouver en septembre, il ne m’est pas possible d’échapper à un bref regard rétrospectif sur cette année que nous avons, je crois, intensément vécue ensemble. Sans forfanterie, nous avons mené une belle bataille, qui n’est d’ailleurs pas terminée, parce qu’elle annonce une suite, et sans doute d’autres batailles. Ce mot de bataille peut paraître étrange dans notre espace de langage, qui se veut fidèle à l’Évangile. Mais saint Paul nous a instruits de ce qu’est le combat spirituel et nous savons que toutes les armes ne nous sont pas permises parce que nous avons à aimer nos adversaires. J’espère bien que nous n’avons pas dérogé à nos principes et que nous avons su, jusque dans les circonstances les plus difficiles, montrer qu’il n’y avait nulle haine dans nos cœurs.
Ce n’était pas évident. Ceux qui ont eu à affronter directement un débat public savent que l’auditoire, lorsqu’il vous était opposé, était singulièrement crispé. L’échange des arguments avait forcément un côté passionnel. On n’en était pas à s’expliquer sereinement sur le terrain de la rationalité pure. La distinction de Gabriel Marcel entre ce qui est de l’ordre du problème objectif et ce qui est de l’ordre du mystère qui vous implique subjectivement autant qu’il touche l’autre au plus intime de lui-même, devient évidente sur ce terrain là. L’homosexualité appartient à ce domaine du mystère. D’ailleurs, la plupart du temps, nous ne l’avons pas évoqué directement, laissant ce soin à ceux qui pouvaient en parler, tel Philippe Ariño, à la suite d’une histoire personnelle qui lui conférait une autorité sui generis.
Pourquoi l’affaire n’est-elle pas terminée ? Simplement parce qu’elle relève d’une exigence inhérente à notre engagement chrétien total. On appelle sociétal aujourd’hui ce qui relève de l’énigme anthropologique, du mystère de l’homme, au simple fait d’être homme. C’est dire que les sujets de désaccord ne sont pas arbitrables par les simples procédures de la discussion ou de la négociation. L’été, espérons le, sera fécond pour réexaminer tous ces enjeux qui appartiennent à la culture fondamentale, que Maurice Clavel définissait comme option sur l’absolu.
Chronique lue sur radio Notre-Dame le 4 juillet 2013.