Il existe un argument plutôt simple, même s’il est peu discuté de nos jours, qui peut aider à accepter l’existence de Dieu. Il a la capacité potentielle de changer les cœurs et les esprits de ceux qui le considèrent sérieusement.
Succinctement, l’argument est que, pour qu’un système moral objectif existe, il faut que Dieu existe. Pour qu’un système moral soit vraiment objectif, la loi morale doit émaner d’une source extérieure à l’humanité. Autrement, tout ce que nous avons en matière de morale relève de l’opinion humaine subjective, quelle que soit la manière dont on l’habille. Les implications de ceci sont particulièrement fascinantes, surtout depuis que la grande majorité des non-croyants vit et agit comme s’ils croyaient en un système moral objectif, alors que leur propre système de croyance rend cela logiquement impossible.
Réfléchir sur ces questions a joué un rôle-clé dans ma propre conversion vers l’Église. Réfléchir profondément sur la morale objective vous force à vous interroger quotidiennement sur la manière dont vous agissez et quelle sorte logique se trouve derrière vos choix moraux.
Si l’on emploie une logique impartiale, la conclusion est claire : sans un fournisseur divin de la loi, les actions et les choix moraux ne peuvent qu’être subjectifs et, finalement, sont dénués de sens. Il est terrifiant de comprendre l’implication complète des mots d’Ivan dans Les frères Karamazov quand il dit que « sans Dieu, tout peut être permis ».
Lorsque l’on parvient à ce point, le seul choix qui reste est entre Dieu et le nihilisme. Les athées les plus intelligents ne réalisent cela que trop bien, c’est pourquoi ce point n’est pas souvent discuté. Au lieu de cela, les actes les plus odieux sont simplement « clairement des erreurs », sans qu’il soit besoin d’aller investiguer plus loin pourquoi c’est ainsi.
Bien sûr, une telle morale sans fondations est littéralement un non-sens. Elle vous fait penser à la maxime attribuée à Chesterton selon laquelle « lorsqu’un homme cesse de croire en Dieu, il ne croit alors en rien, il croit n’importe quoi. »
Je répète donc : la majorité des individus vit comme s’il existe un système moral objectif, même si sans Dieu, un tel système ne peut exister. C. S. Lewis souligne avec lucidité au début de Mere Christianity (« Le simple christianisme ») que les gens « réclament une sorte de style de conduite standard qu’ils s’attendent à être connu par les autres », lorsque le désaccord moral sort brusquement sa tête hideuse.
C’est encore le cas de nos jours, pourtant, à en croire les mœurs de la société moderne, il n’y a personne (et plus précisément pas de Dieu) pour fournir le standard. Logiquement, si c’est le cas, le standard lui-même doit s’effondrer.
J’ai souvent débattu de ce point avec des amis athées, dont certains ont essayé d’offrir des moyens alternatifs « objectifs » dans lesquels on peut comprendre la morale. Un de mes interlocuteurs a suggéré que l’utilitarisme pouvait être donné comme exemple d’un système moral objectif non théiste.
Pourtant, l’utilitarisme est à peine une théorie philosophique postulée par l’homme. Et même si tout le monde sur terre acceptait l’utilitarisme, personne ne serait obligé de le suivre de la même façon que nous sommes obligés de suivre la loi morale du Créateur du ciel et de la terre. L’utilité est comme nulle comparée à l’Amour, comme le savent les lecteurs de The Catholic Thing. Il n’y a pas ici de différence subtile, la distance entre ces idées est plutôt grande, et évidente.
Un autre ami a suggéré que l’on n’agit comme on le fait uniquement pour des raisons biologiques, et soutenu que l’on peut extraire des vérités morales objectives en réfléchissant à notre environnement et à notre composition biologiques. Ce serait un monde dans lequel on n’agirait que dans son propre intérêt, où le sacrifice de soi serait un mensonge et où l’amour ne serait qu’une « réaction chimique dans le cerveau ».
De quelque côté qu’on le retourne, cet argument est incompréhensible. Parce que si Dieu n’existe pas, qui peut dire s’il est bon ou mauvais de suivre les demandes biologiques spécifiques ? Prenez l’exemple de l’acte horrible qu’est le viol, par exemple. Si l’on suit un système moral fondé sur la simple biologie darwinienne, pour laquelle le but ultime de la vie est la propagation de gènes, le viol ne pourrait-il être considéré comme bon en ce qu’il peut assurer une transmission plus étendue de ces gènes ?
Je ne prétends pas que mon cher ami plaiderait pour cela, mais il s’agit là d’un exemple évident de l’absurdité de la réduction de la morale à la biologie. Sans vouloir trop insister sur ce point, il y a un monde de différences entre la beauté de l’amour sexuel humain et la copulation violente de nombreuses espèces dans le règne animal.
Nous pouvons voir autour de nous la désintégration des éthiques civilisées qui résulte de la confusion régnant sur la morale objective. Cette confusion n’est constituée que par des gens bien-intentionnés autour de nous, qui parlent comme si la morale objective existe tout en rejetant tout ce qui est nécessaire pour l’étayer, y compris l’Unique.
Le vernis d’une éthique civilisée dont nous pouvons encore bénéficier n’est dû qu’à la rémanence d’une civilisation chrétienne, et si l’on n’en prend pas soin, notre héritage peut être complètement mis de côté. Le lien entre Dieu et la morale objective doit être fermement réaffirmé, clairement et souvent, par les prêtres, les apologistes, les philosophes, les catéchistes et autres. Il faut vraiment le crier sur les toits !
Source : https://www.thecatholicthing.org/2017/07/08/god-and-objective-morality/
Tableau : La tour de Babel par Marten van Vlackenborch, 1595 [Gemäldegalerie Alte Meister, Dresde]
Christopher Akers est un écrivain qui vit en Écosse et est diplômé de l’université d’Édimbourg. Il est actuellement étudiant de troisième cycle en littérature et arts à l’université d’Oxford, et ses travaux ont paru dans la National Review et dans Réaction.