Dissociété française - France Catholique
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Élections législatives : Comment reconstruire ?
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Dissociété française

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© Pascal Deloche / Godong

Il est difficile de qualifier la situation actuelle d’une France en proie à des convulsions d’une intensité redoutable. Le mot insurrection, qui vient naturellement à l’esprit, est tout à fait adéquat pour définir le degré de gravité d’événements auxquels on n’avait jamais assisté. Cette façon systématique de s’en prendre aux bâtiments publics et de semer la crainte jusqu’à mettre en danger de mort les représentants de l’ordre public renvoie à un phénomène généralisé de dissociété.

L’anarchie des quartiers

Il n’est pas exagéré d’affirmer que le pays se trouve coupé en deux, avec une frange importante d’une jeunesse qui ne se reconnaît pas dans l’identité française et tient désormais à l’affirmer haut et fort. Voilà déjà longtemps que l’on parle des quartiers perdus de la République sans tirer les conséquences nécessaires.

Les milliards déversés pour la rénovation de ces quartiers n’ont servi à rien. Et lorsqu’on s’attaque aux symboles mêmes de l’intégration que sont les écoles, on perçoit l’abîme qui n’a cessé de se creuser. L’État est placé devant ses responsabilités. Et il est temps de bien comprendre ce que signifie ce mot de République sans cesse brandi comme un talisman. Car ici, la République ne définit pas seulement un mode de gouvernement issu de la Révolution française. Il y aurait peut-être lieu de revenir à l’ouvrage fondamental de Jean Bodin, intitulé Les six livres de la République, publié en 1576. En deçà des formes diverses du pouvoir, l’auteur définit l’État par la souveraineté et la puissance « de donner et casser la loi ». En d’autres termes, la puissance publique qui s’impose comme une exigence absolue d’ordre et de bien commun. Dans les circonstances présentes, c’est l’anarchie des quartiers qui s’oppose à l’autorité de l’État et ce sont d’ailleurs ses institutions qui sont visées à coups de dégradations et d’incendies. Le récit du maire de L’Haÿ-les-Roses rend compte d’une façon très précise comment la haine de l’autorité touche cette institution de proximité qu’est la commune. Ce qui nous oblige à envisager les relations entre les institutions et la société civile.

La question de l’immigration

Car la République ne va pas non plus sans l’existence d’une nation qui se reconnaît dans son identité culturelle et civilisationnelle. Les désordres actuels sont significatifs d’un refus de cette identité et des mœurs qui caractérisent la vie sociale et ses agréments. À ce propos, un désaccord s’est affirmé récemment entre ceux qui préconisent la pacification des esprits et ceux qui se réclament de la seule justice. Mais comment réaliser une telle justice alors que depuis des décennies les politiques de la ville ont échoué ? Les avertissements n’ont pas manqué. Il convient de rappeler celui du sociologue Paul Yonnet dans son essai paru en 1993 et qui vient d’ailleurs d’être réédité (Voyage au centre du malaise français, L’Artilleur). Dans sa préface à cette réédition, Marcel Gauchet met en lumière « l’articulation de la nécessaire ouverture à la diversité du monde et de la non moins nécessaire fermeture exigée par la maîtrise démocratique des effets de l’ouverture. Une question qui n’appelle pas moins que la révision en règle de la philosophie de nos régimes, depuis le statut de l’État-nation jusqu’à la relation entre droits individuels et souveraineté collective. »

Des solutions existent sans aucun doute, mais elles exigent, outre la reprise en main par la puissance publique, une tâche civilisationnelle de longue haleine au terme de laquelle la nation recouvre son unité, son identité à l’encontre de ce que le sociologue Jérôme Fourquet appelle « l’archipel français ». Faut-il préciser que la question de l’immigration s’y trouve posée avec insistance, de même que celle de l’islam. L’islam, une donnée civilisationnelle qui s’impose, quoi qu’on veuille et au-delà de ses désinences extrémistes.